Un député indépendant qui a longtemps été membre du parti communiste s'est porté candidat mercredi à l'élection présidentielle annoncée pour le 3 juin en Syrie, dont la crédibilité est mise en doute dans un pays en pleine guerre.

Dans le même temps, le régime a accusé l'ONU et son émissaire Lakhadar Brahimi d'être de «parti pris» et «d'entraver» les pourparlers de paix, dont deux sessions totalement stériles ont eu lieu en début d'année à Genève.

Alors que la réélection de Bachar al-Assad pour un troisième mandat de sept ans ne fait guère de doute, le député indépendant Maher Hajjar s'est présenté à la Cour constitutionnelle pour faire acte candidature.

Le gouvernement n'a pas encore précisé son plan pour la tenue de ces élections, alors que de larges parties du pays sont hors de son contrôle. Selon le géographe français Fabrice Balanche, il contrôle 40% du territoire, des zones dans lesquelles vivent plus de 60% de la population.

C'est la première fois depuis un demi-siècle que plusieurs candidats peuvent se présenter à la présidentielle. Bachar al-Assad, comme son père Hafez, a jusqu'à présent été élu par référendum.

M. Hajjar est originaire d'Alep, la principale ville du nord aujourd'hui divisée entre rebelles et forces du régime. Âgé de 46 ans, il a été membre du parti communiste syrien de 1984 à 2000 et «l'un des leaders du mouvement communiste à l'Université d'Alep», selon la télévision syrienne.

Il a ensuite rejoint le «parti de la volonté populaire» formé par Qadri Jamil, un opposant toléré qui a rejoint le gouvernement comme vice-premier ministre avant d'être démis de ses fonctions en octobre 2013 et de partir s'installer en Russie.

«M. Hajjar a participé au mouvement pacifique populaire au début de la crise», a ajouté la télévision, en évoquant le mouvement de contestation contre le régime en mars 2011.

Pour valider sa candidature, M. Hajjar doit désormais obtenir le soutien d'au moins 35 des 250 députés. Outre cette condition, les candidats doivent aussi avoir vécu en Syrie de manière continue ces 10 dernières années, ce qui exclut tous les opposants en exil.

«Écouter l'opinion des Syriens»

Bachar al-Assad n'a pas encore annoncé officiellement sa candidature. Il avait affirmé en janvier à l'AFP qu'il y avait «de fortes chances» qu'il se représente.

La crise en Syrie a débuté en mars 2011 par des manifestations pacifiques mais s'est militarisée face à la répression sanglante menée par le régime, avant de se complexifier avec des luttes meurtrières entre groupes rebelles rivaux. Les violences ont fait plus de 150 000 morts et près de la moitié de la population syrienne a été déplacée.

Dans ce contexte, l'opposition syrienne a dénoncé l'élection comme «une farce», Washington a dénoncé une «parodie de démocratie», alors que les Nations unies et la Ligue arabe ont estimé qu'il posait des obstacles majeurs aux efforts de paix.

Cette prise de position des Nations unies a irrité Damas. «L'ONU et son émissaire Lakhdar Brahimi, qui est de parti pris et non un médiateur honnête, entravent les pourparlers de Genève-2», a déclaré un responsable du ministère syrien des Affaires étrangères, cité par la télévision.

«La décision d'organiser une élection présidentielle en Syrie est une décision souveraine et aucune partie étrangère ne peut y interférer», a poursuivi le ministère.

«Les pays occidentaux revendiquant la démocratie et la liberté, devraient écouter l'opinion des Syriens (pour savoir) qui ils vont élire lors du scrutin», a-t-il insisté.

Le ministère a également accusé des pays qui «envoient des armes aux terroristes, soutiennent leurs crimes et refusent d'écouter la voix du peuple syrien via les urnes, d'entraver toutes les solutions politiques».

Le responsable n'a pas nommé de pays, mais l'accusation visait principalement des pays du Golfe et la Turquie.