Les pays arabes et occidentaux réunis à Paris se sont prononcés vendredi pour une résolution du Conseil de sécurité de l'ONU sur la Syrie, comportant une menace de sanctions contre Damas et ont appelé une nouvelle fois la Chine et surtout la Russie à s'y rallier.

La troisième conférence des Amis du peuple syrien, qui rassemble une centaine de pays arabes et occidentaux et organisations favorables au départ du président Bachar al-Assad, s'est ouverte au moment où une source proche du pouvoir en Syrie annonçait une nouvelle défection il y a trois jours à Damas d'un très haut gradé, le général Mounaf Tlass.

Lors de cette conférence de Paris, la France, les États-Unis, la Grande-Bretagne, l'Allemagne notamment, mais aussi la Ligue arabe, ont demandé que les accords internationaux sur une transition politique en Syrie soient désormais gravés dans le marbre onusien et contenus dans une résolution « sous chapitre VII », donc assortie d'une menace de sanctions ou même d'un recours à la force.

« Il est tout à fait nécessaire de saisir à nouveau le Conseil de sécurité et d'exiger une mise en place du plan de Genève auquel Russie et Chine ont souscrit », a déclaré la secrétaire d'État américaine Hillary Clinton.

Les cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU se sont entendus samedi dernier à Genève sur la proposition de former un gouvernement de transition en Syrie. Mais les Occidentaux d'un côté, la Russie et la Chine de l'autre, divergent depuis sur l'interprétation à donner à cet accord.

Moscou et Pékin maintiennent qu'il revient aux Syriens de déterminer leur avenir alors que pour les Occidentaux ce document implique le départ de Bachar al-Assad.

Une résolution de l'ONU pour arrêter la violence

Les Russes et les Chinois « acceptent une transition (politique), il faut demander une résolution qui définisse les conséquences en cas de non-respect de ce plan, y compris sous chapitre VII », a poursuivi Mme Clinton.

Puisque les Russes et les Chinois acceptent le plan de sortie de crise du médiateur international Kofi Annan et l'accord de Genève qui en découle, ils doivent accepter que la Syrie puisse être sanctionnée si elle ne s'y conforme pas, estiment ainsi les Occidentaux.

Dotées d'un droit de veto au Conseil de sécurité, la Chine et la Russie ont bloqué jusqu'à présent toute action internationale résolue contre le pouvoir de Bachar al-Assad. Aucune sanction de l'ONU n'a ainsi pu être décidée, et les mesures de rétorsion prises contre Damas l'ont été par l'Union européenne, les États-Unis ou la Ligue arabe, ce qui réduit leur portée.

« L'arrêt de la violence exige une résolution du Conseil de sécurité sous le chapitre VII », a abondé le secrétaire général de la Ligue arabe Nabil al-Arabi.

Ouvrant la conférence, le président français François Hollande a également demandé aux participants « d'encourager le Conseil de sécurité » de l'ONU « à prendre le plus vite possible des dispositions pour mieux soutenir le plan de sortie de crise » de Kofi Annan.

Qualifiant le bilan en Syrie de « terrible et insupportable pour la conscience humaine », il a appelé les participants à prendre « cinq engagements » concrets pour faire pression sur Damas, dont « l'application réelle et effective » de sanctions économiques et financières et « le renforcement » du soutien à l'opposition en lui fournissant des moyens de communication.

Ces engagements doivent aussi comprendre le refus de l'impunité pour les crimes commis depuis près de 16 mois, l'organisation d'une aide humanitaire efficace, et la promesse de l'aide à la reconstruction du pays, selon M. Hollande.

« Menace pour la sécurité internationale »

Le président français a lui aussi directement interpellé la Chine et la Russie, accusées par Hillary Clinton de « bloquer les progrès » sur le dossier syrien.

« Je veux m'adresser à ceux qui ne sont pas là. Au moment où nous en sommes de la crise syrienne, il n'est plus contestable que cette crise est devenue une menace pour la paix et la sécurité internationale », a-t-il averti, cherchant à réfuter l'argument russe de la non-ingérence dans les affaires d'un pays.

Mais alors que les efforts diplomatiques n'ont jusqu'ici pas payé, de plus en plus d'analystes estiment que c'est la situation sur le terrain qui changera la donne.

« Le régime est en train de tomber, de perdre le contrôle du territoire », a affirmé le chef du Conseil national syrien (CNS, opposition) Abdel Basset Sayda.

Sans aller jusque-là, des responsables européens considèrent que le rapport de force entre les rebelles de l'Armée syrienne libre (ASL) et le pouvoir a évolué depuis quelques semaines sur le terrain, tandis que les désertions d'officiers syriens se sont multipliées, à l'image de la dernière en date, celle de Mounaf Tlass, ami d'enfance du président syrien.

Le ministre français des Affaires étrangères Laurent Fabius a déclaré que le général Tlass se dirigeait vers Paris.

Mais le CNS a tout de même demandé à nouveau une intervention militaire étrangère. « Il faut prendre toutes les mesures afin d'établir une zone d'exclusion aérienne et des corridors humanitaires », a martelé vendredi à Paris son président.

En près de 16 mois de conflit, le bilan meurtrier de la répression et des combats a fait plus de 16 500 morts essentiellement des civils, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH).