Les forces irakiennes ont avancé à l'est de Mossoul après avoir lancé leur vaste offensive pour reconquérir la deuxième ville d'Irak, dernier grand fief du groupe État islamique (EI) dans ce pays.

Cette bataille qui s'annonce âpre et de longue haleine fait craindre un désastre humanitaire pour les quelque 1,5 million d'habitants vivant encore dans la deuxième ville du pays, dans le nord. L'ONU dit notamment redouter un déplacement massif de la population d'ici une semaine.

Les colonnes de véhicules blindés de l'armée irakienne sont parties lundi vers les lignes de front, a constaté un photographe de l'AFP présent au sud de Mossoul, dans la localité d'Al-Choura.

Cette bataille se préparait depuis des mois, avec le soutien d'une coalition internationale antidjihadistes composée de 60 pays selon les États-Unis, qui la dirigent.

Quelque 30 000 hommmes des forces fédérales irakiennes - armée, police, contre-terrorisme - sont impliqués. Les combats pourraient durer «des semaines voire plus», selon la coalition internationale.

L'opération a bien commencé, a estimé le Pentagone, tout en soulignant qu'il s'agissait d»une campagne difficile qui pourrait prendre du temps».

«Le premier jour s'est déroulé comme prévu», a déclaré à la presse le porte-parole du Pentagone, Peter Cooke. «Dès le milieu de la journée, les forces irakiennes avaient à peu près atteint leur objectif du jour».

Située dans le nord de l'Irak et peuplée majoritairement de musulmans sunnites, Mossoul était tombée aux mains de l'EI en juin 2014 et le leader de l'EI, Abou Bakr al-Baghdadi, avait alors proclamé un «califat» sur les territoires conquis de manière éclair par les djihadistes en Irak et en Syrie.

Même si l'EI a depuis perdu une large partie de ces territoires, il conserve une force de frappe, notamment à l'étranger, où il a revendiqué cette année des attaques meurtrières.

«Défaite durable» 

Le secrétaire américain à la Défense, Ashton Carter, a estimé que la bataille de Mossoul était «un moment décisif dans (la) campagne pour infliger à l'EI une défaite durable».

L'opération militaire devrait dans un premier temps consister à traverser les lignes djihadistes pour gagner les abords de la ville avant un encerclement puis de violents combats de rues.

Lourdement armés, les djihadistes qui seraient entre 3000 et 4500 dans la ville, selon des estimations américaines, pourraient avoir recours à des attentats à la bombe, des mines et des incendies voire des boucliers humains pour ralentir leurs ennemis.

Bagdad et plusieurs localités irakiennes ont été frappées ces derniers jours par des attentats à la bombe, certains revendiqués par l'EI, qui ont fait près de 60 morts. Le dernier en date, commis lundi au sud de Bagdad, a tué dix personnes.

M. Abadi a précisé que seules l'armée et la police entreraient dans Mossoul, alors que de nombreuses forces sont impliquées dans l'offensive.

Les sunnites, minoritaires dans un Irak majoritairement chiite, craignent l'entrée dans la ville des puissantes milices paramilitaires chiites du Hachd al-Chaabi, soutenues par l'Iran, et accusées d'exactions contre les civils sunnites dans le passé.

L'Arabie saoudite a d'ailleurs dit lundi craindre des «massacres» de la part des milices chiites si elles entrent dans les zones libérées. Son ministre des Affaires étrangères Adel al-Jubeir a exhorté le gouvernement irakien à ne pas les utiliser, au risque «d'alimenter les tensions confessionnelles faisant rage dans la région».

«Risque extrême» 

De leur côté, des milliers de combattants kurdes irakiens se sont emparés lundi de plusieurs villages tenus par les djihadistes à l'est de Mossoul dans le cadre de l'offensive.

Les Kurdes sont appuyés par des raids aériens de la coalition internationale, a constaté un correspondant de l'AFP qui les suit dans cette région, près du village de Khazir.

L'armée irakienne a largué par les airs des milliers de tracts sur Mossoul pour donner des consignes de sécurité aux habitants.

Mais «les familles sont exposées à un risque extrême d'être prises entre deux feux» ou d'être utilisées comme boucliers humains par les djihadistes, a mis en garde l'ONU.

La coordinatrice humanitaire de l'ONU pour l'Irak, Lise Grande, a déclaré que les gens n'étaient pour l'instant pas très nombreux à fuir Mossoul mais a fait état de possibles «importants mouvements de populations (...) d'ici cinq à six jours».

Mme Grande a dit que 200 000 personnes pouvaient être déplacées «dans les deux premières semaines», un chiffre qui pourrait augmenter de façon significative au fur et à mesure de l'avancée de l'offensive.

Les principaux ministres de la Défense des pays de la coalition internationale doivent se réunir le 25 octobre à Paris afin de faire le point notamment sur la bataille de Mossoul.