La France est «clairement visée» par le groupe État islamique (EI), qui pourrait mener «une campagne terroriste caractérisée par le dépôt d'engins explosifs dans des lieux où est rassemblée une foule importante», a déclaré le patron de la Direction générale de la Sécurité intérieure (DGSI).

«Nous savons que Daech (acronyme arabe de l'EI) planifie de nouvelles attaques - en utilisant des combattants sur zone, en empruntant les routes qui facilitent l'accès à notre territoire - et que la France est clairement visée», a expliqué Patrick Calvar, auditionné le 10 mai par la Commission de la défense nationale et des forces armées de l'Assemblée nationale, dont le compte-rendu a été rendu public mercredi.

«Daech se trouve dans une situation qui l'amènera à essayer de frapper le plus rapidement possible et le plus fort possible: l'organisation rencontre des difficultés militaires sur le terrain et va donc vouloir faire diversion et se venger des frappes de la coalition», a-t-il estimé.

«Si les attentats de novembre dernier ont été perpétrés par des kamikazes et par des gens armés de kalachnikov (...), nous risquons d'être confrontés à une nouvelle forme d'attaque: une campagne terroriste caractérisée par le dépôt d'engins explosifs dans des lieux où est rassemblée une foule importante, ce type d'action étant multiplié pour créer un climat de panique», a-t-il affirmé, un peu moins d'un mois avant le début de l'Euro de football en France.

Ainsi, la France est «aujourd'hui, clairement, le pays le plus menacé», tant par l'EI que par Al-Qaïda qui «veut redorer son blason» et ses déclinaisons régionales au Maghreb et dans la péninsule arabique.

Si une «stagnation des départs» vers la zone syro-irakienne est notée en raison des «bombardements (qui) ont un effet dissuasif», Patrick Calvar constate, «à l'inverse, davantage d'intentions de retour sur notre sol, mais qui sont entravées par la politique de Daech qui considère (...) les intéressés comme des traîtres à exécuter immédiatement».

Le responsable du renseignement intérieur a relevé que d'autres «filières pourraient se mettre en place» vers la Libye.

Autre problème: les 400 mineurs qui se trouvent actuellement sur zone syro-irakienne. «Les deux tiers sont partis avec leurs parents, le tiers restant étant composé d'enfants nés sur place et qui ont donc moins de quatre ans», a-t-il détaillé.

Outre les questions de «légalité» à leur retour en France, Patrick Calvar pointe «les réels problèmes de sécurité, car ces enfants sont entraînés, instrumentalisés par Daech», comme l'a montré récemment une vidéo diffusée par l'EI. «Ces enfants sont ainsi conditionnés. Ils s'entraînent aux armes à feu», a-t-il expliqué, affirmant disposer de «vidéos montrant des enfants qui exécutent des prisonniers».

Selon lui, les enquêtes menées après les attentats de mars à Bruxelles ont montré «des structures très organisées, très hiérarchisées, militarisées, composées d'individus communiquant avec leur centre de commandement». «Cette communication est permanente et aucune interception n'a été réalisée», a-t-il souligné, évoquant le chiffrage des téléphones intelligents empêchant les interceptions.

Patrick Calvar estime que l'Europe est «en grand danger» face aux «extrémismes (qui) montent partout». Ses services «s'intéressent» d'ailleurs à «l'ultra-droite qui n'attend que la confrontation».

«Cette confrontation, je pense qu'elle va avoir lieu. Encore un ou deux attentats et elle adviendra. Il nous appartient donc d'anticiper et de bloquer tous ces groupes qui voudraient, à un moment ou à un autre, déclencher des affrontements intercommunautaires», a-t-il dit.