La dernière phase de l'élection-marathon des députés s'est achevée mercredi en Égypte, avec en prime pour les islamistes largement gagnants une rencontre sans précédent des Frères musulmans avec le numéro deux du département d'État américain William Burns.

Cette première élection depuis la chute de Hosni Moubarak en février 2011 a été marquée par l'avance écrasante des islamistes, crédités toutes formations confondues d'environ 65% des voix et 70% des sièges, selon des résultats provisoires.

Organisé depuis le 28 novembre dans trois zones géographiques successives, le scrutin aux modalités complexes s'est achevé à 19h (10h, heure de Montréal) dans le dernier tiers du pays à voter -qui comprend neuf gouvernorats du Sinaï, de la vallée et du delta du Nil ainsi que des oasis.

Des invalidations pour irrégularités ou problèmes logistiques demanderont toutefois de revoter dans de multiples circonscriptions dans les jours prochains, ce qui pourrait retarder l'annonce des résultats officiels complets aux alentours du 20 janvier.

Les Frères musulmans, qui recueilleraient environ 36% des voix selon des chiffres provisoires, passent de la semi-clandestinité qui leur était imposée sous le régime déchu de Hosni Moubarak au statut de première force politique du pays.

Les États-Unis, qui ont repris ces derniers mois un dialogue discret avec la confrérie islamiste, malgré leurs inquiétudes sur l'attitude du mouvement envers les femmes, les minorités ou Israël, ont fait un pas supplémentaire.

En visite au Caire, M. Burns, secrétaire d'État adjoint, a rencontré des dirigeants du Parti de la liberté et de la justice (PLJ), issu des Frères musulmans.

«C'est la rencontre de plus haut niveau avec quelque responsable américain que ce soit», a déclaré Ahmed Sobea, porte-parole du PLJ.

Le chef du PLJ, Mohammed Moursi, a dit «croire en l'importance des relations égypto-américaines», mais estimé qu'elles «doivent être équilibrées», dans un communiqué publié après la rencontre.

Il a «demandé que les États-Unis révisent leur politique (...) en conformité avec (les aspirations) du Printemps arabe» qui a balayé les régimes autocratiques en Égypte, en Libye et en Tunisie. Il a aussi appelé Washington à adopter une «position positive concernant les causes arabes et islamiques».

Selon le PLJ, M. Burns «a félicité le parti pour ses résultats» électoraux et affirmé que son pays était «prêt à aider l'économie égyptienne à surmonter la crise». Les États-Unis «respectent le choix du peuple égyptien», a dit M. Burns cité par le communiqué.

Washington avait fait savoir début janvier que les Frères musulmans avaient donné des garanties sur le respect du traité de paix conclu en 1979 entre l'Égypte et Israël, premier allié des États-Unis dans la région.

M. Burns s'est en outre entretenu avec le maréchal Hussein Tantaoui, qui dirige le Conseil suprême des forces armées, au pouvoir depuis le départ de M. Moubarak.

Il devait évoquer notamment les perquisitions menées dans plusieurs locaux d'ONG égyptiennes et étrangères, dont trois américaines.

Le responsable américain n'a pas en revanche rencontré de responsables des partis fondamentalistes salafistes, crédités de quelque 25% des voix, dont la percée électorale constitue la grande surprise du scrutin.

Malgré une référence islamiste commune, les Frères musulmans ont tenu à se démarquer des salafistes en se présentant comme les tenants d'une ligne modérée.

Le scrutin législatif s'est également traduit par une déroute pour les formations libérales et laïques, de même que pour les mouvements issus de la révolte contre M. Moubarak l'an dernier.

L'élection des membres de l'Assemblée du peuple doit être suivie à partir du 29 janvier de celle des sénateurs de la Chambre haute consultative.

Le cycle électoral complet s'achèvera avec une présidentielle au plus tard fin juin.