Fermeture de Guantanamo, procès du 11-Septembre: la victoire des républicains aux élections américaines mardi annonce le retour sur la scène politique de la guerre contre le terrorisme de George W. Bush, dont Barack Obama avait tenté de modérer les effets.

«L'objectif affiché de Barack Obama de fermer Guantanamo, qui progresse déjà avec lenteur, va être encore plus difficile à remplir», explique à l'AFP Jonathan Hafetz, qui a défendu plusieurs détenus de la prison américaine située sur l'île de Cuba.

De même, le procès du cerveau auto-proclamé des attentats du 11-Septembre, Khaled Cheikh Mohammed, a de plus en plus de chances de se tenir, à Guantanamo, devant un tribunal militaire d'exception plutôt que devant un tribunal de droit commun à New York, relèvent plusieurs observateurs interrogés par l'AFP.

«Autant dire que Guantanamo va rester ouvert jusqu'à la fin du mandat du président Obama et peut-être pendant une bonne partie de son second mandat - si second mandat il y a», ajoute Julian Ku, professeur à l'université d'Hofstra. Il ajoute: «les procès devant les tribunaux d'exception vont se poursuivre et il y aura moins de procès devant des tribunaux de droit commun».

Ces deux points, pour être les plus visibles, ne sont pas les seuls à inquiéter les défenseurs des droits de l'homme qui avaient misé tous leurs espoirs sur Barack Obama pour effacer les excès de l'administration Bush dans sa «guerre contre le terrorisme».

Les tirs de drones ciblés contre des suspects d'Al-Qaïda, le droit de garder enfermés des suspects de terrorisme indéfiniment sans procès ou la défense jalouse, devant les tribunaux, des prérogatives présidentielles sur la marche à suivre dans la lutte contre le terrorisme en sont autant d'exemples.

«Ce n'est pas que la 'guerre contre le terrorisme' va faire son retour puisqu'elle n'est jamais vraiment partie, même si l'administration Obama l'a nuancée et épurée», analyse pour l'AFP Matthew Waxman, professeur de droit à Columbia.

«L'administration Obama n'a pas seulement épousé le principe des tirs de drone ciblés sur des suspects d'Al-Qaïda, elle a vanté l'efficacité de ce programme», rappelle le spécialiste.

Le risque, reprend Jonathan Hafetz, c'est que le transfert de majorité «donne une nouvelle impulsion à l'activité législative pour restreindre les principes élémentaires d'équité et limiter le contrôle sur le pouvoir du président» en matière d'anti-terrorisme.

Il exprime également ses inquiétudes sur le fait que les républicains pourraient éteindre toute velléité de placer des garde-fous au principe de la détention illimitée sans procès que Barack Obama a repris à son prédécesseur.

«Nous avons vu, notamment de la part de certains républicains un ralliement à l'idée que les suspects de terrorisme doivent être traités comme des criminels de guerre et non comme des criminels de droit commun, on peut supposer que la question va être reposée», confirme Andrea Prasow, de l'organisation Human Rights Watch.

Bien que présentée comme une priorité pendant la campagne, l'impossible fermeture de Guantanamo, ordonnée par le président américain au lendemain de son arrivée à la Maison-Blanche, illustre depuis deux ans l'ultra sensibilité des élus américains sur les questions d'anti-terrorisme depuis le 11-Septembre.

Malgré une écrasante majorité démocrate, le Sénat et la Chambre ont en effet placé sur le chemin de M. Obama tous les obstacles possibles pour contrer la fermeture de Guantanamo, laissant 174 hommes encore enfermés aujourd'hui dont une petite moitié, blanchie, attend toujours sa libération.