Des étudiants et militants égyptiens pro-démocratie ont fait la grève samedi pour marquer le premier anniversaire de la chute du régime de Hosni Moubarak, dans l'espoir de pousser l'armée à quitter immédiatement le pouvoir, mais sans être très suivis.

Le 11 février 2011, au 18e jour d'une révolte populaire sans précédent, le vice-président de l'époque, Omar Souleimane, annonçait dans un bref message à la télévision la démission de M. Moubarak.

Un an après, plusieurs organisations, dont certaines avaient contribué à lancer la révolte contre l'ancien président, avaient appelé à lever le pied dans les universités et sur les lieux de travail, pour exiger que l'armée, accusée de mal gérer la transition, passe le relais aux civils.

Des étudiants ont manifesté dans plusieurs universités pour exiger la fin du pouvoir du Conseil suprême des forces armées (CSFA), à qui M. Moubarak a remis les rênes du pays.

«Je suis en grève car la situation du pays est mauvaise. Il n'y a aucune différence entre le Conseil militaire et Moubarak», a affirmé à l'AFP Mahmoud Magdy, un étudiant en économie à l'université d'Aïn Chams.

À l'université du Caire, une centaine d'étudiants se sont rassemblés en scandant «A bas le pouvoir militaire» et «Etudiants et travailleurs contre l'oppression et l'exploitation».

La ministre de la Coopération internationale au sein du gouvernement nommé par les militaires, Fayza Aboul Naga, a déclaré à l'agence officielle Mena que le mouvement n'avait pas été suivi dans le monde du travail et que les Egyptiens avaient «rejeté l'appel à la désobéissance civile».

Pour Alaa Abdel Fattah, un militant détenu pendant près de deux mois pour avoir «incité à la violence contre les forces armées» lors d'une manifestation, l'appel à la grève visait à «envoyer un message au peuple» pour promouvoir cette idée de désobéissance civile.

La prochaine mobilisation sera plus large, après «une coordination avec les travailleurs», a-t-il assuré, en estimant que la mobilisation avait été bonne dans les universités et les lycées.

L'appel à la grève a divisé la population et les forces politiques. Les Frères musulmans, qui dominent le Parlement récemment élu, s'y sont opposés, tout comme de nombreux Égyptiens, qui se plaignent de la dégradation de l'économie et de l'insécurité croissante.

À Mahalla, dans la région du Delta (nord), la police a arrêté un journaliste indépendant australien, un étudiant américain et leur traductrice égyptienne, accusés d'avoir payé des Égyptiens pour manifester contre le régime, a annoncé un responsable de la sécurité.

L'armée s'est déployée à travers le pays pour assurer la sécurité, après un avertissement du CSFA prévenant qu'il ne cèderait ni aux «menaces» ni aux «pressions».

«Nous faisons face à des complots contre la nation dont le but est de saper les institutions de l'État égyptien et de faire tomber l'État lui-même pour que le chaos règne, que la destruction prévale et que les ennemis de la nation soient satisfaits», a-t-il dit.

D'abord acclamée par la population, la junte d'une vingtaine de généraux qui lui a succédé a promis de faciliter le passage à la démocratie et de rendre le pouvoir aux civils dès que possible. Mais elle est aujourd'hui accusée de chercher à préserver ses privilèges et son influence.

Certaines décisions risquent aussi de lui coûter des soutiens extérieurs. Le plus haut gradé américain, le général Martin Dempsey, a évoqué avec le maréchal Hussein Tantaoui, le chef du CSFA, les poursuites engagées en Egypte contre des ONG de défense de la démocratie.

Les liens entre Le Caire et Washington se sont tendus après l'annonce par les autorités égyptiennes du prochain jugement de 44 personnes, dont 19 Américains, pour financement illégal d'organisations non-gouvernementales en Égypte.