Les rebelles syriens ont annoncé jeudi leur «retrait tactique» du quartier de Bab Amr à Homs, après un mois de siège par les forces gouvernementales, décidées à «nettoyer» ce bastion de l'insurrection où la Croix-Rouge va être autorisée à entrer vendredi.

Alors que l'offensive gouvernementale s'intensifie, le Conseil national syrien (CNS), principale formation d'opposition, a annoncé la constitution d'un «bureau militaire» afin d'organiser et unifier la lutte armée contre le régime de Bachar el-Assad.

Dans un communiqué, la brigade des insurgés de Bab Amr a annoncé procéder à un «retrait tactique» pour épargner les quelque 4 000 civils qui n'ont pas pu ou pas souhaité évacuer le quartier, bombardé sans relâche depuis près d'un mois. La décision a été prise en «raison de la dégradation des conditions humanitaires, le manque de vivres, de médicaments, d'eau, les coupures d'électricité et des communications, ainsi que du manque d'armes».

Les insurgés mettent en garde les troupes syriennes contre toute attaque de «représailles» contre les civils. Ce type d'actions «coûterait beaucoup au régime», préviennent-ils dans leur communiqué.

Les forces syriennes avaient coupé jeudi tous les moyens de communications du quartier de Baba Amr, brouillant les signaux de téléphone satellite, seul moyen de joindre l'extérieur après le blocage des liaisons téléphoniques fixes et cellulaires.

En fin de journée, un responsable syrien a affirmé que l'armée avait repris le contrôle du quartier. Des soldats continuaient à poursuivre des hommes armés, mais il a qualifié le quartier de Baba Amr de «calme».

D'après les Comités locaux de coordination, 22 personnes ont été tuées jeudi à Homs, et 37 autres dans le pays.

Les bombardements de Homs, troisième ville de Syrie, ont fait plusieurs centaines de morts et de blessés, dont beaucoup n'ont pas pu encore être soignés. À Genève, le Comité international de la Croix-Rouge a annoncé avoir obtenu le «feu vert» des autorités syriennes pour accéder vendredi à Bab Amr, où les équipes de la Croix-rouge et du Croissant-rouge n'ont pas pu entrer depuis le 25 février. Seulement 27 personnes, dont des femmes et des enfants, avaient pu être évacuées.

Selon le porte-parole du CICR Hicham Hassan, le CICR et la Société du Croissant-Rouge syrien doivent acheminer des vivres à Bab Amr et procéder à des évacuations.

Parmi les blessés, le sort de la journaliste française du «Figaro» Edith Bouvier, reste incertain. «Que ce soit ici à Paris ou sur le terrain, nous mettons tout en oeuvre pour obtenir l'évacuation dans des conditions sécurisées d'Edith Bouvier», a déclaré le porte-parole du ministère français des Affaires étrangères, Bernard Valero.

«Un arrêt des violences, qui ont atteint un niveau insupportable, dans la ville de Homs est indispensable pour parvenir à réaliser ce but. Nous demandons aux autorités de Damas de prendre sans tarder une décision dans ce sens», a ajouté le porte-parole lors du point de presse électronique du Quai d'Orsay.

Dans la matinée, toujours à Paris, le président du Conseil national syrien Burhan Ghalioun a annoncé la formation d'un «bureau militaire», en coordination avec l'Armée syrienne libre (ASL), composée principalement de déserteurs de l'armée. «Nous voulons organiser ceux qui portent les armes aujourd'hui», a déclaré le président du CNS Burhan Ghalioun au cours d'une conférence de presse.

«La révolution a débuté pacifiquement et a gardé son caractère pacifique pendant des mois, mais la réalité aujourd'hui est différente et le SNC, confronté à cette nouvelle réalité, doit assumer ses responsabilités», a ajouté M. Ghalioun. Invité à préciser si la Syrie s'acheminait selon lui vers la guerre civile, il a a répondu par la négative.

«Non, le soulèvement en Syrie restera avant tout un mouvement populaire pacifique. La tâche du conseil militaire est de protéger ces manifestants pacifiques et les civils», a-t-il fait valoir. «Nous voulons contrôler l'usage des armes, pour qu'il n'y ait pas de guerre civile. Notre objectif est d'éviter une guerre civile».

Le CNS avait déjà demandé des armes pour l'insurrection. Mais c'est la première fois qu'il cherche à organiser la lutte armée, à l'heure où les forces syriennes ont lancé une offensive au sol pour reprendre et «nettoyer» le quartier de Bab Amr, devenu un symbole du soulèvement visant à chasser du pouvoir Bachar el-Assad.

A Genève, par ailleurs, le Conseil des droits de l'homme de l'ONU a condamné jeudi la Syrie pour «ses violations systématiques et généralisées» contre les civils et l'ont appelé à mettre un terme immédiat aux violences.

Le texte, adopté par 37 pays membres du Conseil sur 47, n'a pas de valeur contraignante. La Russie, la Chine et Cuba ont voté contre. Selon des estimations de l'ONU, la répression du soulèvement entamé en mars 2011 a fait plus de 7 500 morts.

À New York, le Conseil de sécurité des Nations unies a dit déplorer la détérioration rapide de la situation humanitaire et a appelé les autorités syriennes à octroyer à la secrétaire générale adjointe de l'ONU aux affaires humanitaires et coordonnatrice des secours d'urgence, Valerie Amos, un «accès libre» sur le terrain. La Syrie n'a jusqu'à présent pas autorisé Valerie Amos à entrer dans le pays.