Le Conseil des droits de l'homme de l'ONU a donné vendredi son feu vert, malgré l'opposition russe et chinoise, à une enquête internationale indépendante sur le massacre de Houla en vue de traduire en justice les responsables qui pourraient être accusés de « crimes contre l'humanité ».

Après plusieurs heures de discussions, les diplomates réunis à Genève ont accepté et durci une résolution en ce sens qui avait été déposée par Djibouti, le Koweït, le Qatar, l'Arabie saoudite, la Turquie et les États-Unis, au cours d'une session spéciale sur la Syrie (la 4e depuis mars 2011).

« Condamnant dans les termes les plus sévères les assassinats scandaleux de 49 enfants », la résolution demande une « enquête spéciale exhaustive, indépendante et sans entrave » sur les événements de Houla qui ont fait au moins 108 morts, dont 49 enfants, et provoqué un véritable tollé au sein de la communauté internationale.

Le texte souligne la « nécessité de mener une enquête internationale, transparente, indépendante et rapide sur les violations du droit international en vue de demander des comptes aux responsables des violations des droits de l'homme (...), y compris les violations qui pourraient constituer des crimes contre l'humanité ».

Il demande aussi « si possible d'identifier publiquement les personnes qui semblent être responsables de ces atrocités, et de préserver les preuves des crimes pour d'éventuelles poursuites pénales futures ou un futur processus judiciaire, en vue de demander des comptes aux responsables ».

L'enquête sera établie par la commission d'enquête internationale, qui est présidée par l'expert brésilien Paulo Sergio Pinheiro, et mandatée depuis août 2011 par le Conseil des droits de l'homme pour enquêter sur les violations des droits de l'homme en Syrie. Les experts devront présenter leurs conclusions au Conseil à sa 20e session (18 juin au 6 juillet).

Sur les 47 membres de cette instance onusienne, seules la Russie, la Chine et Cuba ont voté contre le projet américain. L'Ouganda et l'Équateur se sont abstenus.

L'ambassadeur russe auprès de l'ONU, Alexeï Borodavkin, a jugé le texte de la résolution « déséquilibré, biaisé et subjectif », déplorant qu'il n'inclue pas de « condamnation du terrorisme » ni de mention du travail des observateurs de l'ONU en Syrie et à Houla.

Il a également estimé non « approprié » de convoquer l'émissaire de l'ONU sur la Syrie, Kofi Annan, à la 21e session du conseil en septembre prochain.

M. Borodavkin a par ailleurs expliqué que la résolution préjugeait des résultats de l'enquête et accusait le gouvernement de tous les actes commis.

Vendredi encore, Mme Pillay, a redit pour sa part que « ces actes pouvaient constituer des crimes contre l'humanité et autres crimes internationaux, et pouvaient être le signe d'un modèle d'attaques systématiques ou généralisées contre les populations civiles qui ont été commises en toute impunité ».

Comme l'a fait la Suisse et de nombreux autres pays, le Haut commissaire a aussi réitéré son appel au Conseil de sécurité pour qu'il saisisse la Cour pénale internationale (CPI).

Elle a aussi appelé la communauté internationale « à appuyer de tout son poids le plan » Annan afin d'éviter un « conflit total » qui ferait courir à la Syrie et à la région dans son ensemble un « grave danger ».

Outre l'ONU plusieurs pays, dont la Chine et le Venezuela, ont mis en garde contre une « guerre civile » en Syrie.

Pour sa part, le représentant syrien, Faysal Khabbaz Hamoui, s'est contenté de répéter les conclusions de l'enquête de Damas, accusant des « groupes terroristes », dont certains ne sont pas syriens, de vouloir créer une zone de non-droit près de la frontière libanaise.

Il a également expliqué que « la plupart des armes qu'ils utilisaient étaient fabriquées en Israël ».

Condamnant la « répression sanglante », « orchestrée par les autorités syriennes au plus haut niveau », l'ambassadeur français auprès de l'ONU, Nicolas Niemtchinow, a déclaré pour sa part que « le Conseil des droits de l'homme ne pouvait fermer les yeux ».

De son côté, le représentant danois, Soren Kragholm, s'exprimant au nom de l'UE, s'est dit en faveur d'une « transition douce du régime ».

L'ambassadrice américaine Eileen Chamberlain Donahoe a, quant à elle, demandé la fin des « crimes horribles » et en a attribué la responsabilité au régime.

Elle a également estimé que ce « règne brutal prendrait fin inéluctablement ».

En Syrie, les violences continuent de faire des dizaines de morts tous les jours en dépit de l'entrée en vigueur théorique le 12 avril du cessez-le-feu exigé dans le plan de paix de Kofi Annan.