La Commission d'enquête de l'ONU sur les violations des droits de l'homme en Syrie a annoncé lundi qu'elle enquêtait sur 14 cas présumés d'attaques chimiques qui auraient été commis depuis septembre 2011.

«Nous enquêtons sur 14 cas présumés d'usage d'armes chimiques, mais nous n'avons pas établi qui est responsable» de ces crimes, a déclaré le président de la Commission, Paulo Pinheiro, lors d'une conférence de presse.

«Nous avons vu des vidéos, nous disposons d'analyses d'experts militaires», a-t-il ajouté, citant aussi des interviews auprès de personnel médical.

Dans son précédent rapport, la Commission d'enquête n'avait fait état que de quatre cas d'attaques chimiques (deux en mars 2013 et deux en avril 2013).

La Commission d'enquête a toutefois refusé d'indiquer quand exactement avaient eu lieu les 10 autres cas, se contentant d'indiquer que les 14 cas ont été enregistrés depuis le début du mandat des enquêteurs en septembre 2011.

La Commission, qui n'a jamais eu l'autorisation de se rendre en Syrie, espère néanmoins encore recevoir le feu vert de Damas pour se rendre sur les lieux présumés de ces 14 attaques et établir, dans la mesure du possible, l'identité des responsables, a expliqué Carla del Ponte, membre de la Commission d'enquête.

L'ancienne procureure fédérale suisse, également ancienne procureure du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY) et du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), a aussi expliqué avoir reçu lundi dernier une invitation du régime syrien pour se rendre à titre «personnel» en Syrie. Mme del Ponte a toutefois décliné cette invitation, la Commission demandant une visite «officielle».

S'exprimant quelques heures plus tôt devant le Conseil des droits de l'homme, M. Pinheiro a rappelé que l'usage d'armes chimiques est un crime de guerre.

Il a néanmoins souligné que «la grande majorité des victimes du conflit est le résultat d'attaques (...) avec des armes classiques comme des fusils et des mortiers».

Accusé par plusieurs pays, dont les États-Unis et la France, d'avoir mené le 21 août une attaque chimique près de Damas, le président syrien Bachar al-Assad s'est engagé le 12 septembre à envoyer à l'ONU et à l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC) les documents techniques nécessaires pour adhérer à l'organisation.

Parallèlement, au terme de trois jours de discussions la semaine dernière à Genève, le secrétaire d'État américain John Kerry et son homologue russe, Sergueï Lavrov sont tombés d'accord samedi sur un cadre prévoyant la destruction de l'arsenal chimique syrien d'ici mi-2014.

Cet accord, auquel le régime de Bachar al-Assad a promis de se conformer, a éloigné une menace immédiate de frappes envisagées par Washington et Paris ses alliés pour «punir» le régime Assad. M. Pinheiro a indiqué espérer pour sa part que cet accord soit un «tremplin vers l'arrêt des hostilités et un règlement politique» du conflit.

La Commission d'enquête a été établie le 22 août 2011 par une résolution du Conseil des droits de l'homme et a pour mission d'enquêter sur toutes violations des droits de l'homme depuis mars 2011, et d'identifier les coupables afin de s'assurer qu'ils soient jugés.

Dans son dernier rapport, publié le 11 septembre, la Commission accuse le régime de crimes contre l'humanité et de crimes de guerre, et la rébellion de crimes de guerre.

La Commission, qui n'a jamais eu l'autorisation de se rendre en Syrie, appuie son travail sur plus de 2000 entretiens réalisés depuis sa création avec des personnes concernées en Syrie et dans les pays voisins. Elle a par ailleurs élaboré une liste confidentielle de personnes soupçonnées d'avoir commis des crimes en Syrie.