Le monde arabe, dont le roi de Jordanie Abdallah II, a réclamé vendredi à Davos, où est réunie l'élite mondiale des affaires, une action décisive pour en finir avec la guerre qui ravage la Syrie depuis près de deux ans.

«Il n'y a rien de plus dangereux que la passivité», s'est exclamé Abdallah II devant un parterre de responsables politiques et d'hommes d'affaires, réunis dans le cadre du 43e Forum économique mondial. En Occident, il y a parfois une tendance consistant à «attendre et voir», en particulier face aux bouleversements en cours dans le monde arabe, a-t-il déploré. «Laissons la poussière retomber et attendons que la démocratie s'installe», voilà en quelque sorte l'attitude souvent adoptée par certains pays, a expliqué le souverain hachémite.

Or, a-t-il assuré, cette attitude ne peut mener qu'à la catastrophe, en particulier par exemple en ce qui concerne le conflit palestinien. La porte se referme sur les chances de voir émerger une solution à deux États pour régler le conflit israélo-palestinien et sera définitivement fermée d'ici à la fin du second mandat du président américain Barack Obama, a dit le roi de Jordanie.

«S'il n'est pas encore trop tard, la solution consistant à avoir deux États ne survivra pas au second mandat du président Obama. Si nous ne réglons pas le problème dans les quatre prochaines années, je ne pense pas qu'il y aura jamais de solutions», a-t-il souligné.

En Syrie, «la communauté internationale doit se rassembler pour mettre fin de manière décisive au bain de sang», a encore déclaré Abdallah II. «Ce dont nous avons besoin, c'est d'un plan (...) qui garantisse l'unité et l'intégrité territoriale en donnant à tous les Syriens un rôle dans l'avenir de leur pays», a-t-il jugé.

Le roi de Jordanie a également lancé un appel à la communauté internationale à aider son pays à gérer l'afflux de réfugiés, fuyant la guerre en Syrie. Selon les Nations unies, ils sont maintenant plus de 300.000 sur le territoire jordanien, et le Haut-Commissariat aux Réfugiés (HCR) assure que la situation ne peut qu'empirer faute de perspective d'un prochain règlement du conflit en Syrie.

Des experts et des responsables du Moyen-Orient, présents à Davos, ont également pressé le monde d'agir, comme l'avait fait la veille dans cette même station de ski suisse le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon.

Aujourd'hui en Syrie, «il y a plus de 60.000 morts ... pouvons-nous attendre jusqu'à ce que ce chiffre soit multiplié par deux ?», s'est de son côté interrogé le prince Turki al-Faisal, ancien chef des services secrets saoudiens, qui a appelé à armer l'opposition syrienne.

Le ministre turc des Affaires étrangères Ahmet Davutoglu a indiqué, de son côté, à Davos que son pays avait déjà dépensé quelque 500 millions de dollars pour aider les 160.000 réfugiés présents en Turquie. Il s'est également prononcé en faveur d'une action concertée. «C'est notre devoir historique, nous devons tous agir», a-t-il dit, au cours d'un débat consacré à la situation en Syrie.

La veille, le secrétaire général de l'ONU avait dénoncé la passivité des grandes puissances, exhortant le Conseil de sécurité des Nations unies à faire preuve d'unité.

«Il est essentiel que le Conseil de sécurité surmonte ses blocages et trouve une unité qui rendra possible une action efficace», a déclaré M. Ban, car sinon ce sera la «destruction de la Syrie avec toutes ses implications régionales», un scénario «inacceptable».

D'autres responsables politiques du Moyen-Orient et du Maghreb, dont les premiers ministres d'Égypte, de Libye, du Liban, des Territoires palestiniens et le chef du gouvernement marocain ont confronté dans l'après-midi leurs points de vue sur les bouleversements que connaît leur région depuis le début du «printemps arabe», et les frustrations qu'il a parfois engendrées parmi les peuples.

Le premier ministre égyptien a ainsi recommandé la «patience», au moment même où des dizaines de milliers de personnes manifestaient au Caire et dans d'autres villes de son pays.