Vladimir Poutine s'est dit sûr du soutien de la majorité en vue de la présidentielle de dimanche malgré la vague de contestation en Russie, déclarant par ailleurs n'avoir «pas décidé» s'il resterait au pouvoir jusqu'en 2024, selon une interview diffusée vendredi.        

Dans un entretien à des médias étrangers publié sur le site du gouvernement russe, M. Poutine a été jusqu'à se féliciter de la protestation contre son régime, au dernier jour de la campagne électorale.

«Je suis, par exemple, très content que cette situation ait lieu», a-t-il dit, interrogé sur la vague de manifestations déclenchée par les fraudes présumées aux législatives de décembre.

«Cela veut dire que les autorités (...) doivent réagir avec vivacité à ce qu'il se passe dans le pays, à l'humeur des gens et répondre à leurs attentes», a-t-il poursuivi, estimant qu'il s'agissait «d'une bonne expérience pour la Russie».

Il a aussi exclu tout durcissement du régime: «Et pourquoi le ferai-je? Pourquoi ces craintes, alors que nous faisons exactement l'inverse? Nous n'avons rien prévu de tel», a-t-il dit.

M. Poutine s'est dit sûr d'avoir le soutien de la majorité des Russes, même dans les grandes villes et au sein de la classe moyenne où l'opposition est réputée la plus forte.

«Vous considérez que là-bas la majorité de la population est contre moi? Dans quels sondages? J'y ai simplement moins de partisans, mais (ces derniers) sont tout de même la majorité», a-t-il jugé.

L'homme fort de la Russie s'est efforcé ces derniers mois de diaboliser ses détracteurs, les accusant d'être à la solde des États-Unis, de préparer des fraudes électorales pour mettre en cause le pouvoir et même de vouloir assassiner l'un des leurs pour pouvoir en accuser le régime.

L'opposition dénonce ce discours et estime que le scrutin de dimanche ne peut être libre, M. Poutine ayant bénéficié dans sa campagne du soutien de tous les médias d'État et organes du pouvoir.

Plusieurs «documentaires» présentant le pays comme une forteresse assiégée et affirmant que des leaders d'opposition et défenseurs des droits de l'homme sont à la solde de gouvernements étrangers ont effectivement marqué la campagne.

Vendredi, la chaîne NTV a cependant annoncé renoncer à la diffusion le soir même d'un autre documentaire, réalisé par l'Allemand Hubert Seipel et intitulé Moi, Poutine, à la suite de plaintes selon lesquelles le film ne respectait pas «l'esprit» de la législation électorale, d'après une porte-parole de la chaîne, interrogée par l'AFP.

L'opposition prévoit par ailleurs une nouvelle manifestation dès lundi, après celles sans précédent de décembre et février.

Pour la présidentielle, Poutine sera confronté à quatre concurrents, qui se sont gardés d'attaquer frontalement le régime tandis que les critiques du pouvoir n'ont pas pu présenter de candidat.

L'ex-agent du KGB et patron du FSB, au pouvoir depuis 2000, a par ailleurs clairement laissé entendre qu'il ne songeait pas à une retraite politique, n'excluant pas d'être candidat à la présidentielle de 2018, car ce serait «normal» avec le soutien de la population.

«Je ne sais pas si je veux être assis (au pouvoir) pendant vingt et quelques années. Je n'ai pas décidé encore», a-t-il dit.

«Ce serait normal, si tout se passe bien, si ça plaît aux gens. Ce ne serait pas normal si les gens n'aiment pas, si les choses se passaient mal, si la personne s'accroche à son fauteuil et enfreint la loi», a-t-il ajouté.

Vladimir Poutine, qui ne pouvait effectuer de troisième mandat consécutif après ceux de 2000 à 2008, avait laissé la présidence à Dmitri Medvedev, un proche qui s'est effacé pour permettre le retour au Kremlin de son mentor.

Il a maintenu dans l'entretien diffusé vendredi que M. Medvedev deviendra son premier ministre en cas de victoire dimanche.

M. Poutine a expliqué s'être mis d'accord il y a longtemps avec M. Medvedev que le candidat à la présidentielle sera le plus populaire d'entre eux.