Les combattants kurdes et les forces irakiennes, appuyés par des raids américains, ont poursuivi lundi leur offensive face aux djihadistes contre lesquels le président Barack Obama a promis de «poursuivre une stratégie à long terme».

«Nous allons continuer à poursuivre une stratégie à long terme pour inverser la tendance contre l'EI (État islamique) en soutenant le nouveau gouvernement irakien», a dit le président américain lors d'une conférence de presse.

Il a également appelé le Premier ministre désigné Haïdar al-Abadi à former un «gouvernement d'union doté d'un programme national qui représente les intérêts de tous les Irakiens».

Le président s'exprimait alors que son aviation a mené plus d'une trentaine de raids en trois jours pour aider les troupes kurdes et irakiennes au sol.

Le Premier ministre britannique David Cameron a répété de son côté qu'il n'entendait pas être «embarqué dans une guerre en Irak», avec des troupes au sol, a rapporté un porte-parole de Downing Street à l'issue d'une réunion du comité d'urgence Cobra.

En revanche, «nous fournirons des armes aux forces kurdes», a poursuivi ce porte-parole.

Face aux dangers pesant sur les chrétiens et d'autres minorités menacées par l'EI, le pape François a quant à lui appelé à une action collective de l'ONU pour «stopper l'agression injuste», jugeant indirectement insuffisants les raids américains, et s'est dit «disponible» à se rendre en Irak «si nécessaire» pour apporter son soutien aux dizaines de milliers de déplacés.

L'EI, qui sème également la terreur en Syrie voisine, est aussi sous le feu de l'aviation du régime de Bachar al-Assad qui a mené des dizaines de raids contre ses positions dans le nord syrien.

La reprise dimanche du barrage de Mossoul dans le nord d'Irak est le revers le plus important infligé à l'EI depuis que ce groupe ultra-radical a lancé le 9 juin une offensive fulgurante qui lui a permis de s'emparer de larges pans de territoire face à une armée en déroute.

Après avoir repris le contrôle du barrage, les forces kurdes combattaient un «petit nombre» de djihadistes dans la localité de Tal Kayf, plus au sud-est, a indiqué un officier kurde.

«Les avions bombardent et les peshmergas (combattants kurdes) avancent», a déclaré un combattant kurde.

Des journalistes de l'AFP ont vu des colonnes de fumée se dégager d'un secteur visé après un survol d'avions de combat près du barrage situé à 50 km de Mossoul, place forte de l'EI.

Selon le Pentagone, au cours des trois derniers jours, 35 raids ont visé des positions de l'EI aux environs du barrage, détruisant 90 cibles. Ce sont les bombardements les plus massifs contre l'EI depuis le début des frappes américaines le 8 août.

«Nous connaissons leurs tactiques» 

Des équipes d'experts parcouraient de leur côté le site à la recherche d'éventuels engins explosifs laissés par l'EI, après que le porte-parole irakien pour la sécurité, le général Qassem Atta, a confirmé la reprise totale du barrage.

«Au départ, (l'EI) nous a pris par surprise avec son offensive. Mais maintenant nous connaissons leurs tactiques et ils ne peuvent plus prendre une quelconque portion du territoire», a déclaré le général peshmerga Sardar Kamal, sur le front dans la région de Baqufa, proche du barrage.

Accusé de multiples exactions --exécutions sommaires, viols et persécutions-- le groupe ultra-radical de l'EI a proclamé fin juin un califat islamique à cheval sur des territoires qu'il contrôle en Irak et en Syrie.

Début août, il a avancé en direction de la région autonome du Kurdistan, poussant les combattants kurdes d'Irak, de Syrie et de Turquie à unir leurs forces dans une rare alliance pour lui faire face.

Après un peu plus de deux mois de violences ayant plongé le pays dans la tourmente, les puissances occidentales, soulagées par le départ du très contesté Premier ministre Nouri al-Maliki, ont envoyé de l'aide humanitaire aux centaines de milliers de réfugiés ayant fui les djihadistes, ainsi que des armes aux Kurdes.

Soulèvement tribal dans l'ouest 

M. Maliki était accusé d'avoir alimenté le chaos après huit ans au pouvoir, surtout la montée en force des djihadistes, en menant une politique autoritaire excluant la minorité sunnite dans un pays majoritairement chiite.

Après le départ de ce chiite honni par les sunnites, surtout dans la province occidentale d'Al-Anbar, des puissantes tribus sunnites ont pris les armes pour aider les forces irakiennes à chasser les djihadistes de cette région, reprenant la localité d'Al-Uqda, selon la police.

Sur le plan humanitaire, un grand nombre d'Irakiens appartenant aux minorités des Yazidis, chrétienne, des Shabaks et des Turcomans, sont toujours menacés d'être tués ou enlevés par les djihadistes, selon des ONG.

Des dizaines de milliers de personnes de la minorité kurdophone des Yazidis avaient fui leur bastion de Sinjar, pris le 3 août par l'EI, se réfugiant dans les montagnes environnantes ou dans le Kurdistan. Leur situation désespérée avait déclenché un élan international pour la livraison d'aide et participé à la décision américaine de lancer des frappes.

Enfin, après le Conseil de sécurité de l'ONU, les États-Unis ont mis sur leur liste noire de «terroristes internationaux» le porte-parole de l'EI, Abou Mohamed al-Adnani, qui avait annoncé au nom de son groupe le rétablissement du califat et appelé à prendre Bagdad.