Le candidat républicain, Mitt Romney, dispose d'une fortune colossale, d'une grosse équipe et de nombreuses années d'expérience de campagne, ce qui pourrait lui suffire pour remporter la course à la Maison Blanche. Mais le président sortant, Barack Obama, possède, lui, une carte maîtresse que Romney ne pourra pas égaler: Bill Clinton.

L'ancien président des États-Unis parcourt les États clés au pas de course, prononçant plus de discours qu'Obama lui-même et porte, sans aucun doute, une partie des espoirs de réélection du président actuel sur ses épaules.

Cet atout de campagne n'est pas un secret. Un État important? Hop, Clinton y est, puis dans un autre, puis dans un autre. À chaque fois, il démolit les propositions de Romney dans ce style décontracté, mais détaillé, dont il a usé à la convention démocrate de Charlotte, en Caroline du Nord. Et il laisse derrière lui des foules de militants se demandant pourquoi Obama n'arrive pas à se vendre aussi bien lui-même.

Vendredi était une journée banale pour Clinton. Il a effectué cinq étapes en Floride, allant de Palm Beach au sud-est, à Fort Myers sur la côte du Golfe, puis à Tallahassee. Et si Romney pensait avoir verrouillé ce «swing state» depuis longtemps, il en est pour ses frais et y retourne lundi pour tenter de lever l'incertitude.

La voix plus rauque que d'habitude, Clinton a dosé expertise et nostalgie pour dénoncer le programme de coupes fiscales de Romney à Palm Bay. «Je ne comprends pas comment des gens comme moi pourraient dormir la nuit si on nous accordait une autre remise fiscale, si on vous enlevait cet argent», a-t-il lancé sous les applaudissements de plusieurs centaines de personnes, qui ne semblent pas lui tenir rigueur de sa fortune postprésidentielle.

Après s'être débarrassé de sa veste de costume et de sa cravate orange, sous un soleil éclatant, Clinton a aligné les statistiques sur les bénéfices de la réforme d'assurance maladie d'Obama. «C'est ce que Romney veut détruire», a-t-il rappelé. À chaque étape, il encense Barack Obama, mais rappelle également ses propres mandats.

«Je suis le seul ex-président encore vivant qui vous a laissé un bénéfice budgétaire», a-t-il insisté, ajoutant que la politique d'Obama est beaucoup plus proche de la sienne que celle de Romney.

De son côté, Obama exploite aussi à fond la carte Clinton, qui ajoute de la crédibilité à ses promesses. Vendredi dans l'Ohio, il a cité son prédécesseur quatre fois.

«Durant huit ans, nous avions un président qui a partagé nos convictions et son nom était Bill Clinton, a déclaré le président. Son projet économique consistait à demander aux plus riches de payer un petit peu plus pour que nous puissions réduire nos déficits et investir dans le potentiel et les idées de notre peuple. Romney s'est opposé à ce projet (et ses calculs) étaient aussi mauvais à l'époque qu'ils le sont aujourd'hui», a fustigé Obama.

Obama utilise le plus possible la carte Clinton.

À deux jours du scrutin, Clinton, 66 ans, a parfois l'air fatigué. Il fait même quelques gaffes -comme saluer la Pennsylvanie, alors qu'il se trouvait en Ohio- et arrive régulièrement en retard, même aux rendez-vous du matin. Mais l'homme qui a enchaîné neuf étapes en une journée en 2008 pour promouvoir la candidature de sa femme Hillary aux primaires démocrates, électrise toujours les foules qui l'adorent.

Clinton a fait campagne pour Obama jeudi dans le Wisconsin et dans l'Ohio. Au début de la semaine, il s'est rendu dans l'Iowa, le Colorado, le Minnesota et le New Hampshire. Il a rejoint le président samedi en Virginie. Il était à ses côtés dimanche matin dans le New Hampshire et devait retourner en Caroline du Nord et dans le Minnesota.

Et lundi le camp démocrate compte sur lui pour éteindre toute possible éruption de Romney en Pennsylvanie et lui a programmé des étapes à Pittsburgh, Scranton et deux à Philadelphie.

Aucun État ne démontre davantage la valeur de Clinton que la Floride, le fief de la famille Bush. Obama y utilise le plus possible le dernier président en exercice de son parti alors que Romney peut difficilement se prévaloir de George W. Bush, qui a quitté la Maison-Blanche laissant l'économie en déroute et le pays engagé dans une guerre peu populaire en Irak. Le candidat républicain s'est néanmoins montré à Tampa aux côtés de Jeb Bush, frère de l'ex-président et gouverneur de la Floride.

Le fait est que les relations autrefois très fraîches entre Obama et Clinton semblent appartenir au passé. S'ils n'ont jamais été proches, le soutien de Clinton à Obama apparaît désormais comme inconditionnel. Ce qui ravit les loyalistes démocrates.

«Les républicains n'ont rien pour égaler le charisme et la force de persuasion du président Clinton», dit Doug Hattaway, un consultant proche de Clinton. «Il peut mobiliser les démocrates et attirer des électeurs indécis modérés».

Pour Bruce Marvin, venu au meeting de Clinton à Chillicothe, dans Ohio, l'ex-président explicite même le programme Obama mieux que le candidat lui-même.