Le procès du champion paralympique Oscar Pistorius, en prison depuis octobre pour avoir abattu sa petite amie en 2013, pourrait être révisé en 2015, le ministère public sud-africain ayant fait appel mardi de sa condamnation pour homicide involontaire jugée «choquante de légèreté».

«La condamnation à cinq ans d'emprisonnement (...) est choquante de légèreté, inappropriée et n'aurait jamais été prononcée par un tribunal raisonnable», a indiqué la poursuite dans sa demande de révision communiquée à la presse.

Le champion handisport de 27 ans, sextuple médaillé d'or, a commencé à purger sa peine dans une aile médicalisée de la prison centrale de Pretoria, à l'issue de huit mois d'un procès retentissant suivi avec passion par l'opinion publique.

La poursuite souligne qu'il serait libérable sous contrôle judiciaire au bout de dix mois.

Dans son verdict le 12 septembre, la juge Thokozile Masipa avait conclu que Pistorius n'était pas coupable de meurtres, mais d'imprudence, ce qui lui a valu l'incompréhension d'une partie du monde judiciaire et une volée de critiques.

Toute la question est de savoir si l'accusé, au moment de tirer, avait conscience qu'il pouvait donner la mort. Si la réponse est «oui», alors le juge aurait dû rendre un verdict de meurtre.

Or, dans ses attendus, la juge a elle-même estimé que Pistorius «savait que les toilettes étaient un espace réduit et qu'il n'y avait aucun moyen de s'échapper pour la personne derrière la porte», semblant se contredire elle-même.

Elle a aussi admis que «l'identité de la victime n'entrait pas en ligne de compte pour établir le degré de responsabilité pénale», a rappelé le ministère public, dans sa demande de révision.

Et d'enfoncer le clou : «La condamnation est choquante et inappropriée pour un accusé qui s'est armé, avec l'intention de tirer, a marché jusqu'à la salle de bains et fait feu quatre fois en sachant qu'un être humain était derrière la porte des toilettes».

Pistorius, selon sa propre version, a réalisé qu'une balle pouvait richocher et le tuer lui-même puisqu'il se tenait à cinq mètres de la cible, a rappelé le parquet.

Jusqu'à six mois, voire davantage, peuvent désormais s'écouler jusqu'à la révision du procès qui se jouera principalement par écrit et ne nécessitera que quelques audiences.

«Le parquet doit d'abord aller voir la juge et lui demander si elle autorise l'appel. Si elle est sûre de son jugement, il n'y a pas de raison qu'elle refuse», a expliqué à l'AFP Elna Moolman, une avocate de Johannesburg.

«Cela part ensuite chez trois juges (voire cinq, NDLR) qui auront à décider sur la base des documents et de plaidoiries supplémentaires. Ils demanderont au ministère public «pourquoi dîtes-vous que la juge se trompe, venez-nous expliquer çà» et le procureur viendra s'exprimer, ainsi que la défense», a-t-elle exposé.

Double amputé et équipé de prothèses pour courir, Pistorius a toujours affirmé avoir ouvert le feu par erreur sur la porte fermée des toilettes pour neutraliser ce qu'il croyait être un cambrioleur, après avoir entendu un bruit suspect.

Plaidant non coupable, il a aussi clamé qu'il était amoureux de Reeva Steenkamp, sa victime, une mannequin de 29 ans.

Que la juge écarte la préméditation et refuse de conclure à une dispute de couple sur la base de vieux textos ou des témoignages de voisins n'ayant rien vu n'a choqué personne.

En revanche, beaucoup n'ont pas compris qu'elle dédouane Pistorius de toute intention homicide.

Un livre écrit par la mère de Reeva Steenkamp sort jeudi en Grande-Bretagne. Elle y dit pis que pendre de Pistorius, et notamment que «ça a été la malchance de Reeva de le rencontrer, parce que tôt ou tard, il allait tuer quelqu'un.»

«Elle m'avait confié qu'elle n'avait pas couché avec lui. Ils partageaient le même lit, mais elle avait peur de porter leur relation à ce niveau... Elle n'aurait pas voulu coucher avec Oscar si elle n'était pas sûre. Je pense que leur relation était en train de se terminer. Au fond de son coeur, elle ne pensait pas que celle-ci rendait l'un ou l'autre heureux», écrit-elle encore.

Un témoignage qui n'engage qu'elle et sans impact sur la révision du procès.