Une centaine de soldats syriens ont été tués jeudi, le bilan le plus lourd pour l'armée depuis le début de la révolte il y a près de 19 mois en Syrie, dont les autorités ont accusé la Turquie de mensonge après l'annonce d'une saisie d'armes russes à destination de Damas.    

Avec une moyenne de 20 morts par jour, l'armée syrienne compte environ 10 000 soldats tués depuis le début de la révolte en mars 2011, et au moins autant de blessés, selon une source hospitalière. En août, cette source avait fait état de plus de 8000 morts dans les rangs de l'armée.

La série noire s'est poursuivie vendredi avec une attaque rebelle à Khirba, dans la province de Deraa (sud), au cours de laquelle 14 soldats et six insurgés ont été tués, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), qui s'appuie sur un réseau de militants et de médecins.

À travers le pays, les violences ont fait vendredi au moins 31 morts -14 soldats, 13 rebelles et quatre civils- selon un bilan provisoire de l'OSDH, qui avait recensé 248 morts jeudi, dont 92 soldats et huit membres de milices pro-régime.

Parmi les soldats tués jeudi, 36 ont péri dans la province d'Idlib (nord-ouest), où les rebelles ont pris ces derniers jours le contrôle de positions clés à Maaret al-Noomane et Saraqeb, limitant la capacité de l'armée à envoyer des renforts à Alep en coupant deux tronçons de l'autoroute reliant Damas à la métropole du nord.

Selon l'OSDH, les rebelles ont intercepté vendredi un message radio du commandant de la base de Wadi Daif, la plus importante de la zone, appelant à l'aide.

« Si les avions ne nettoient pas les abords de la base, je ne me rendrai pas à la fin de la journée », a-t-il lancé, alors que l'armée de l'air bombardait les abords de Maaret al-Noomane et de Wadi Daif, théâtres d'intenses combats.

À Alep, le directeur de l'hôpital universitaire d'Alep, accusé par l'opposition de soutenir le régime et enlevé en juillet, a été assassiné et son corps retrouvé vendredi, a annoncé à l'AFP un médecin ami de la victime.

Malgré les violences, des manifestations hostiles au régime ont eu lieu comme tous les vendredis en Syrie.

À moins de 10 km de Maaret al-Noomane, des centaines de Syriens ont défilé, scandant des slogans hostiles à la Russie, grand allié de Bachar al-Assad.

Des cortèges sont également sortis à Alep, où les troupes ont tiré sur des manifestants à Halab-Jdidé, faisant des blessés, selon l'OSDH.

Avion turc contre hélicoptère syrien

Signe d'une tension toujours croissante avec le voisin turc, qui héberge les rebelles et réclame le départ du président Assad, un avion de chasse turc a éloigné vendredi un hélicoptère syrien qui s'était approché de la frontière entre les deux pays, a rapporté à l'AFP un responsable turc.

Les rapports entre la Turquie et la Syrie sont devenus exécrables depuis que cinq civils turcs ont été tués le 3 octobre par un obus syrien à la frontière.

Ils se sont encore envenimés après l'interception mercredi en Turquie d'un avion de ligne syrien assurant la liaison Moscou-Damas. Le premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan a affirmé qu'il transportait des armes de fabrication russe.

Selon le quotidien russe Kommersant, il s'agit d'éléments de radar anti-missiles russes destinés aux batteries antiaériennes syriennes.

M. Erdogan « continue sa série de déclarations mensongères qui visent à justifier le comportement hostile de son gouvernement à l'égard de la Syrie », a répliqué le ministère syrien des Affaires étrangères.

Le président français François Hollande a estimé qu'il existait un « risque » d'escalade entre Damas et Ankara, dont il a salué la « retenue ». Le ministre allemand des Affaires étrangères, Guido Westerwelle, était attendu à Istanbul pour discuter de la situation à la frontière.

Le médiateur international pour la Syrie Lakhdar Brahimi a entamé jeudi en Arabie saoudite une nouvelle tournée régionale pour tenter de trouver une issue au conflit.

Il a rencontré vendredi le roi Abdallah pour évoquer « les moyens de faire cesser toutes les violences (...) et les violations des droits de l'homme » en Syrie, a expliqué l'agence saoudienne Spa.

Au Liban, Hassan Nasrallah, le chef du mouvement chiite Hezbollah allié de Damas, a affirmé jeudi que des membres de son puissant parti armé combattaient les rebelles syriens, mais à titre individuel.

Confronté à un afflux massif de Syriens dans les pays limitrophes, le Haut-Commissariat de l'ONU pour les réfugiés (HCR) s'est dit « prêt » à affronter l'hiver dans la région, mais a reconnu avoir toujours beaucoup de difficultés à apporter de l'aide en Syrie même.