Des unités militaires ont été déployées vendredi soir à Siliana, dans le centre de la Tunisie, théâtre depuis quatre jours d'affrontements violents entre les forces de l'ordre et les manifestants, a indiqué une source proche du parti au pouvoir.

Selon cette même source, qui s'exprimait sous le couvert de l'anonymat, l'armée doit remplacer les forces de police accusées d'avoir eu des réactions brutales lors des manifestations des derniers jours à Siliana.

D'après un témoin contacté par l'Associated Press, une dizaine de véhicules transportant des soldats sont entrés dans la ville en début de soirée, sous les acclamations de la population.

Les heurts entre les manifestants et la police ont fait quelque 300 blessés en quatre jours, dont une vingtaine de personnes blessées aux yeux par des balles à billes. L'usage de ces cartouches pour la première fois en Tunisie a suscité l'émoi dans les milieux politiques et au sein de la société civile.

Les manifestants de Siliana réclament le départ du gouverneur de la région, Ahmed Zine Mahjoubi, membre du parti islamiste Ennahda au pouvoir. Les résidants de la ville l'accusent de ne pas écouter leurs revendications et de refuser le dialogue. Ils demandent au gouvernement de soutenir le développement de leur région déshéritée et réclament la libération de 14 personnes détenues depuis 20 mois sans avoir été jugées.

Siliana ressemblait à une ville fantôme vendredi, a constaté un journaliste de l'Associated Press qui s'est rendu sur place durant la journée. Routes coupées, pneus en flammes, rues jonchées de pierres et d'autres débris témoignaient encore des violents affrontements ayant opposé depuis mardi les manifestants aux forces de l'ordre.

L'activité économique était paralysée. Les magasins, les administrations et les écoles sont restés fermés, accentuant les difficultés de cette région où les investissements et les créations d'emplois ont enregistré un fort recul en 2012, selon des statistiques officielles.

Sans atteindre l'ampleur des derniers jours, des échauffourées ont opposé vendredi après-midi des centaines de jeunes aux forces de l'ordre, après une manifestation pacifique qui a rassemblé plus de 10 000 personnes dans la matinée.

Aux jets de pierres et de cocktails Molotov des manifestants, essentiellement des adolescents, la police a réagi par des tirs de gaz lacrymogènes, avant de procéder à des tirs de sommation.

Des marches et des manifestations de solidarité avec la population de Siliana ont été organisées dans plusieurs villes de l'intérieur du pays. À Tunis, la capitale, quelques centaines de personnes se sont rassemblées vendredi devant le ministère de l'Intérieur pour dénoncer «la répression policière brutale» du mouvement social à Siliana.