Des enquêteurs de l'ONU ont accusé vendredi les pro-Gbagbo et pro-Ouattara d'avoir commis des violations qui «pourraient constituer des crimes contre l'humanité et des crimes de guerre», demandant à ce que les auteurs soient traduits en justice.

Le 25 mars, le Conseil des droits de l'homme de l'ONU avait décidé de créer une commission d'enquête internationale indépendante sur les violations commises en Côte d'Ivoire suite aux élections de novembre 2010.

«La Commission conclut que durant la période considérée de nombreuses violations graves des droits de l'homme et du droit international humanitaire ont été commises par différents acteurs», expliquent trois enquêteurs de l'ONU dans le rapport.

«Certaines pourraient constituer des crimes contre l'humanité et des crimes de guerre», affirment-ils.

«Ces violations ont été commises par les Forces de Défense et de sécurité (FDS, pro-Gbagbo, ndlr) et leurs alliés (milices et mercenaires) puis, lors de leur contre-offensive et depuis leur contrôle du pays, par les FRCI (Forces Républicaines de Côte d'Ivoire, pro-Ouattara, ndlr)», soulignent-ils.

La commission d'enquête s'est rendue en Côte d'Ivoire du 4 au 28 mai 2011.

Outre Abidjan, elle s'est rendue dans l'ouest, le nord et le sud du pays et a visité en particulier les villes de Duekoué, Guiglo, Korogho, Odienné et San Pedro.

La commission d'enquête s'est aussi rendue au Liberia où elle s'est entretenue avec des réfugiés ivoiriens, des membres du gouvernement et des représentants de l'ONU.

En Côte d'Ivoire, la commission a constaté que des «crimes graves tels les meurtres et viols» ont eu lieu lors d'«attaques généralisées et systématiques contre des populations ciblées sur la base de leurs sympathies politiques supposées ou de leur appartenance ethnique».

Le rapport relève en particulier les attaques des FDS avec des miliciens et mercenaires alliés contre les populations de quartiers d'Abobo et de Yopougon à Abidjan, ainsi que des «attaques et exactions par les FRCI et leurs alliés contre les populations d'origine Guéré».

Les incidents les plus graves ont été commis à Abidjan et dans l'ouest, notamment le long de la route entre Duekoué et Toulepleu, San Pedro, ainsi que le triangle Divo-Lakota-Gagnoa, selon les enquêteurs qui accusent des acteurs «de tous bords».

Sur la base des informations recueillies lors de ses visites sur le terrain et des recoupements que la Commission a pu effectuer, elle estime que «quelque 3.000 personnes ont pu être tuées».

Malgré une normalisation de la situation, les violences continuent. «Les nombreuses victimes, essentiellement dans les régions de l'ouest, du sud-ouest et d'Abidjan continuent de payer un lourd tribut», écrit la commission.

Et de prévenir: «une réconciliation sans justice ne saurait être durable».

Elle recommande ainsi au gouvernement ivoirien de veiller à ce que les auteurs des violations des droits de l'homme soient traduits en justice.

Elle demande aussi à l'ONU d'établir «un mécanisme indépendant sur la situation des droits de l'homme en Côte d'Ivoire qui devra lui faire rapport régulièrement».

Le rapport sera discuté au Conseil le 15 juin, alors que la violence se poursuit en Côte d'Ivoire.

Alassane Ouattara, investi fin mai président de la Côte d'Ivoire, a affirmé que l'ex-chef d'État Laurent Gbagbo doit être jugé par la justice ivoirienne et par la Cour pénale internationale (CPI).

L'ancien chef de l'État a été arrêté le 11 avril à l'issue d'une offensive des FRCI, soutenues par l'ONU et la France, après plus de quatre mois d'une crise née de son refus de céder le pouvoir après sa défaite au scrutin de novembre 2010.