La critique a fait d'autant plus de bruit qu'elle venait du camp démocrate.

«Les antibiotiques peuvent guérir une pneumonie. Mais quel est le remède pour un penchant malsain pour la confidentialité qui crée à maintes reprises des problèmes inutiles?»

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Aucun doute possible sur la malade à laquelle David Axelrod, ancien stratège de Barack Obama, faisait référence dans ce message publié sur Twitter, hier matin.

Il s'agissait bien d'Hillary Clinton, dont la pneumonie n'a été révélée qu'après la diffusion d'une vidéo la montrant chancelante et titubante, dimanche matin. Sans ce document filmé par un quidam, le public américain aurait-il su que la candidate démocrate à la présidence avait reçu deux jours plus tôt un diagnostic susceptible de nuire à sa campagne présidentielle?

Cette question sans réponse satisfaisante fait partie des problèmes inutiles évoqués par Axelrod et exploités par le camp Trump. La directrice de la campagne du candidat républicain, Kellyanne Conway, s'est d'ailleurs empressée de «retweeter» la critique de l'ex-gourou démocrate. Désormais, les adversaires de Clinton peuvent l'accuser d'avoir tenté de cacher la vérité non seulement sur ses courriels lorsqu'elle était secrétaire d'État, mais également sur sa santé.

Clinton n'est pas la seule

Mais attention: Hillary Clinton n'a pas le monopole du secret dans cette campagne rocambolesque. Donald Trump a également été moins que transparent sur sa condition physique. À la fin du mois d'août, son médecin personnel, Harold Bornstein, a avoué avoir pondu en cinq minutes l'étrange bulletin de santé dans lequel il vantait la santé de cheval du magnat de l'immobilier.

«J'ai écrit quatre ou cinq lignes pour qu'ils soient contents», a-t-il confié à NBC News au sujet de la lettre d'une page dans laquelle ce gastroentérologue de 70 ans affirmait «sans équivoque que M. Trump sera l'individu en meilleure santé jamais élu à la présidence» s'il remporte l'élection de novembre.

Trump manque également de transparence sur ses impôts. S'il maintient son refus de publier ses plus récentes déclarations de revenus, il rompra avec une tradition respectée par tous les candidats républicains à la présidence depuis 1980. À l'opposé, Clinton est un modèle de clarté sur cette question, ayant rendu publiques toutes ses déclarations de revenus depuis 1977.

Hier, les deux candidats présidentiels ont promis de fournir dès cette semaine plus d'informations sur leur condition physique.

De son côté, Trump a révélé qu'il avait subi la semaine dernière un examen médical dont il dévoilera des «résultats spécifiques» jeudi sur le plateau de l'émission The Dr. Oz Show. Reste à voir si les informations que divulgueront les deux candidats seront aussi complètes que celles auxquelles la plupart des plus récents candidats présidentiels ont habitué le public américain.

En attendant, il ne fait pas de doute que l'annonce d'un diagnostic de pneumonie fragilise la campagne de Clinton. La candidate démocrate faisait déjà face à une controverse suscitée par sa déclaration de vendredi soir dernier à propos des partisans de Trump, dont «la moitié» tomberait selon elle dans le camp des «racistes, sexistes, homophobes, xénophobes [et] islamophobes».

Le lendemain, Clinton a dit regretter d'avoir quantifié de «pitoyables» certains partisans de Trump. Ce dernier n'en a pas moins commencé hier à exploiter la déclaration de sa rivale dans une pub diffusée dans quatre États clés.

Clinton toujours en avance

N'empêche: en sortant du lit, dimanche matin, les membres de l'entourage de Clinton se sont peut-être consolés en prenant connaissance du sondage Washington Post/ABC News publié le jour même. Dans une course à quatre, la démocrate devance Trump, son plus proche rival, par cinq points de pourcentage auprès des électeurs probables et par dix points de pourcentage auprès des électeurs inscrits.

Mais le diagnostic de pneumonie remet ces données en question, tout en alimentant les théories de complot d'une certaine droite sur la santé de Clinton. Et, plus important encore, il ramène à l'avant-scène ce problème récurrent auquel Hillary Clinton fait face depuis des années, ce penchant pour le secret. Peu importe si les affaires de Donald Trump sont encore plus opaques ou nébuleuses que les siennes, ce penchant fait partie d'un «narratif» dont les journalistes politiques américains ne peuvent se défaire.

Au bout du compte, ce diagnostic et les questions qu'il soulève ne changeront peut-être pas grand-chose à l'issue de l'élection présidentielle. Mais ils fournissent à Trump et à ses alliés de précieuses munitions.