Après avoir vécu pendant deux ans sous le joug du groupe État islamique (EI) puis survécu à l'offensive militaire lancée pour les libérer, les civils déplacés du nord de l'Irak affrontent aujourd'hui une nouvelle épreuve: le froid.

Alors que les combats font rage contre les djihadistes à Mossoul, où vivent encore environ un million de personnes, l'arrivée précoce de l'hiver et des températures au-dessous de zéro est un coup dur de plus pour les familles réfugiées dans des camps autour de la ville.

«La nuit, nous devons garder nos têtes sous les couvertures et nous mettre en boule pour nous réchauffer», explique Alya Zannoun, 56 ans, hébergée dans une tente sur le camp de Khazir, au sud-est de Mossoul, comme 6000 autres familles.

«Nous mourons de froid, nos mains sont sèches et couvertes de mycoses», se désole-t-elle en lavant des assiettes dans une eau glacée.

«On ne peut même pas déplier nos doigts tellement il fait froid, comment est-ce que les enfants vont supporter ça?», renchérit sa voisine Warda Maraebi, 71 ans.

Plus de 70 000 personnes ont fui les combats depuis le début de la bataille de Mossoul, lancée le 17 octobre par les forces irakiennes pour reprendre à l'EI son bastion irakien.

Si autorités et ONG s'attendaient à un afflux plus important de population, elles mènent malgré tout une course contre la montre pour bâtir des abris et fournir de l'aide aux déplacés.

Fatima Omar, 38 ans, a fui début novembre son village à l'est de Mossoul avec ses six enfants.

«La nuit dernière, la tente était secouée par le vent, on aurait dit qu'elle allait s'envoler», témoigne-t-elle. «Si la météo empire, tout va s'effondrer».

Enfants malades

Sous sa tente en plastique blanc trône, éteint, un chauffage d'appoint. «Ils nous ont donné un chauffage, mais sans pétrole ni électricité, comment on fait?», se plaint-elle.

Il y a encore quelques semaines, la région de Mossoul enregistrait encore des températures caniculaires, dépassant les 40 degrés.

Mais l'hiver est rude dans le nord de l'Irak. Il y neige même par endroits, notamment dans la région du Kurdistan qui accueille une grande partie des plus de trois millions de déplacés irakiens.

Bouchra Talal, 30 ans, arrivée il y a quelques jours avec ses trois filles de 8, 10 et 13 ans, se met à pleurer en évoquant les conditions de vie dans le camp.

«Je veux sortir d'ici, j'ai peur pour mes enfants à cause du froid!» gronde-t-elle dans une allée poussiéreuse du camp de Khazir,  entouré de grillages. Les déplacés, dépouillés de leur pièce d'identité à l'entrée, ne peuvent pas sortir.

«On gèle la nuit, mes filles sont tombées malades, elles ont la diarrhée, elles vomissent», s'inquiète la jeune veuve, vêtue d'un voile jaune et d'une abaya noire. L'EI a tué son mari il y a deux ans.

L'ONU affirme avoir commencé à distribuer de l'aide en prévision de l'hiver à 4,6 millions de déplacés irakiens, mais souligne ne pas avoir touché tous les fonds promis pour financer le programme.

Selon Caroline Gluck, une porte-parole du Haut commissariat aux réfugiés (HCR) de l'ONU, une distribution a été organisée la semaine dernière dans le camp de Hasancham, voisin du camp de Khazir géré lui par le gouvernement irakien.

Nous avons donné «des couvertures chaudes, des chauffages et des équipements pour isoler les tentes, afin de les aider à traverser l'hiver», dit-elle.

Ceux qui n'ont encore rien reçu souffrent déjà, alors que la saison froide vient à peine de commencer.

«Quand la pluie arrivera, je mourrai», prédit Mariam Safar, 71 ans.