Les États-Unis ont annoncé mercredi avoir tué «plusieurs centaines» de djihadistes à Kobané en Syrie, tout en prévenant que cette ville pourrait tomber aux mains du groupe État islamique (EI) qui, de surcroît, gagne du terrain en Irak.

De retour d'une tournée au Moyen-Orient pour renforcer la coalition internationale, son coordonnateur, le général américain à la retraite John Allen, a également concédé que l'option militaire et les frappes aériennes ne suffiraient pas pour terrasser l'EI.

Le Pentagone a fait état de la mort de «plusieurs centaines» de combattants ultra-radicaux sunnites à la faveur de bombardements aériens «à et autour de Kobané», la ville syrienne à la frontière turque que se disputent depuis un mois les forces kurdes et les ultra-radicaux sunnites.

L'armée des États-Unis y a mené 18 frappes mardi et mercredi, selon le commandement militaire américain. Au cours des 48 dernières heures, la coalition a augmenté le nombre de raids sur les positions de l'EI à Kobané, réussissant à freiner la progression des djihadistes qui avaient atteint lundi le centre-ville.

Mais «Kobané pourrait encore tomber», a mis en garde le porte-parole du Pentagone, le contre-amiral John Kirby.

De fait, mieux armés, les islamistes contrôlent environ la moitié de la ville qu'ils cherchent à isoler totalement.

D'après l'ONG Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), les combattants kurdes des Unités de protection du peuple (YPG) ont repris toutefois mercredi deux positions dans le nord de la ville.

L'ONU avait dit craindre un «massacre» à Kobané, devenue un symbole international de la résistance à l'EI.

Mais comme l'avait déjà laissé entendre le secrétaire d'État américain John Kerry, le général Allen s'est dit «très réticent à affubler du terme de "cible stratégique"» cette localité kurde de Kobané, préférant y voir une opération «humanitaire».

Après plus de deux mois de frappes en Irak et après trois semaines de bombardements en Syrie, M. Allen a d'ailleurs minimisé le résultat des opérations militaires de la coalition, affirmant que les frappes à elles seules ne produisaient «ni gagnants, ni perdants».

Et si «l'aspect militaire est important, il n'est pas suffisant» pour venir à bout de l'EI, a concédé le haut gradé américain, à la réputation plutôt belliciste à Washington.

La stratégie contre l'EI a été abordée mercredi lors d'une vidéo-conférence entre le président américain Barack Obama et des dirigeants européens, notamment le Premier ministre britannique David Cameron, le président français François Hollande et la chancelière allemande Angela Merkel.

Tout en se déclarant mardi «très inquiet» pour Kobané, M. Obama avait assuré que sa stratégie exposée le 10 septembre «fonctionnait». Le président des États-Unis avait toutefois une nouvelle fois prévenu que la bataille contre l'EI serait longue et essuierait des «revers».

L'Irak, «principale préoccupation» 

L'émissaire de M. Obama, le général Allen, a d'ailleurs exprimé son inquiétude quant au sort de l'Irak. «L'urgence en Irak est clairement en ce moment notre principale préoccupation», a-t-il admis, invoquant la «stabilisation du gouvernement» à Bagdad.

Il a reconnu qu'«évidemment, l'EI avait réalisé des avancées importantes en Irak», notamment dans la province occidentale d'Al-Anbar que les islamistes armés tentent de contrôler complètement.

L'armée irakienne, épaulée par des tribus, a cependant repoussé un assaut de l'EI contre Ramadi, chef-lieu d'Al-Anbar.

Cette province majoritairement sunnite est un objectif majeur pour les djihadistes qui veulent prendre le contrôle des zones qui lui échappent encore. Ils la contrôleraient à 85%, selon un haut responsable de la province.

L'enjeu est de taille car si la ville tombe, «la bataille se déplacera aux portes de Bagdad et Kerbala», cité sainte chiite au sud de la capitale irakienne, a prévenu un responsable local.

Avant d'arriver à Bagdad, les djihadistes devront néanmoins s'emparer d'une large bande de territoire. Ces dernières 24 heures en Irak, les États-Unis ont lancé cinq raids: l'un près du barrage de Haditha et quatre dans le centre, selon le Pentagone.

«Détermination absolue» 

Le ministère américain de la Défense a aussi finalement donné un nom - «Détermination absolue» - à sa campagne en Irak et en Syrie.

La décision fait suite à une réunion sans précédent mardi près de Washington entre les chefs militaires de 22 des pays de la coalition. Une première depuis la guerre contre l'EI, un groupe puissant fort de dizaines de milliers de combattants, dont des milliers d'Occidentaux.

La coalition souhaite une plus grande implication de la Turquie, en permettant l'utilisation de ses bases militaires. Mais Ankara rechigne à aider les Kurdes à Kobané, alors que l'armée de l'air turque a bombardé des positions en Turquie des rebelles du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK).

Par ailleurs, les responsables de la Coalition syrienne ont reconduit Ahmad Tohmé au poste de Premier ministre de l'opposition en exil. La Coalition syrienne est reconnue par plusieurs États comme la seule représentante légitime des Syriens. Mais elle est accusée par des rebelles d'être déconnectée de la réalité et d'être corrompue.