Belhassen Trabelsi a le mal du pays. Quinze mois après s'être réfugié à Montréal, le beau-frère de Zine el-Abidine Ben Ali, président déchu de la Tunisie, «vit dans la peur et le secret» devant la communauté tunisienne de la métropole, et aurait même évité de justesse une tentative d'assassinat.

Selon son avocat à Tunis, l'ancien milliardaire, amoindri, vivoterait grâce au soutien de quelques amis. Cette vie de misère l'insupporte au point que, dans une lettre d'excuses adressée au peuple tunisien, le «citoyen Trabelsi» affirme vouloir rentrer chez lui, prêt à faire face à la justice de son pays.

Six jours après son arrivée à Montréal, le 20 janvier 2011, un homme d'origine tunisienne aurait tenté d'obtenir un véhicule pour se rendre au Château Vaudreuil, où il avait l'intention de tuer M. Trabelsi et sa famille, selon des documents soumis par l'avocat montréalais, Norton Segal, à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (CISR).

M. Trabelsi et sa famille ont dû fuir l'hôtel en catimini. Ils ont embauché une firme de sécurité privée pour assurer leur protection.

M. Trabelsi est considéré comme le parrain d'un «clan mafieux» qui a fait main basse sur les richesses du pays. En juin, ses deux filles ont été forcées de quitter The Study, l'école privée qu'elles fréquentaient à Westmount. L'établissement craignait pour la sécurité des autres élèves.

«À peine de quoi vivre»

Très affectées par la situation, les deux enfants présentent des «symptômes de panique» en raison du battage médiatique entourant leur père, selon les documents soumis au CISR dans le but d'obtenir une audience à huis clos.

La demande a été rejetée vendredi par le CISR, qui a jugé que M. Trabelsi n'avait présenté «aucune preuve suffisante au soutien des allégations contenues dans sa demande de huis clos».

«M. Trabelsi vit très difficilement, avec le soutien de quelques amis. Il a à peine de quoi vivre», soutient Mohamed Hedi Lakhoua, son avocat tunisien, en entrevue téléphonique.

Peu après son arrivée au Canada dans un jet privé, M. Trabelsi a reçu un virement de 1,4 million de dollars d'une banque libanaise, selon des enquêteurs de la Gendarmerie royale du Canada.

Prêt à faire face à la justice

Depuis, le Canada a adopté une loi pour geler les avoirs des dirigeants corrompus. Les autorités ont saisi un compte de 122 000$ et une maison de 2,55 millions à Westmount appartenant au clan Ben Ali.

«L'exil me fait beaucoup souffrir et je voudrais revenir dans mon pays quel que soit le prix à payer et tout à fait volontairement», a écrit M. Trabelsi dans une lettre au peuple tunisien.

«Je présente mes excuses sans dérobade en assumant ma responsabilité totale», écrit-il. Il se dit «prêt à tout assumer et à faire face à la justice».

Malgré cet acte de contrition, M. Trabelsi comparaîtra lundi devant la Section d'appel de l'immigration. Il tentera de récupérer son statut de résident permanent, révoqué parce qu'il n'avait pas résidé au Canada pendant au moins deux des cinq dernières années.