La mort d'un Marine a contraint l'armée américaine à révéler lundi l'existence d'une base équipée notamment d'artillerie dans le nord de l'Irak, près de la ligne de front avec le groupe État islamique, illustration d'une implication militaire américaine qui s'accentue.

Le sergent Louis Cardin, 27 ans, a été tué samedi par une roquette djihadiste à Makhmour, en Irak, dans une toute récente base avancée des Marines dont l'armée américaine n'avait pas encore annoncé l'existence.

À La Havane où il effectue une visite historique, le président américain Barack Obama a salué lundi la mémoire du soldat. Sa mort «nous rappelle que des membres des forces armées américaines consacrent leurs jours à défendre notre liberté et notre sécurité».

Mais le président américain n'a pas épilogué et c'est à un porte-parole militaire américain qu'il est revenu d'expliquer l'existence «depuis deux semaines» d'une base des Marines, à moins de 20 kilomètres des lignes djihadistes dans le nord de l'Irak.

Un détachement de près de 200 Marines équipés notamment de quatre canons de 155 mm a été déployé dans ce camp baptisé «Fire Base Bell», dans un rôle de «protection» des forces irakiennes, a expliqué le porte-parole, le colonel Steve Warren.

La base doit assurer la «protection» des milliers de soldats irakiens qui sont installés à proximité pour préparer l'offensive sur Mossoul, le bastion djihadiste du nord du pays. Ces militaires irakiens sont accompagnés par plusieurs dizaines de conseillers militaires américains, qui les aident pour la planification et l'organisation de cette grosse opération.

Le colonel Warren a assuré que le Pentagone s'apprêtait de toute façon à informer le public américain de ce déploiement, expliquant que la base n'était réellement opérationnelle que depuis vendredi.

«C'est la première fois» que les États-Unis établissent une base 100% américaine, qui n'est pas hébergée sur une base irakienne, mais à côté de celle-ci, «à quelques centaines de mètres», a-t-il reconnu. 

Inflexion de l'administration américaine 

Pour l'administration Obama, le sujet est sensible. Le président qui avait promis de mettre fin aux hostilités en Irak se retrouve contraint à la fin de son mandat d'intensifier l'effort de lutte contre les djihadistes dans ce pays.

Et alors qu'il avait promis de ne pas déployer de troupes au sol, il est obligé de plus en plus d'écorner ce principe.

A l'automne, l'administration américaine a ainsi annoncé qu'elle envoyait en Irak une unité de forces spéciales, des soldats sur-entraînés à la lutte antiterroriste, pour mener des raids ponctuels contre les dirigeants de l'État islamique en Irak et en Syrie.

L'administration accepte également de plus en plus que les conseillers militaires américains qui aident les forces irakiennes se rapprochent du front, même s'ils continuent de rester à l'écart des combats.

L'inflexion de l'administration américaine a son prix: le sergent Louis Cardin est le deuxième militaire américain à trouver la mort en Irak dans le cadre de la lutte contre le groupe EI, après la mort d'un soldat des très secrets commandos Delta en octobre, également dans le nord de l'Irak.

La nouvelle position d'artillerie et le camp de l'armée irakienne voisin ont été pris pour cible à nouveau lundi matin par un petit groupe de combattants qui ont tiré à l'arme de petit calibre sans faire de blessés, a par ailleurs indiqué M. Warren: «Deux ennemis ont été tués, et le reste s'est enfui (...) Ils ne sont pas approchés assez pour faire des dommages».

L'administration américaine a décidé à l'automne dernier d'intensifier l'effort de guerre contre le groupe État islamique en Irak et en Syrie, appelant tous les pays de la coalition qu'elle dirige à en faire autant.

Elle continue d'afficher le principe du «pas de troupes sur le terrain», comptant sur les forces irakiennes et sur des groupes rebelles syriens pour reprendre les territoires conquis par les djihadistes.

Selon M. Warren, le déploiement des Marines ne change d'ailleurs pas le niveau de forces américaines en Irak, qui reste globalement à 3870 soldats.

L'administration Obama a désormais pour objectif affiché de reprendre Raqa en Syrie, et Mossoul en Irak, deux bastions du groupe État islamique.