L'ex-chef d'État ivoirien Laurent Gbagbo, arrêté lundi, est assigné à résidence, a annoncé mardi soir le gouvernement du président Alassane Ouattara, sans préciser le lieu.

«Le 11 avril 2011, dans le cadre des opérations de sécurisation de la ville d'Abidjan, des combats ont opposé les Forces républicaines de Côte d'Ivoire (FRCI) à la faction des Forces de défense et de sécurité (FDS) pro-Gbagbo, assistée des mercenaires libériens et angolais ainsi que des miliciens», indique le ministre de la Justice Jeannot Ahoussou-Kouadio dans un communiqué.

«Suite à ces opérations, Monsieur Laurent Gbagbo a été appréhendé par les militaires des Forces républicaines de Côte d'Ivoire et mis à la disposition des autorités gouvernementales», poursuit-il.

«En attendant l'ouverture d'une enquête judiciaire, Monsieur Laurent Gbagbo et certains de ses compagnons font l'objet d'une mesure d'assignation à résidence», conclut-il.

Le gouvernement ne précise pas en quel lieu l'ex-président est détenu, ni quels sont les «compagnons» visés aussi par cette mesure.

M. Gbagbo avait été arrêté lundi par les forces pro-Ouattara aidées de l'ONU et de la France, et conduit, avec son épouse notamment, à l'Hôtel du Golf, QG de son rival Ouattara.

Il est toujours dans cet hôtel et n'a pas été transporté hors de la ville, a indiqué l'ONU, démentant de premières informations d'un porte-parole.

Un «coup d'État»

Le parti de Laurent Gbagbo a dénoncé mardi «un coup d'État perpétré par l'armée française» au lendemain de l'arrestation de l'ex-président ivoirien, et a appelé le nouveau pouvoir d'Alassane Ouattara à renoncer à «toute chasse aux sorcières».

«Nous réaffirmons que c'est un coup d'État perpétré par l'armée française», a déclaré à l'AFP Pascal Affi N'Guessan, chef du Front populaire ivoirien (FPI).

«Nous condamnons cette opération qui vise à installer par la force M. Ouattara et qui ne règle aucun problème, ni celui de la légitimité, ni celui de la légalité constitutionnelle», a-il poursuivi.

«Le pays est coupé en deux, on ne peut pas contraindre par la force les partisans de Laurent Gbagbo à soutenir M. Ouattara», a insisté M. Affi.

«Nous demandons la mise en liberté de M. Laurent Gbagbo et l'ouverture de négociations en vue de réunir les conditions de l'apaisement et jeter les bases de la réconciliation nationale et de la stabilité du pays, ce qui passe par la renonciation à toute chasse aux sorcières et par la prise de mesures en vue d'assurer la sécurité physique et juridique de M. Laurent Gbagbo, sa famille et ses partisans», a-t-il dit.

M. Gbagbo a été arrêté lundi par les forces pro-Ouattara aidées par l'ONU et la France, qui a cependant démenti toute intervention directe.

Un sénateur américain accuse la France de néo-colonialisme

Le sénateur américain James Inhofe a accusé mardi la France de mener une politique néo-colonialiste en Côte d'Ivoire et a demandé au département d'État que l'exil soit accordé à Laurent Gbagbo dans un «endroit où il ne soit pas assassiné».

«Je renouvelle mon appel pour une audition devant la commission des Affaires étrangères, sur les bombardements et les massacres par les Nations unies, la France et les rebelles de Ouatarra», a déclaré M. Inhofe devant le Sénat.

Le sénateur républicain, un proche du président sortant Laurent Gbagbo et de son épouse Simone, arrêtés lundi à Abidjan, en était à son cinquième discours devant le Sénat sur la Côte d'Ivoire en une semaine pour dénoncer l'action de la France et des Nations unies à Abidjan.

«J'ai averti les Nations unies et les Français quatre fois la semaine passée qu'ils auraient du sang sur les mains s'ils continuaient à soutenir les forces rebelles d'Alassane Ouatarra», a-t-il dit en montrant des agrandissements de photos de personnes qui auraient été tuées par les rebelles à Duékoué.

«Gbagbo n'est pas le problème, le problème, c'est le retour à l'impérialisme colonial français», a-t-il dit.

Par ailleurs, le sénateur a affirmé que des brutalités auraient été commises contre le couple Gbagbo lors de son arrestation.

Il demande au département d'État que l'exil soit accordé à M. Gbagbo dans un «endroit où il ne soit pas assassiné», a dit le sénateur à l'AFP, avant de préciser que celui-ci ne devait pas être jugé car cela signifierait pour lui «la prison à vie».

«J'aime les Français», a dit le sénateur à l'AFP, mais «ils ont complètement tort en ce qui concerne leur politique en Afrique subsaharienne».

De son côté, le président des États-Unis Barack Obama a appelé mardi Alassane Ouattara pour le féliciter de sa prise de fonctions «en tant que président démocratiquement élu de Côte d'Ivoire» et l'assurer de son soutien, a annoncé la Maison-Blanche.