Les forces irakiennes poursuivent les combats pour reprendre la Vieille ville de Mossoul au groupe État islamique, un objectif stratégique mais compliqué: des milliers de civils y sont pris au piège par les djihadistes.

En s'emparant de ces quartiers, les forces gouvernementales reprendraient du même coup la mosquée al-Nouri, lieu symbolique où le chef des djihadistes Abou Bakr al-Bagdhadi a fait son unique apparition publique en juillet 2014, quelques jours après la proclamation de son «califat» sur les territoires conquis en Irak et en Syrie.

Située sur la rive occidentale du Tigre, fleuve qui coupe la ville en deux, la Vieille ville est un dédale de petites rues fortement peuplé, guère propice à l'avancée des blindés, où l'usage d'armes lourdes risque de mettre en péril la population civile.

Cet objectif s'inscrit dans le cadre de l'offensive lancée le 17 octobre par les forces irakiennes, soutenues par la coalition internationale antidjihadiste sous commandement américain, pour reprendre Mossoul, deuxième ville d'Irak et dernier grand bastion de l'EI dans ce pays.

A Washington où il a rencontré le président américain Donald Trump, le Premier ministre irakien Haider al-Abadi a estimé devant un groupe de réflexion, The Institute for Peace, que l'aide américaine aux troupes irakiennes pour reprendre Mossoul aux djihadistes «accélérerait» davantage sous l'administration Trump qu'elle ne l'aurait fait sous le gouvernement Obama.

«Je crois que cette administration veut être plus impliquée dans la lutte contre le terrorisme. Je ressens une différence dans la confrontation avec le terrorisme», a jugé M. Abadi.

Après avoir conquis fin janvier les quartiers orientaux de Mossoul, les forces irakiennes mènent depuis le 19 février une opération sur l'ouest de la ville où elles se sont emparées de plusieurs secteurs importants, comme le siège du gouvernement de la province de Ninive, dont Mossoul est le chef-lieu, et la gare ferroviaire.

Lundi, le général de brigade Mahdi Abbas Abdallah (Force d'intervention rapide) a indiqué que les forces irakiennes entendaient progresser vers l'Ouest et pénétrer de facto dans la Vieille ville, depuis le Pont de fer, situé à l'entrée de cette zone, un secteur où d'intenses combats s'étaient déroulés dimanche.

«L'offensive a repris dans la même zone qu'hier (...) constituée de grands bâtiments, de marchés et de rues étroites où l'ennemi se terre», a-t-il dit.

Ces derniers jours, des responsables irakiens avaient affirmé que plusieurs bâtiments avaient été conquis dans le premier périmètre du quartier.

Les combats dans cet environnement urbain font craindre le pire pour les civils, s'est alarmée Lise Grande, la coordinatrice humanitaire de l'ONU pour l'Irak.

«Les gens qui fuient nous disent qu'il est très difficile d'entrer ou de sortir de la Vieille ville. Les familles risquent de se faire tirer dessus si elles partent, et elles sont en danger si elles restent», a-t-elle déclaré dans un communiqué. «C'est horrible. Des centaines de milliers de civils sont piégés et en situation de terrible danger».

180 000 déplacés 

Certains habitants ont toutefois pu quitter la ville et fuir les combats qui tétanisent la population. Selon le gouvernement irakien, plus de 180 000 personnes venant de Mossoul-Ouest se trouvent actuellement hors de leur domicile.

Sur ce total, quelque 111 000 personnes ont trouvé refuge dans les 17 camps et centres d'accueil installés dans les environs de Mossoul, le reste étant souvent hébergé par des proches.

Selon l'ONU, le nombre de déplacés pourrait encore augmenter à mesure que les forces irakiennes progresseront.

«Les agences humanitaires se préparent à la possibilité que 300 000 à 320 000 civils supplémentaires puissent fuir dans les prochaines semaines», a indiqué le Bureau des Nations unies pour la coordination des Affaires humanitaires (OCHA), alors que le gouvernement irakien a indiqué pouvoir encore accueillir 100 000 personnes.

«L'opération humanitaire à Mossoul-Ouest est bien plus importante et complexe que dans (Mossoul)-Est», a expliqué Lise Grande. «La principale différence, c'est que des milliers de familles sont restées chez elle dans l'Est, alors qu'à l'Ouest, des dizaines de milliers fuient».

«La crise est en train de nous pousser jusque dans nos derniers retranchements», a-t-elle prévenu.

Avant la prise de Mossoul par l'EI en juin 2014, la population de la ville était estimée à deux millions d'habitants.

À Bagdad, l'EI a revendiqué un attentat à la voiture piégée perpétré à Hay al-Amel, un secteur commerçant fréquenté de l'ouest de la capitale irakienne. L'attaque a fait au moins 15 morts et 33 blessés.