Les partisans de Mohamed Morsi campent depuis plus de deux semaines dans une banlieue du Caire, suspendus aux discours de tribuns enflammés et déterminés à obtenir coûte que coûte le retour du président islamiste déchu.

Sur une tribune installée par les Frères musulmans près de la mosquée Rabaa al-Adawiya, dans le quartier de Nasr City, les orateurs se succèdent quotidiennement pour encourager les manifestants à rester mobilisés.

En réponse aux appels à manifester contre le président, à l'occasion du premier anniversaire de son accession au pouvoir le 30 juin, ses partisans avaient entamé un sit-in de soutien dès le 28 juin.

Depuis, M. Morsi a été destitué par l'armée, le 3 juillet. Mais ses partisans, arguant de la légitimité d'un président élu, n'ont pas désarmé et ne quittent pas la place.

Ibrahim Mohamed est venu de la province de Charqiya, dans le delta du Nil (nord). Il a planté une tente devant la mosquée et affirme qu'il ne bougera pas tant que Mohamed Morsi, dont il a accroché un portrait derrière lui, ne sera pas revenu au pouvoir.

«Nous sommes des millions (de pro-Morsi), nous sommes bien plus nombreux que les opposants» au président, affirme-t-il.

Comme lui, la plupart des manifestants croient dur comme fer à la popularité du chef de l'État issu des Frères musulmans, évincé par l'armée à la suite des manifestations monstres du 30 juin réclamant son départ.

Beaucoup sont ainsi persuadés que les manifestations anti-Morsi n'étaient qu'une mise en scène.

«Les manifestants du 30 juin étaient des soldats des services de sécurité (police anti-émeute) et des anciens (du régime de l'ex-président Hosni Moubarak). Les médias ont exagéré les images et fait circuler la rumeur que toute l'Égypte était dans la rue», s'exclame Sayyed Abdullah, un ingénieur.

Pour preuve de la popularité incontestable de M. Morsi, selon eux, les orateurs qui se succèdent en tribune assurent que même des chrétiens d'Égypte (coptes) réclament son retour.

Les discours sont souvent enflammés et chargés de rhétorique religieuse.

Certains intervenants liés aux Frères musulmans ont même raconté que des miracles en faveur de M. Morsi s'étaient produits.

Ainsi, l'un d'eux a raconté que le prophète Mahomet était apparu au président déchu, un autre que l'archange Gabriel avait fait une apparition au-dessus de la mosquée.

D'autres orateurs font courir des rumeurs sur des désertions en faveur de M. Morsi, ce que l'armée a démenti.

De leur côté, des médias ont affirmé que les Frères musulmans avaient confisqué les pièces d'identité des manifestants pour les forcer à rester sur la place. La confrérie a démenti.

«Nous ne contrôlons absolument pas ce qui se dit sur la tribune», a indiqué à l'AFP Ahmed Aref, le porte-parole des Frères musulmans, ajoutant que les orateurs étaient seuls responsables de leurs déclarations.

La confrérie «n'exerce aucune pression sur qui que ce soit pour rester», a-t-il ajouté.

Outre la ténacité, un sentiment d'amertume règne aussi sur la place et lors de la prière collective, des centaines de fidèles pleurent, implorant le retour de Mohamed Morsi.

Les plus exaltés se disent prêts à mourir pour lui.

Dans les rues, des T-shirts blancs marqués du slogan «Martyr prévu» ont commencé à faire leur apparition.

«Je ne quitterai pas cet endroit ou alors ce sera dans un cercueil. Nous soutiendrons Morsi avec notre sang», a affirmé à l'AFP Mohamed Youssri, un adolescent arborant un de ces T-shirts.

«Je suis totalement conscient de ce que cela signifie. Oui, je suis prêt à mourir pour ma religion, mes Frères (musulmans) et mon président», a-t-il ajouté.