Avec son échec à la présidentielle, l'ex-patron multimillionnaire Mitt Romney achève une carrière remplie de succès professionnels, mais ponctuée d'échecs politiques dus notamment à une image d'opportuniste dont il n'a jamais totalement réussi à se défaire.

Quand il quitte sa carrière d'homme d'affaires, en 2002, ce mormon père de 5 fils et 18 fois grand-père, a accumulé les succès professionnels: diplômé de Harvard, consultant surdoué, patron admiré et sauveur des Jeux olympiques d'hiver de Salt Lake City en 2002.

En politique, il trébuche d'abord contre contre Ted Kennedy, frère de l'ancien président, dont il convoitait la place au Sénat en 1994.

S'il devient gouverneur du Massachusetts en 2002, son ultime ambition - diriger la nation la plus puissante du monde - ne se concrétisera jamais. Il échoue à sa première tentative aux primaires républicaines de 2008. Aujourd'hui, à 65 ans, il perd la course de 2012 après une bataille acharnée contre Barack Obama.

Entre ces deux scrutins présidentiels, Mitt Romney n'a jamais cessé d'être le «candidat Romney», dans une inlassable campagne pour persuader l'Amérique de l'embaucher, lui qui revendique tant de sauvetages d'entreprises.

Mais les centaines de millions de dollars de publicités dépensés n'ont jamais réussi à débarrasser «Mitt» de son image réservée, voire guindée, ni à laver son parcours de ses nombreuses volte-face idéologiques.

Le «vrai» Romney, pour ses rivaux de la primaire républicaine, est un irrécupérable modéré, autrefois favorable au droit à l'avortement. Pour les démocrates, le «vrai» Romney est cet extrémiste de droite arc-bouté sur de draconiennes coupes budgétaires.

Un missionnaire mormon en France

Né en 1947 à Detroit, la capitale de l'automobile, dans le Michigan (nord), Willard Mitt Romney tombe dans la marmite politique à l'âge de 15 ans, quand il accompagne son père George dans sa campagne victorieuse pour le poste de gouverneur. Il assiste ensuite à la défaite de son père à la primaire républicaine pour la présidentielle de 1968 contre Richard Nixon.

Quand il rencontre Ann Davies en 1965, elle n'a que 15 ans. Les amoureux se marieront en 1969, lorsque Mitt rentre de France où, pendant 30 mois, le missionnaire mormon travaille du matin au soir pour convertir les Français à cette étrange religion venue d'Amérique. En juin 1968, une voiture fonce droit sur la Citroën DS qu'il conduit. Un gendarme le déclare mort, mais si la passagère avant du véhicule meurt dans l'accident, Mitt s'en sort sans séquelles.

À son retour, le couple s'installe à Belmont, près de Boston, dans le Massachusetts, où Mitt Romney intègre la meilleure université du pays, Harvard, dont il obtient un double diplôme MBA et droit en 1975.

Vedette montante du conseil, il intègre le Boston Consulting Group puis Bain&Company en 1977, où le PDG lui confie en 1984 la tête d'une nouvelle société: Bain Capital.

Pendant 15 ans, Bain Capital fera de Mitt Romney un homme riche et lui apportera la réputation d'homme d'affaires brillant dont il s'est targué durant la campagne pour résoudre les problèmes du pays.

Les fonds de Bain Capital sont à l'origine de ce succès, mais certaines restructurations très lucratives pour les investisseurs conduiront à des licenciements qui noirciront le bilan du candidat.

Mais Mitt Romney a aussi un coeur, et ses proches ont été mis à contribution pour qu'ils décrivent aux électeurs le «vrai» Mitt: blagueur, attentif et intègre.

Pendant les deux derniers mois de campagne, ses réunions électorales s'ouvrent sur un film mêlant vidéos de famille et entretiens confessions. La générosité du candidat n'est du reste pas feinte, comme le racontent Scott Helman et Michael Kranish dans leur biographie The Real Romney.

De 1986 à 1994, Mitt Romney dirige l'équivalent du diocèse mormon de Boston. À titre privé, il offre à cette époque de financer les études des enfants d'une famille dans le besoin ou veille à l'hôpital sur un jeune garçon condamné par une leucémie.

Mais Mitt Romney fait aussi pression sur une mère célibataire pour qu'elle confie son enfant à naître à l'agence d'adoption de l'Église, ce qu'elle refuse.

Après sa défaite de 2008, sa femme, Ann, avait juré «plus jamais ça», avant de changer d'avis en 2011. Difficile d'imaginer aujourd'hui qu'elle et les électeurs lui offriront une troisième chance.