L'Irak a réclamé jeudi davantage d'armes à la communauté internationale afin de combattre l'organisation Etat islamique (EI), au cours d'une réunion à Londres de la coalition mise sur pied contre ce groupe islamiste armé.

«L'Irak a besoin d'armes et la communauté internationale a la capacité de fournir les armes dont elle a besoin», a déclaré le premier ministre irakien Haïdar al-Abadi dans une conférence de presse aux côtés du secrétaire d'État américain John Kerry et de son homologue britannique Philip Hammond.

Bagdad, dont le budget dépend à plus de 90% de l'or noir, a été durement touché par la brutale chute des cours du brut, d'environ 60% depuis les débuts de l'attaque de l'EI mi-juin.

Cela a été «catastrophique» pour l'Irak, a reconnu M. Abadi devant la presse. «Nous ne voudrions pas assister à une défaite militaire en raison de problèmes budgétaires et fiscaux», a-t-il mis en garde.

Les ministres américain et britannique ont assuré qu'ils répondraient aux besoins de Bagdad, mais sans annoncer de mesure concrète pour la lutte contre l'EI.

«Nous avons très clairement entendu ce qu'il a dit», a déclaré M. Hammond, assurant, comme M. Kerry, que «cette campagne n'allait pas échouer par manque d'armes ou de munitions entre les mains des forces de sécurité irakiennes».

John Kerry a insisté sur le fait que l'EI n'était «pas simplement» un problème syrien ou irakien mais un «problème mondial», à l'issue de la réunion d'une vingtaine de pays de la coalition internationale contre l'EI qu'il coprésidait avec son homologue britannique.

Pour leur homologue français Laurent Fabius, «cette réunion marque une nouvelle étape dans la structuration de la coalition après cinq mois d'existence».

«Face à une telle menace il importe d'avoir une stratégie globale, cohérente, et un pilotage politique», a-t-il fait valoir.

John Kerry a par ailleurs avancé que «des milliers de combattants de Daech (acronyme arabe pour l'EI, Ndlr) avaient été» tués par «près de 2.000 frappes» en Syrie et en Irak.

Il a assuré que la coalition pilotée par les États-Unis avait «stoppé les avancées de l'EI en Irak, remis en cause ses ressources et sa capacité à faire venir des combattants étrangers». Mais «nous avons encore beaucoup de travail», a-t-il averti.

De son côté, l'ambassadeur américain en Irak Stuart Jones a évoqué 6.000 morts dans les rangs de l'EI, dans un entretien diffusé jeudi par la chaîne télévisée Al-Arabiya. Une source militaire américaine a confirmé que cette estimation existait.

Les membres de la coalition s'inquiètent notamment de la menace représentée par les étrangers partis rejoindre des groupes djihadistes, dont certains sont revenus en Europe, ainsi que des «cellules dormantes», à la lumière des récentes attaques à Paris.

Menace du «terrorisme atomisé»

Il y a deux semaines, trois djihadistes ont tué 17 personnes dans plusieurs actions à Paris en se revendiquant d'Al-Qaïda au Yémen et de l'EI. L'un d'entre eux s'était entraîné au Yémen. Une semaine plus tard, une opération antidjihadiste a été menée en Belgique pour déjouer un attentat imminent.

«Ces cellules dormantes sont là depuis des années», a constaté John Kerry. «Ces groupes ont depuis longtemps des projets d'attaques contre les intérêts occidentaux», a rappelé le secrétaire d'État en évoquant «Ben Laden et le 11-Septembre à New York».

«La menace la plus angoissante est celle du terrorisme atomisé car sa détection est très très compliquée», a abondé à l'AFP l'eurodéputé conservateur français Arnaud Danjean, ancien membre des services de renseignement. «Le problème avec l'État islamique est qu'il ne commandite rien mais inspire des actions.»

Un rapport de la commission du Conseil de sécurité de l'ONU publié en novembre avait chiffré à 15 000 le nombre de combattants à avoir rejoint des organisations radicales comme l'Etat islamique, en provenance de 80 pays.

Pour tarir l'afflux de djihadistes, le premier ministre britannique, David Cameron, et son homologue turc, Ahmet Davutoglu, se sont engagés dès mardi à coopérer sur le partage des listes de passagers empruntant des vols civils entre les deux pays.

La Turquie, qui partage 900 km de frontière avec la Syrie, est régulièrement accusée de traîner des pieds face à la menace djihadiste et de ne pas suffisamment contrôler ses frontières.

M. Hammond a toutefois loué «le travail fantastique de la Turquie pour intercepter les gens qui cherchent à franchir la frontière vers la Syrie».