La passation de pouvoirs prévue aujourd'hui entre Nicolas Sarkozy et son successeur, François Hollande, pourrait avoir des conséquences importantes sur le plan judiciaire pour le président sortant.

Le politicien de 57 ans, qui perdra son immunité de fonction un mois jour pour jour après les cérémonies, risque en effet d'être convoqué par la justice en lien avec une série d'affaires qui ont marqué son mandat.

Les médias français relèvent que l'affaire Bettencourt, du nom de l'héritière de L'Oréal, semble être celle sur laquelle il sera appelé le plus rapidement à s'expliquer.

L'un des juges d'instruction responsables du dossier, Jean-Michel Gentil, soupçonne Nicolas Sarkozy d'avoir fait financer illégalement une partie de sa campagne de 2007 par la riche famille.

Le magistrat s'intéresse notamment à deux remises en espèces de 400 000 euros réalisées au printemps de cette année-là par l'ancien gestionnaire de fortune de Liliane Bettencourt, Patrick de Maistre, à l'ex-ministre Éric Woerth alors qu'il agissait à titre de trésorier de la campagne du futur président.

De Maistre, qui nie toute malversation, a été placé en détention provisoire il y a plus d'un mois par le magistrat. Éric Woerth a été mis en examen pour financement politique illégal.

Le président sortant pourrait aussi être appelé à témoigner dans l'affaire des fadettes, un autre volet de l'affaire Bettencourt. Le directeur central du renseignement antérieur, Bernard Squarcini, et le juge d'instruction Philippe Nanterre ont été mis en examen pour avoir voulu identifier à partir de listes d'appels normalement protégées les sources de journalistes du Monde enquêtant dans ce dossier.

Pakistan, Arabie et Kadhafi

L'affaire Karachi est une autre source d'ennui potentielle. Les juges responsables soupçonnent que des «rétrocommissions» découlant de la vente de matériel militaire au Pakistan et à l'Arabie saoudite ont servi à financer la campagne présidentielle d'Édouard Balladur en 1995.

Nicolas Sarkozy, qui était alors ministre du Budget et porte-parole de la campagne du candidat, se voit notamment reprocher d'avoir participé à la mise sur pied de sociétés-écrans par lesquelles auraient circulé les commissions. Deux amis de longue date du politicien ont été mis en examen dans cette affaire.

Le dossier libyen pourrait aussi rebondir. Durant la campagne, le site d'enquête Mediapart a croisé le fer avec le président après avoir diffusé un document indiquant que le dirigeant libyen Mouammar Kadhafi avait accepté de lui fournir 50 millions d'euros pour la campagne de 2007.

Nicolas Sarkozy a porté plainte contre les journalistes pour usage de faux, arguant que le document était fabriqué et visait à l'embarrasser politiquement.

L'ex-candidate socialiste Ségolène Royal avait attaqué le chef d'État durant la campagne électorale sur les affaires politico-judiciaires en cours, en soutenant qu'il avait «peur parce qu'il va perdre son immunité judiciaire».

«Regardez ce qui est arrivé à Jacques Chirac. Les emplois fictifs, c'était bien moins grave, il a fallu attendre qu'il ne soit plus président pour que la justice puisse faire son travail», avait-elle déclaré en faisant référence au prédécesseur du président sortant, condamné à deux ans de prison avec sursis à la fin de 2011. Le camp de Nicolas Sarkozy avait vigoureusement dénoncé ces attaques. Il estimait qu'elles étaient «abjectes» et «indignes d'une campagne présidentielle».