Une semaine jour pour jour après la chute du régime du président Ben Ali, la Tunisie a observé un premier jour de deuil national en mémoire des victimes du soulèvement populaire - une centaine de morts selon l'ONU -, en ce vendredi de prières dans les mosquées.

L'Union générale des travailleurs tunisiens (UGTT), qui a joué un rôle crucial dans la révolte populaire entamée le mois dernier, a appelé à la dissolution du gouvernement de transition et à la formation d'un cabinet «de salut national», sans ministres de l'ancien régime, a annoncé à l'AFP un de ses responsables.

«Le comité directeur de l'UGTT s'est réuni aujourd'hui et appelle à la dissolution du gouvernement et la formation d'un nouveau gouvernement de salut national, collégial, répondant aux exigences de la rue et des partis politiques», a déclaré le secrétaire général adjoint de la centrale, Abid Briki.

De nouvelles manifestations se sont produites dans le pays pour exiger la démission du gouvernement, notamment au siège de la Primature à Tunis, d'où des fonctionnaires ont jeté par les fenêtres des portraits officiels de l'ex-président Ben Ali.

«Vous avez volé la richesse du pays mais vous n'allez pas voler la révolution! Démission du gouvernement!», ont scandé tout au long de la journée des manifestants en divers endroits de Tunis.

Des policiers ont pour la première fois réclamé la création d'un syndicat pour les représenter dans plusieurs villes, notamment Tunis où un policier acclamé par la foule a demandé «pardon» pour la répression sanglante de la «révolution du jasmin».

Confirmant un retour progressif à la normalité, le gouvernement de transition a annoncé une reprise progressive des cours dans les écoles et lycées à partir de lundi, tandis qu'ont continué les manifestations exigeant sa démission à cause de la participation de caciques de l'ancien régime.

Le ministre de l'Intérieur Ahmed Friaa a annoncé en conférence de presse qu'Imed Trabelsi, le neveu de l'épouse de Ben Ali donné pour mort la semaine dernière, était vivant et interrogé par la police. «On l'interroge et on enquête sur lui», a-t-il déclaré.

Imed Trabelsi a fait fortune dans l'immobilier et la grande distribution en association notamment avec la société française Conforama, mais ses méthodes étaient décriées par la communauté des affaires qui n'osait toutefois pas l'affronter ouvertement.

Le nom de l'ex-président a par ailleurs disparu des sermons de la prière du vendredi dans les mosquées où les imams ont prié pour la mémoire des «martyrs» de la répression du dernier mois de son régime.

Le ministère des affaires religieuses avait appelé les prédicateurs de toutes les mosquées du pays «à effectuer la prière de l'Absent après la prière du vendredi, à la mémoire des martyrs de la révolution du peuple tunisien».

Au premier jour de deuil national, les drapeaux étaient en berne sur les édifices publics et la télévision a diffusé par intermittence des versets du Coran.

La traque policière de la famille de Zine El Abidine Ben Ali et de son épouse Leïla Trabelsi se poursuit quant à elle.

De nombreuses armes ont été saisies chez un membre de la famille de Leïla Trabelsi, dans la banlieue de Tunis, selon des images diffusées vendredi par la télévision publique: fusils à lunettes de précision, pistolets, fusils de chasse, cartouches.

La chaîne publique avait annoncé la veille l'arrestation ces derniers jours de 33 membres de l'ancien clan présidentiel.

Une source à la Banque centrale tunisienne (BCT) a de nouveau démenti vendredi des informations sur le vol d'une tonne et demie d'or sur la réserve stratégique du pays par Leïla Trabelsi, en réaffirmant que la réserve était de 6,8 tonnes et inchangée depuis 20 ans, une estimation conforme à celle en décembre dernier du Conseil mondial de l'or qui regroupe à Londres les principaux producteurs de métal jaune.

«Il y a 5,3 tonnes d'or dans les coffres à Tunis et 1,5 tonne à la Banque d'Angleterre à Londres», a précisé la même source de la BCT.

Le journaliste et opposant Taoufik Ben Brik a annoncé vendredi qu'il sera candidat à l'élection présidentielle, comme l'opposant historique Moncef Marzouki.

Connu pour ses écrits dénonçant la dictature de Ben Ali, Ben Brik, 50 ans, a notamment été emprisonné six mois fin 2009-début 2010, à l'issue d'un procès qualifié de «machination politique» par les défenseurs des droits de l'homme.