Les favoris de la présidentielle en France, le socialiste François Hollande largement en tête et le président sortant Nicolas Sarkozy, jetaient vendredi leurs forces dans la dernière journée de campagne pour convaincre les électeurs de voter utile avant le premier tour dimanche.

Vendredi à minuit (18h, heure de Montréal), il leur sera interdit de s'exprimer. D'ici là, ils occupent le terrain jusqu'à la dernière minute. Presse, radio, télévision, rassemblements: ils multiplient interviews et interventions publiques.

Pour les instituts de sondage, tout semble joué.

Cinq enquêtes publiées depuis jeudi soir donnent François Hollande grand gagnant du second tour le 6 mai avec plus de 10 points d'avance face à Nicolas Sarkozy (jusqu'à 57 % des voix contre 43 % selon CSA et BVA).

Au premier tour, le socialiste est donné largement en tête par quatre sondages (jusqu'à 30 % des suffrages selon BVA), à égalité avec le sortant selon un cinquième.

«François Hollande devant Nicolas Sarkozy: avec les marges d'erreur, avec de la porosité, de l'incertitude, c'est la tendance que nous relevons depuis plusieurs jours», a commenté Brice Teinturier (institut Ipsos). Le socialiste «reste relativement stable» tandis que pour le président-candidat «ça s'érode», a-t-il ajouté.

À J-2, les candidats retiennent leur souffle et maintiennent leur ligne en appelant abstentionnistes et indécis (qui chacun représenteraient un quart des électeurs) à se mobiliser et à voter utile dès dimanche.

François Hollande, qui un an après avoir entamé son long chemin vers l'Élysée sent la victoire à portée de main, reste prudent.

«Je dis: ne croyez pas qu'il y ait là une élection qui soit jouée», a-t-il lancé vendredi à la radio Europe 1.

Même s'il semble peu douter de «ce mouvement qui veut donner à la gauche la responsabilité du pays», il a la veille, lors d'un rassemblement dans le sud-ouest, donné son ultime mot d'ordre: «L'enjeu de dimanche c'est de placer au plus haut le candidat du changement», c'est de «rendre la victoire irrésistible, irréversible».

Nicolas Sarkozy, triomphalement élu en 2007 avant de devenir le président le plus impopulaire, continue lui de se montrer combatif.

«Mon état d'esprit est celui d'une grande détermination», a-t-il déclaré au quotidien Le Figaro. «Et je ne doute pas des surprises (que le premier tour) nous réservera».

Le chef de l'État, qui pâtit de son image de «président des riches» n'ayant pas su habiter sa fonction, a fait un dernier mea culpa sur son style.

«Peut-être que l'erreur que j'ai commise au début de mon mandat, c'est de ne pas comprendre la dimension symbolique du rôle du président et de ne pas mettre assez de solennité», a-t-il reconnu sur la radio RTL.

Il a de nouveau agité le spectre d'une tempête économique en France en cas de victoire de la gauche. «L'Europe est convalescente, c'est une réalité et nous n'avons pas le droit à l'erreur», a-t-il mis en garde.

Les deux hommes devaient tenir leurs derniers rassemblements électoraux, dans le nord-est pour François Hollande, dans la ville de Nice (sud-est) acquise à la droite pour Nicolas Sarkozy.

Les candidats qui se battent pour la troisième place appelaient de leur côté les électeurs à ne pas céder à la bipolarisation entre les deux favoris.

Selon la plupart des sondages, la dirigeante de l'extrême droite Marine Le Pen est remontée à cette place avec environ 16 % d'intentions de vote, devant le leader de la gauche radicale Jean-Luc Mélenchon.

Alors que le président-candidat tente de lui grappiller des voix, Mme Le Pen a prévenu que «voter pour Nicolas Sarkozy, c'est voter pour quelqu'un qui est déjà parti».

Révélation de la campagne, Jean-Luc Mélenchon (crédité d'environ 13 % des voix) a de son côté appelé les indécis au «vote utile» pour permettre à la gauche radicale de «passer devant l'extrême droite».

Quant au centriste François Bayrou, qui en 2007 avait été le troisième homme avant de prendre cette année la cinquième place selon les sondages, il a dénoncé «les démagogues» et «le clivage droite-gauche».

Une dernière question restait ouverte: à l'heure de l'internet, les médias et réseaux sociaux vont-ils donner les estimations dimanche avant la clôture du scrutin à 20h (14h, heure de Montréal) ? Certains se sont dits prêts. Les autorités ont menacé de poursuites.