L'opposant historique tunisien Moncef Marzouki a dénoncé lundi une «mascarade» après la formation d'un nouveau gouvernement en Tunisie, fustigeant une «fausse ouverture» avec le maintien de ministres du président déchu Ben Ali, dans un entretien à la télévision française I-Télé.

«La Tunisie méritait beaucoup mieux: 90 morts, quatre semaines de révolution réelle, pour aboutir à quoi ? Un gouvernement qui n'a d'union nationale que le nom, parce qu'en réalité, il est composé (de membres du) parti de la dictature, le RCD (parti de l'ex-président Zine El Abidine Ben Ali)», a déclaré l'opposant.

«Je pense que le peuple tunisien ne va pas se laisser faire par cette espèce de mascarade», a-t-il dit.

Il affirme que le RCD «conserve toutes les places importantes, dont le ministère de l'Intérieur, qui est supposé organiser les futures élections». Moncef Marzouki a annoncé dès lundi matin qu'il serait candidat à la prochaine élection présidentielle.

Il souligne en outre que ce gouvernement ne s'est ouvert qu'à trois partis d'opposition, «qui étaient déjà adoubés par la dictature de Ben Ali».

Le Parti communiste boycotte les élections

Interrogé sur la radio française Europe 1 à Tunis sur une éventuelle candidature de son parti, M. Hammami a répondu: «Non, parce que des élections dans six mois ne donneront qu'un président qui appartient au RCD», le Rassemblement constitutionnel démocratique du président déchu Zine el Abidine Ben Ali.

«D'autre part le PCOT défend un régime parlementaire et pas un régime présidentiel; c'est pour cette raison-là que nous appelons à un assemblée constituante qui définisse une nouvelle Constitution», a-t-il ajouté.

«Nous restons dans l'opposition et nous restons à côté du peuple tunisien qui continue sa lutte», a dit M. Hammami.

À propos du nouveau gouvernement, Hamma Hammami a estimé qu'il ne s'agissait que d'«un gouvernement RCD élargi à quelques représentants de quelques partis d'opposition et de quelques personnalités de la société civile, ni plus ni moins».

Ce sont «des petites réformettes qui ne répondent en rien à cette révolution populaire», a-t-il ajouté.

«Nous vivons sous le pouvoir de ce parti (le RCD) depuis plus de 50 ans et à chaque crise, il y a des manoeuvres qui emmènent à ce même résultats, le pouvoir essaie de se réformer mais une fois qu'il reprend son souffle, il revient à la répression et à la main forte», a-t-il dit.

«C'est vraiment un putsch», a renchéri son épouse, l'avocate Radia Nasraoui, à ses côtés.

«L'aspiration des Tunisiens qui ont bataillé pendant des années et de tous ceux qui ont manifesté ces dernières semaines pour exiger le départ de Ben Ali, ce n'est pas d'avoir un gouvernement où les ministères de souveraineté sont entre les mains des hommes de Ben Ali», a-t-elle ajouté.

Lundi après-midi, Mohammed Ghannouchi, dernier premier ministre du président déchu, a annoncé qu'il avait formé un gouvernement d'union nationale de 24 membres, dont trois chefs de l'opposition légale, huit ministres de l'ancien gouvernement et des représentants de la société civile.

Selon l'actuelle Constitution tunisienne, des élections doivent être organisées dans un délai de deux mois.