Terrain, argent, armes, poulet congelé ou vêtements: l'achat des voix bat son plein en Irak et tous les moyens sont bons pour glaner les votes des électeurs aux législatives irakiennes du 7 mars.

Comme la majorité des transactions financières s'effectuent en liquide et qu'il n'existe aucune loi sur le financement des partis, de telles pratiques sont courantes et font partie du jeu électoral.

«Un des candidats de la liste du premier ministre Nouri al-Maliki a offert des pistolets et de l'argent à des chefs de tribus», affirme Mohammed Ali, un athlète de Nassiriyah, une ville chiite située à 350 km au sud de Bagdad.

«D'autres candidats nous ont proposé des survêtements pour notre équipe, mais nous leur avons répondu que cela ne signifie pas que nous voterons pour eux», poursuit-il.

M. Maliki, qui dirige l'Alliance de l'État de droit, a pris la défense de cette pratique et proclamé qu'il allait offrir des armes à tous ceux dont l'acte héroïque a préservé la sécurité du pays.

L'intervention du Grand Ayatollah Ali Sistani, la plus haute autorité religieuse chiite, qui a interdit de telles pratiques et demandé l'observation de la stricte neutralité entre les partis chiites en compétition n'a eu aucun effet dissuasif.

Dans la province de Diyala, où la branche irakienne d'Al-Qaeda est active, il ne s'agissait pas de pistolets mais de petits cadeaux.

Ahmed Adnane, un étudiant de 23 ans, a raconté que des habitants de son quartier avaient reçu des poulets congelés de candidats du Parti islamique, un groupe sunnite qui a fait jurer les bénéficiaires sur le Coran de ne donner leur voix qu'à cette liste.

La liste du Bloc irakien de l'ancien premier ministre Iyad Allawi, a de solides soutiens sunnites à Diyala. «Un de leurs candidats avait offert 100.000 dinars irakiens (85 dollars) pour obtenir nos voix mais nous avons refusé», indique Fatima Zuhair, 27 ans.

«J'ai reçu de la nourriture du Bloc irakien mais je ne voterai pas pour eux. Ils viennent seulement quand il ont besoin de nous», assure Karim Saad, un chauffeur de taxi de 37 ans.

La quête d'un siège au Parlement, où le salaire de base d'un député s'élève à 100.000 dollars par an, a poussé certains des 6.200 candidats à avoir recours aux grands moyens.

Gaylan Sadiq, un candidat indépendant de Zayouna, un quartier de l'est de Bagdad, a pris en charge de repeindre vingt appartements du quartier où il habite, en y affichant son poster.

«Nous travaillons pour vous servir et nous allons continuer à le faire», écrit-il.

 Dans le nord du pays, où une bataille oppose les deux partis traditionnels  l'Union patriotique du kurdistan (UPK) du président Jalal Talabani et le parti démocratique du kurdistan (PDK) de Massoud Barzani à une formation dissidente Goran (changement), toute forme d'aide est la bienvenue quelle que soit sa nature.

«Ce que j'ai reçu de mieux, c'est de l'essence gratuite», affirme Aras Karim, un chauffeur de 34 ans qui réside à Souleimaniyeh, fief de l'UPK, tout en affirmant ne pas encore avoir fait son choix.

Karim Mohammed, un ancien pechmerga (combattant kurde) basé également à Souleimaniyeh, raconte avoir récemment demandé à son supérieur de l'UPK un terrain mais avoir essuyé un refus.

«Deux jours plus tard, il a répondu positivement à ma demande à condition que je lui garantisse le vote de ma famille. Mais j'ai refusé car je milite pour Goran», explique-t-il.