Le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon a été «scandalisé d'apprendre qu'un nouveau massacre» aurait eu lieu en Syrie dans le village de Maan (région de Hama, nord), a indiqué mardi son porte-parole Martin Nesirky.

«Des dizaines de civils auraient été brutalement tués le 9 février» dans ce village, a ajouté M. Nesirky.

M. Ban «condamne dans les termes les plus forts toute violence contre les civils et réclame que les auteurs de ce massacre, et de tous les autres crimes en Syrie, soient traduits en justice».

De tels drames «doivent nous rappeler à tous qu'il est urgent de mettre fin au conflit et d'amorcer une transition politique vers une nouvelle Syrie où toutes les communautés seraient protégées et verraient leurs droits et leurs libertés garantis», a ajouté le porte-parole.

Hier à Genève, la délégation gouvernementale a présenté un projet de communiqué demandant «avec insistance» de la part des Nations Unies, représentées par M. Brahimi, «une condamnation claire» de l'attaque menée contre le village alaouite de Maan dans la province de Hama où des rebelles islamistes ont tué dimanche au moins 21 civils et 20 combattants pro-régime, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH).

Après deux jours de dialogue de sourds, les négociations sur le conflit syrien entre opposition et gouvernement étaient mardi dans l'impasse à Genève, un ministre à Damas estimant qu'en l'état elles sont «vouées à l'échec».

Le médiateur de l'ONU Lakhdar Brahimi a admis que ce nouveau cycle de discussions est aussi «laborieux» que le premier qui s'était tenu en janvier, mettant face à face pour la première fois en trois ans de conflit des représentants des belligérants, le régime et une partie de l'opposition.

«Le début de cette semaine a été aussi laborieux que cela avait été (dans le passé). Nous n'accomplissons pas beaucoup de progrès», a-t-il dit aux journalistes.

M. Brahimi a assuré «avoir des tonnes de patience», mais a souligné que «le peuple syrien n'a pas cette patience et nous lui devons d'accélérer».

Mais pour le ministre syrien de la Réconciliation nationale, Ali Haidar, les négociations en cours à Genève sont  «vouées à l'échec en l'état actuel des choses».

Il a expliqué à l'AFP à Damas que le gouvernement syrien avait décidé de participer à la Conférence notamment «pour briser un blocus politique et médiatique qui dure depuis trois ans».

Pour lui, l'opposition s'est rendue à la Conférence dans le but de «gagner en légitimité».

Les deux délégations se sont bien assises à la même table mardi avec M. Brahimi, mais chacune a campé sur ses priorités, la lutte contre le terrorisme pour le gouvernement, et pour l'opposition avancer sur l'autorité gouvernementale de transition demandée par les grandes puissances dans Genève I en 2012.

Pour essayer de sortir de l'impasse avec les deux délégations qui refusent de s'entendre sur un agenda, M. Brahimi a appelé «tout le monde à faire de ce processus une réalité et à aider la Syrie à sortir de ce cauchemar que son peuple vit depuis presque trois ans», visant, au-delà des belligérants, la communauté internationale, et en premier lieu les coparrains de la Conférence, la Russie et les États-Unis.

Des protagonistes intransigeants

«Aujourd'hui a encore été une journée perdue parce que les représentants de la coalition (NDLR: de l'opposition) insistent sur le fait qu'il n'y a pas de terrorisme en Syrie et ils ne veulent pas en discuter», a affirmé le vice ministre syrien des Affaires étrangères Faysal Mokdad.

«Clairement, il n'y pas eu de progrès aujourd'hui, même sur l'agenda le régime s'est opposé à M. Brahimi, ne lui permettant pas de proposer un agenda acceptable par les deux parties», a estimé pour sa part le porte-parole de la délégation de l'opposition Louay Safi.

«Je ne peux pas imposer un agenda à des gens qui ne veulent pas. Je ne peux pas pointer un pistolet sur leur tête», a déclaré M. Brahimi, admettant ainsi son impuissance actuelle.

Les discussions doivent se poursuivre jusqu'à vendredi et la semaine prochaine il se rendra à New York pour rendre compte au Secrétaire général des Nations unies et au Conseil de sécurité.

Vendredi il aura une réunion trilatérale avec les deux coparrains de la Conférence,  représentés par le vice-ministre russe Guennadi Gatilov et la Secrétaire d'État adjointe Wendy Sherman.

Les opérations humanitaires dans la ville de Homs ont été la seule note relativement positive relevée mardi par M. Brahimi, même si elles ont été suspendues pour une journée, suite à des questions logistiques selon les autorités locales.

«Homs peut être appelé un succès», a-t-il estimé à propos de l'évacuation de plus de 1200 civils des quartiers assiégés de cette ville de Syrie et du ravitaillement que l'ONU a pu faire parvenir aux populations bloquées depuis 2012.

«Il nous aura fallu six mois pour sortir quelques centaines de personnes», a cependant regretté le diplomate qui a souligné que beaucoup d'autres zones assiégées attendent toujours une aide humanitaire. M. Brahimi a salué le courage du personnel de l'ONU et des volontaires du Croissant-Rouge syrien «qui ont pris beaucoup de risques» dans cette opération réalisée alors que des tirs ont continué. «La voiture du représentant de l'ONU en Syrie a été totalement détruite alors qu'il se trouvait à l'intérieur», a-t-il relevé.

Un projet de résolution sur la situation humanitaire en Syrie, élaboré par des pays occidentaux et arabes, a été distribué mardi matin aux 15 pays membres du Conseil de sécurité de l'ONU malgré l'opposition russe, ont indiqué des diplomates à New York.

Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a réaffirmé que ce texte était «absolument inacceptable» pour Moscou, un des principaux alliés du régime de Bachar al-Assad. «Les idées qui nous ont été transmises (...) sont absolument inacceptables et contiennent un ultimatum pour le gouvernement» syrien, a déclaré M. Lavrov.