Réclamée avec insistance depuis plusieurs jours par les manifestants tunisiens, une nouvelle composition du gouvernement transitoire sera présentée mercredi par le porte-parole officiel du gouvernement Taïeb Baccouche, a annoncé mardi soir l'agence gouvernementale TAP.

Cette nouvelle composition est l'aboutissement de consultations pour pourvoir aux postes ministériels restés vacants, ajoute la TAP.

Des centaines de participants à «la caravane de la liberté» venus du centre-ouest tunisien continuaient de camper devant le palais du gouvernement, place de la Kasbah, pour réclamer le départ des anciens du parti de Ben Ali, le Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD).

Signe d'une reprise plus marquée de l'activité administrative et économique, la circulation piétonne et automobile était plus dense que les jours précédents dans la capitale.

Cafés, restaurants et autres commerces et moyens de transport en commun connaissaient une animation presque normale dans la matinée.

Dans l'après-midi, et pour la première fois depuis la mise en place de l'équipe de transition dirigée par le premier ministre Mohamed Ghannouchi, un grand rassemblement progouvernemental a eu lieu sur l'avenue Bourguiba, face au théâtre municipal de Tunis.

Plus de 2000 manifestants sont descendus sur l'artère principale de la capitale, s'en prenant en particulier au patron de la centrale syndicale, l'Union générale des travailleurs tunisiens (UGTT), Abdessalem Jrad, pointé du doigt pour être à l'origine des grèves et des entraves à la reprise de la vie normale.

«Jrad dégage, Ghannouchi courage», «Vive la démocratie, non à l'anarchie», «UGTT dégage, laissez-nous étudier et travailler», pouvait-on lire sur les pancartes brandies par les manifestants. D'autres proclamaient que «les abus de la liberté tuent la liberté», ou encore «Jrad, tu n'échapperas pas à la commission d'enquête sur ton patrimoine».

«Abdessalem Jrad était le dernier à avoir rencontré (le président déchu) Ben Ali, aujourd'hui il retourne sa veste», a accusé Chaïbi Mohamed Anis, un fonctionnaire âgé de 33 ans.

Un autre manifestant a cependant vu dans cette manifestation progouvernementale et anti-Jrad «le début d'une scission». «C'est le plus grand danger qui puisse menacer notre glorieuse révolution par des forces occultes intérieures et extérieures», a-t-il jugé, sous le couvert de l'anonymat.

À Gafsa, chef-lieu du bassin minier du centre-ouest tunisien, secoué par des troubles sociaux en 2008, il a fallu l'intervention de l'armée, qui a tiré en l'air, pour mettre fin aux accrochages opposant des groupes divergents devant le siège de l'union régionale syndicale.

Parallèlement, un haut responsable américain, en visite en Tunisie, le sous-secrétaire d'État pour le Proche-Orient Jeffrey Feltman, a salué «l'exemple tunisien pour des réformes dans les pays arabes qui répondront aux aspirations légitimes politiques, sociales et économiques des populations, surtout si elles sont revendiquées de manière légale et pacifique».

Il a plaidé pour la stabilité de la situation en Tunisie qui, selon lui, dépendra des élections attendues dans six à sept mois. «Ce sont les élections qui détermineront la crédibilité et le caractère démocratique du gouvernement», a-t-il déclaré à la presse.