L'annonce des résultats définitifs des élections présidentielle et législatives en Haïti prévue lundi a été reportée samedi, une nouvelle fois, à mercredi, repoussant d'autant le sacre annoncé de l'ex-chanteur populaire Michel Martelly à la tête de l'État caribéen.

«Compte tenu du nombre élevé de contestations à traiter, le Conseil électoral provisoire est amené à reporter au mercredi 20 avril 2011 la proclamation des résultats définitifs», a indiqué le Conseil électoral provisoire haïtien (CEP).

Initialement prévue samedi, l'annonce des résultats avait été une première fois reportée à lundi.

Selon les résultats préliminaires des élections publiés le 4 avril, Michel Martelly, dit «Sweet Micky», a remporté la présidentielle avec 67,57% des suffrages, loin devant sa rivale Mirlande Manigat (31,74%).

La victoire de M. Martelly n'est pas contestée par Mme Manigat, qui a toutefois dénoncé un «hold-up politique».

Les législatives ont en revanche donné lieu à de nombreuses contestations dans plusieurs régions où des partisans de candidats manifestent chaque jour pour réclamer la victoire.

Vendredi, le président sortant René Préval a reçu dans sa résidence privée, dans les hauteurs de Port-au-Prince, Michel Martelly pour le premier entretien entre les deux hommes depuis le lancement du processus électoral.

Rien n'a filtré de la rencontre, mais un proche du président élu a confié à l'AFP que la formation des équipes de transition pour préparer la passation du pouvoir était en cours.

Arrivé troisième du premier tour du 28 novembre, M. Martelly a pu affronter le 20 mars Mirlande Manigat grâce à l'éviction du candidat du pouvoir Jude Célestin. La qualification de ce dernier avait été en effet accompagnée de fraudes électorales, qui avaient déclenché une vague de violences.

La véritable surprise des résultats définitifs qui seront annoncés mercredi résidera dans l'ampleur des fraudes, mais surtout dans la composition du Parlement, alors qu'une source onusienne a indiqué que «les législatives sont très serrées».

«Les résultats peuvent avoir pour conséquence une majorité d'Inité (le parti du président sortant) au Parlement, ce qui compliquerait le choix de M. Martelly pour son Premier ministre et ses ministres stratégiques», observe Jean-Robert Simonise, professeur au Centre d'études diplomatiques et internationales de Port-au-Prince.

«Des informations laissent croire que cela va être le cas», note le politologue.

Parmi les noms qui circulent, celui du Premier ministre Jean-Max Bellerive revient régulièrement. Une telle éventualité, soulignent les observateurs, assurerait une continuité dans la reconstruction du pays, frappé par un séisme dévastateur le 12 janvier 2010.

Quoi qu'il en soit, ce choix pose à l'ex-chanteur, plébiscité entre autres car ne sortant pas de l'establishment haïtien, son premier défi présidentiel.

«Les promesses de rupture avec le passé, de changement et d'obligation de résultats ne constitueront-ils pas un handicap pour Michel Martelly dans le choix du tout nouveau Premier ministre?», soulignait mercredi le quotidien de Port-au-Prince Le Nouvelliste.

Si M. Martelly fait face à un parlement dominé par Inité, il pourrait être gêné dans la rupture promise, pense M. Simonise: «la population attend la lumière sur les dépenses des fonds d'urgences (après le séisme, ndlr), entourées d'opacité, et certains ne veulent pas que de nouveaux arrivants s'y intéressent».

La transition doit s'achever au plus tard le 14 mai. M. Martelly s'installera alors dans des tentes jouxtant le palais présidentiel en ruines, face à un immense camp où des milliers d'Haïtiens s'entassent depuis le séisme.