Le Conseil de sécurité de l'ONU a prolongé lundi de six mois le mandat de sa force en Côte d'Ivoire, au risque d'une confrontation «dangereuse» avec les forces du régime de Laurent Gbagbo qui avait exigé son départ.

Appelé encore une fois à partir par la communauté internationale qui reconnaît comme président légitime son rival Alassane Ouattara, le dirigeant sortant a vu son isolement accru avec l'imposition de sanctions par l'Union européenne contre lui-même et 18 autres personnes, dont son épouse Simone.

Outre la prolongation de son mandat, le Conseil de sécurité de l'ONU «envisage» d'envoyer des renforts pour sa mission en Côte d'Ivoire, l'ONUCI.

Mais Alain Le Roy, chef des opérations de maintien de la paix des Nations unies, a estimé que l'Onuci risquait une confrontation «dangereuse» avec les forces de Gbagbo, qui ont selon lui recours à «quelques dizaines» de «mercenaires».

Le patron de la mission dans le pays, Choi Young-Jin, a dénoncé l'accroissement des «actes hostiles» commis ces derniers jours «par le camp du président Gbagbo à l'endroit de la communauté internationale, y compris le corps diplomatique».

Il a affirmé que depuis samedi, le camp Gbagbo avait, surtout la nuit, «commencé à envoyer des jeunes gens armés aux domiciles des personnels des Nations unies» pour «demander la date de leur départ ou (...) pour y effectuer des fouilles sous prétexte de chercher des armes».

Dans sa résolution, le Conseil de sécurité réaffirme qu'il est prêt à imposer de nouvelles «sanctions ciblées» et avertit que ceux qui seront tenus pour responsables d'attaques contre civils et Casques bleus seront traduits en justice.

Gbagbo avait exigé samedi le départ «immédiat» de la force - 8650 personnes, dont 7200 Casques bleus et 1250 policiers - dont le mandat expirait le 31 décembre.

L'Union européenne a aussi renforcé sa pression en décidant lundi d'interdire de voyage sur son territoire Gbagbo et 18 de ses proches, parmi lesquels certains de ses plus hauts responsables politiques et de la sécurité.

Les États-Unis se sont dits prêts à imposer aussi des sanctions «dans les prochains jours», jugeant qu'«il était temps pour (Gbagbo) de partir».

La Communauté économique des États d'Afrique de l'Ouest (Cédéao) lui a demandé de quitter le pouvoir «dans la dignité et sans plus attendre».

S'exprimant pour la première fois publiquement depuis l'éclatement de la crise, l'ancien président Henri Konan Bédié a lui aussi exhorté Gbagbo à céder la place «en digne fils d'Afrique» et demandé l'«allégeance» de l'armée à son allié Ouattara.

«Aucune ambition politique ne peut s'accommoder de sacrifices inconsidérés de vies humaines», a-t-il lancé.

La Haut commissaire aux droits de l'homme de l'ONU, Navi Pillay a affirmé dimanche que les violences des derniers jours dans le pays avaient fait «plus de 50 morts».

Elle a dénoncé des «violations massives des droits de l'Homme», évoquant en particulier des enlèvements commis de nuit par des «individus armés non identifiés en tenue militaire», accompagnés par des soldats et miliciens fidèles à Gbagbo.

Le ministre de l'Intérieur de ce dernier, Emile Guiriéoulou, a rejeté les accusations d'un «rapport partisan». Il a fait état de «25 personnes» décédées, dont «14 éléments des Forces de défense et de sécurité (FDS)» loyales à Gbagbo.

L'ex-rébellion des Forces nouvelles (FN), alliée à Ouattara qui est toujours retranché au Golf hôtel d'Abidjan, avait appelé l'ONU à «corser» le mandat de sa force face aux violences.

La crainte d'attaques contre l'ONUCI est renforcée par les appels à combattre pour «la dignité et la souveraineté de la Côte d'Ivoire» lancés actuellement dans les quartiers d'Abidjan par Charles Blé Goudé, leader des «jeunes patriotes» pro-Gbagbo.

Devenu ministre de la Jeunesse de son mentor, Blé Goudé a été le fer de lance des violentes manifestations anti-françaises de 2003 et 2004.