Le Black Bloc, un obscur groupuscule apparu ces derniers jours en Égypte lors de manifestations violentes, se trouve dans le collimateur des autorités, mais ses effectifs, son influence et sa structure demeurent un mystère.

Des manifestants, cagoulés ou masqués, parfois vêtus de noir de la tête aux pieds, sont apparus depuis une semaine au Caire et dans d'autres provinces, se réclamant du «Black bloc». «Le chaos contre l'injustice», proclamaient ces protestataires.

Dans une vidéo mise en ligne sur YouTube, les Black Bloc affichent leur opposition au pouvoir du président islamiste Mohamed Morsi, issu des Frères musulmans, en affirmant vouloir «faire face au régime des tyrans fascistes».

Le bureau du procureur général, Talaat Ibrahim Abdallah, a annoncé jeudi l'arrestation de 20 membres présumés du groupe pour «avoir perpétré des actes de sabotage». L'un d'eux est, selon lui, poursuivi pour un «projet israélien de sabotage» mais Israël a jugé «absurde» de l'y impliquer.

M. Abdallah avait ordonné mardi l'arrestation de toute personne soupçonnée d'appartenir au groupe et réclamé l'ouverture d'une enquête sur une plainte accusant les Black Bloc d'avoir mis le feu à des locaux des Frères musulmans et d'être liés à des personnalités de la politique et des médias.

«Le Black Bloc est un groupe organisé. (Ses membres) sont des fauteurs de troubles», a déclaré à l'AFP un avocat, Abed al-Wakil, auteur de la plainte.

Un journaliste de l'AFP a assisté mercredi à l'arrestation de plusieurs jeunes, cagoules et capuches noires sur la tête, devant les bâtiments du procureur au Caire, au lendemain de l'annonce par des militants sur les réseaux sociaux qu'ils allaient se présenter devant son bureau pour défier sa décision.

«Martyrs en puissance»

Massivement déployées sur place, les forces de sécurité, notamment des policiers en civil, ont arrêté un suspect en blouson noir. Une heure plus tard, des policiers en ont interpellé au moins quatre autres, qu'ils ont emmenés à l'intérieur du bâtiment.

La police n'a fourni aucun détail sur ces arrestations ou sur le groupe, dont la page Facebook affichait jeudi soir plus de 36 000 sympathisants.

Les signes distinctifs du Black Bloc, comme l'usage de la cagoule par ses sympathisants, semblent inspirés par certains groupes radicaux anti-mondialisation présents en Europe depuis les années 1980.

Sur leur page Facebook, les militants se définissent comme «une génération issue du sang des martyrs» de la révolte de 2011 qui a chassé Hosni Moubarak du pouvoir et soulignent que le groupe est une réaction à «l'absence de justice».

«Les révolutions ne se font pas avec de l'eau de fleur d'oranger, mais avec du sang», clament-ils encore, se disant des «martyrs en puissance».

Certains doutent cependant de l'existence d'un tel groupe.

Pour Haïtham Nour, un jeune de 25 ans qui se trouvait mercredi devant les bureaux du procureur et affirme être un «activiste politique», le Black Bloc «n'existe pas».

En revanche, affirme-t-il, «il y a les brigades noires dans le pays, celles des milices des Frères musulmans et des groupes salafistes armés», a-t-il ajouté en référence à la confrérie et ses alliés conservateurs.

Sur la Toile, une autre appellation a fait son apparition, «White Bloc», un groupe présenté comme une émanation des Frères musulmans et des salafistes, lesquels ont multiplié les démentis sur ce groupe, dont aucune présence n'a été signalée sur le terrain.

Le Black Bloc a fait son apparition dans la foulée des manifestations qui ont débuté jeudi dernier en Égypte avec le deuxième anniversaire de la révolte de 2011 et qui ont fait au moins 56 morts et des centaines de blessés.

De nouvelles manifestations hostiles au pouvoir sont prévues vendredi.