Le groupe djihadiste État islamique (EI) a resserré l'étau mercredi autour de la ville de Deir Ezzor, dans l'est de la Syrie, où la population vit dans la terreur après la mort de dizaines de civils et l'enlèvement de centaines d'habitants.

De violents combats se poursuivaient pour la cinquième journée consécutive après un assaut d'envergure lancé samedi par l'EI sur Deir Ezzor, capitale de la province éponyme riche en pétrole à 450 km au nord-est de Damas.

L'aviation russe, en soutien aux forces du régime de Bachar al-Assad, a mené des raids contre l'EI dans la province de Deir Ezzor, a indiqué le ministère de la Défense à Moscou. L'armée russe a aussi livré depuis le 15 janvier plus de 50 tonnes d'aide humanitaire à la population de la ville éponyme.

Les djihadistes contrôlent désormais 60% de la ville, où habitent encore 200.000 personnes. Ils renforcent le siège sur les quartiers encore aux mains des forces prorégime dans le centre, l'ouest et le sud-ouest.

Selon l'ONU, environ 70% des habitants des quartiers assiégés sont des femmes et des enfants.

«Les gens ont peur, la situation est devenue très difficile», a témoigné Attiyeh, un habitant joint par téléphone. «La nourriture et les légumes sont rares et nous commençons à avoir des problèmes avec le pain».

L'EI s'est en effet emparé d'Al-Bgheliyeh, une banlieue du nord-ouest de la ville, qui en était le centre agricole.

Otages libérés 

«Si la ville tombe, ce sera un massacre», craint Attiyeh, en référence aux informations des médias officiels faisant état du meurtre par l'EI de plus de 300 civils samedi lors d'une dizaine d'attaques suicide et d'un assaut des positions gouvernementales.

L'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH) a parlé pour sa part d'au moins 85 civils et des dizaines de combattants tués pour cette seule journée.

L'attaque et les combats qui ont eu lieu depuis ont fait 120 morts dans les rangs des prorégime, dont beaucoup ont été exécutés par l'EI, a indiqué l'OSDH, qui dispose d'un vaste réseau de sources médicales et de militants sur le terrain. Elle a fait état de 70 djihadistes tués.

En outre, au moins 400 civils avaient été enlevés samedi par l'EI dans la région de Bgheliyeh. Mais 270 d'entre eux -surtout des femmes, des enfants et des personnes âgées- ont été libérés mardi après avoir été interrogés par les l'EI sur leurs éventuels liens avec le régime, selon l'ONG.

Le groupe djihadiste détient encore 130 civils, essentiellement des jeunes et des hommes adultes.

Plus de 3000 morts

«Je crains qu'il y ait des massacres si Daech (acronyme en arabe de l'EI) envahit le quartier» d'al-Joura, dans le centre-ville, a confié à l'AFP Ghaleb al-Haj Hamdoun, un étudiant de 23 ans.

Selon l'OSDH, l'EI a exécuté au moins huit soldats mercredi, dont six avaient été faits prisonniers la veille, et tué sept autres lors de combats.

Depuis un an, les djihadistes, qui contrôlent la majorité de la province, bloquent l'accès à la plus grande partie de la ville ce qui a conduit «à un important manque de nourriture, de médicaments et services de base», selon l'ONU.

«L'ONU a reçu des rapports crédibles sur l'exécution, le rapt et la détention de civils, dont des personnes qui tentaient de faire entrer clandestinement de la nourriture» dans les secteurs assiégés, a indiqué le bureau chargé de la coordination des affaires humanitaires (Ocha).

Dans une note publiée juste avant les dernières attaques, Ocha indiquait que la majorité des habitants vivaient essentiellement de pain et d'eau.

Le régime a largué des produits de première nécessité sur la ville le 11 janvier et le gouvernement russe a indiqué quelques jours plus tard avoir fait de même.

Depuis l'intervention militaire russe dans le conflit le 30 septembre 2015, 3049 personnes ont péri «dont 1015 civils, parmi lesquels 238 enfants et 137 femmes», dans les frappes russes contre les régions rebelles, selon l'OSDH.

Plus de 260 000 personnes ont été tuées en Syrie depuis le début de la guerre civile en 2011, et des millions ont dû fuir leur foyer.