Au-delà de l'annulation symbolique de manoeuvres conjointes annoncée jeudi par Barack Obama, l'aide américaine à l'Égypte repose sur le financement d'achats d'équipements militaires pour ancrer Le Caire dans la paix avec Israël et dont l'annulation coûterait des milliards à Washington.

Au lendemain de la mort d'au moins 525 personnes dans des violences en Égypte, le président américain a expliqué «étudier» les conditions de la coopération américano-égyptienne, même s'il a dit souhaiter «maintenir (la) relation avec l'Égypte».

Il a cependant annoncé l'annulation de l'exercice militaire «Bright Star» qui devait se dérouler le mois prochain. Ces manoeuvres conjointes, qui se déroulent tous les deux entre l'Égypte et les États-Unis, remontent à 1981. Elles avaient déjà été suspendues en 2011 en raison du Printemps arabe.

Mais ce n'est que symbolique au regard de l'étendue de la coopération militaire: depuis 1979, «l'Égypte est le plus gros bénéficiaire, après Israël, de l'aide bilatérale américaine», à hauteur de 68 milliards de dollars, selon le Service de recherche du Congrès (CRS).

Destinée à ancrer l'Égypte dans la paix avec Israël et à faire du Caire un pivot de la politique arabe des États-Unis tout en garantissant les droits de passage pour les navires de l'US Navy dans le stratégique canal de Suez, cette aide est essentiellement militaire: 1,3 milliard de dollars annuels - le même montant depuis 1987 - pour 250 millions d'aide économique.

L'importance du soutien américain est tel qu'il couvre près de 80% des dépenses d'équipement de l'armée égyptienne, selon le CRS.

Les chars américains M1A1 Abrams sont produits sous licence en Égypte qui doit en acquérir 1200 et plus de 220 chasseurs F-16 ont été livrés au Caire depuis 1980.

En 2010, l'Égypte a passé commande de 20 F-16 supplémentaires à Lockheed Martin pour 2,5 milliards de dollars. Quatorze ont déjà été livrés mais Washington a décidé fin juillet de repousser la livraison de quatre appareils après le renversement du président Mohammed Morsi.

Au-delà des considérations politiques, une annulation de l'aide américaine aurait des conséquences financières importantes pour les États-Unis.

De fait, l'aide, via le système de Financement militaire étranger (FMF), n'est pas versée à l'Égypte. C'est Washington qui passe directement les contrats avec les industriels de la défense américaine pour qu'ils fournissent les équipements militaires réclamés par Le Caire.

Autrement dit, en cas d'annulation de l'aide à l'Égypte, les États-Unis auraient toujours une obligation à l'égard des industriels et devraient s'acquitter de lourdes pénalités en cas d'annulation des contrats, qui dans ce domaine s'étalent sur de nombreuses années.

Un autre élément important mais bien moins coûteux (1,3 million de dollars par an) de l'aide militaire concerne la formation d'officiers égyptiens dans les écoles militaires américaines: entre 2000 et 2009, 11 500 d'entre eux y sont passés, dont l'homme fort du régime égyptien, le général Abdel Fattah al-Sissi.