Le premier ministre tunisien, Mohammed Ghannouchi, dernier chef du gouvernement du président déchu Ben Ali, a été reconduit jeudi à la tête du gouvernement de transition remanié d'où les principaux ministres qui avaient appartenu a l'équipe Ben Ali ont été écartés.

Les postes-clés de l'Intérieur, de la Défense, des Finances et des Affaires étrangères changent de main. Les affaires étrangères sont confiées a Ahmed Ounaïs, un diplomate de carrière qui a servi sous les présidences de Habib Bourguiba et du président Zine El Abidine Ben Ali avant de prendre sa retraite.

Ce gouvernement a été formé à la suite de «consultations avec tous les partis politiques et les composantes de la société civile qui ont accepté d'y participer», a déclaré M. Ghannouchi avant d'égrener la liste de son nouveau gouvernement en direct à la télévision publique.

«Sa mission sera d'organiser des élections pour que le peuple choisissse en toute liberté», a-t-il ajouté, en appelant les Tunisiens «à retourner au travail». Le «gouvernement s'engage à ce que les élections soient organisées sous le contrôle d'une commission indépendante en présence d'observateurs internationaux pour en garantir la transparence», a-t-il ajouté.

Dans la journée des milliers de Tunisiens avaient de nouveau manifesté pour exiger le départ des ministres qui avaient servi le président Zine El Abidine Ben Ali, comme M. Morjane, à l'appel de la puissante centrale syndicale UGGT. Le ministre des affaires étrangères a lui même annoncé sa démission avant l'annonce de la liste du nouveau gouvernement.

Juste avant l'annonce du remaniement ministériel, l'Union générale des travailleurs tunisiens avait également fait part de sa décision de ne pas participer au prochain gouvernement tout en acceptant que M. Ghannouchi en reste le chef bien qu'il ait été le dernier premier ministre en date de Ben Ali.

Les démonstrations quotidiennes se sont déplacées jeudi vers Sidi Bouzid, dans le centre du pays, berceau de la Révolution du Jasmin.

«Non au vol de la révolution!» ont scandé des manifestants qui ont défilé dans les rues de cette localité où l'immolation par le feu d'un jeune homme à la mi-décembre a marqué le début des émeutes qui ont balayé le régime.

La manifestation s'est déroulée sans incident sous le contrôle d'unités de l'armée déployées à la place de la police, auteur de la répression sanglante qui a précédé la fuite le 14 janvier du dictateur et de sa femme.

Par ailleurs, le chef du parti islamiste tunisien Ennahda, Rached Ghannouchi, en exil à Londres, prévoit de rentrer dimanche plus de 20 ans après avoir quitté la Tunisie, selon le porte-parole d'Ennahda à Paris.

«Il ne rentre pas en triomphant, en revendiquant une quelconque place au gouvernement, mais comme simple citoyen», a déclaré à l'AFP Houcine Jaziri, représentant en France du parti interdit sous l'ancien régime.

À Tunis, des milliers de manifestants ont poursuivi le siège des bureaux du premier ministre de transition sur l'esplanade de la Kasbah. L'armée a fait barrage à une manifestation de professeurs et d'élève du secondaire en grève qui tentaient de les rejoindre, a constaté l'AFP.

L'UGTT, qui a joué un rôle fondamental dans l'encadrement de la révolte populaire, s'est réunie jeudi et a pesé de tout son poids pour obtenir le départ de l'exécutif des sept ministres ayant servi le régime corrompu et autoritaire de l'ancien chef de l'État.

À Sidi Bouzid, où l'UGTT a appelé à une grève générale, des milliers de manifestants ont lancé: «Dégagez les pourris!».

Le cortège a marqué une autre pause face au Gouvernorat (préfecture), où Mohamed Bouzazizi, un jeune marchand de fruits, s'était immolé par le feu le 17 décembre. Des manifestants ont déployé une photo géante de leur «martyr» sur le toit du bâtiment officiel, tandis que d'autres criaient: «Allah Akbar!, (Dieu est grand), nous resterons fidèle au sang des martyrs».

En Égypte, des manifestations sans précédent depuis 30 ans, inspirées du modèle tunisien, se poursuivent pour exiger le départ du président Hosni Moubarack alors l'opposant Mohamed ElBaradei est rentré au pays pour participer à la contestation.

Au Yémen, des milliers de personnes ont manifesté jeudi à Sanaa à l'appel de l'opposition pour réclamant le départ du président Ali Abdallah Saleh, au pouvoir depuis 32 ans.