Contrainte de constater l'échec cuisant de son programme de formation de rebelles modérés en Syrie, l'administration Obama a annoncé vendredi qu'elle y mettait fin et se concentrerait désormais sur la fourniture d'armes à des groupes triés sur le volet.

Lancé au début de l'année par les États-Unis, le programme de formation et d'équipement, doté de 500 millions de dollars, devait concerner environ 5000 rebelles syriens par an pour combattre en Syrie les djihadistes du groupe État islamique (EI). Ce fut un véritable fiasco : il n'a permis de former que quelques dizaines de combattants.

Ce revirement devrait donner du grain à moudre aux détracteurs de Barack Obama qui dénoncent avec de plus en plus de véhémence ses atermoiements sur la Syrie au moment où la Russie, qui multiplie les frappes depuis dix jours, se positionne comme un acteur incontournable dans le conflit.

«Nous faisons une pause sur la formation menée jusqu'ici», a résumé, en termes diplomatiques, Christine Wormuth, sous-secrétaire à la Défense.

Concrètement, l'armée américaine abandonne la formation d'unités d'infanterie et travaillera désormais avec les groupes sur le terrain qui se battent déjà contre l'EI.

Selon le porte-parole du Pentagone, Peter Cook, les États-Unis fourniront des équipements et des armes «à des chefs de groupes sélectionnés et à leurs unités», pour qu'ils puissent mener des attaques concertées dans des zones contrôlées par le groupe armé État islamique.

Sans donner des précisions sur le type d'armes envisagé, la Maison-Blanche a évoqué des «équipements de base».

Les experts attribuent en particulier le peu de résultats du programme de formation de rebelles au filtrage extrêmement serré des recrues potentielles opérés par les Américains.

Le programme d'aide aux rebelles syriens du Pentagone n'est pas le seul soutien apporté par Washington à ces groupes : la CIA a aussi fourni des armes à des rebelles syriens à partir de 2013, et entrainé certains d'entre eux.

«Options désormais limitées»

La sénatrice républicaine Deb Fischer s'est félicitée, avec ironie, que l'exécutif admette «ce que nous savions depuis quelque temps : l'entraînement des rebelles syriens est un échec».

«S'il est encourageant de voir, enfin, l'administration reconnaître les faits sur le terrain, nous avons incontestablement perdu un temps précieux. Je crains que nos options soient désormais limitées», ajoute-t-elle.

L'exécutif américain insiste inlassablement sur le fait que la solution passe par une transition politique : «en Syrie, vaincre l'EI nécessite un nouveau dirigeant», a lancé M. Obama fin septembre à l'ONU.

L'avenir de Bachar al-Assad est le principal point de désaccord entre Moscou et Washington. La Russie, qui a toujours soutenu le régime de Damas, estime qu'il n'est pas possible de se passer de ce dernier pour lutter contre les djihadistes.

Dans un entretien qui sera diffusé dimanche dans l'émission 60 Minutes sur CBS, M. Obama a rejeté une nouvelle fois l'idée selon laquelle l'intervention militaire russe en Syrie serait la preuve que Moscou est désormais en position de force. Le président américain y voit, au contraire, un aveu de faiblesse.

«La Syrie était le seul allié de la Russie dans la région. Aujourd'hui, au lieu de pouvoir compter sur son soutien (...) M. Poutine envoie ses troupes, son armée, simplement pour tenter de faire tenir par un fil son allié», a-t-il avancé.

«Si vous pensez que d'avoir à envoyer des troupes pour soutenir à bout de bras votre seul allié c'est faire preuve de leadership, alors nous n'avons pas la même définition du leardership», a-t-il ajouté.

Les États-Unis dirigent une coalition militaire d'une soixantaine de pays, dont le Royaume-Uni, la France et les voisins arabes de la Syrie. Elle a mené depuis un an plus de 5000 frappes aériennes contre des positions de l'EI en Irak et en Syrie.