L'aéroport de Tripoli a été lundi soir la cible de nouveaux tirs de roquettes, au lendemain d'affrontements violents entre groupes armés, qui ont poussé l'ONU à évacuer son personnel du pays.

Alors que la deuxième ville de Libye, Benghazi (est), a connu elle aussi de nouvelles violences, faisant au moins trois morts, ces développements font craindre un conflit plus large.

Depuis la chute du régime de Mouammar Kadhafi en 2011, des milices font en effet la loi dans le pays, en proie au chaos.

Dans ce contexte, la mission de l'ONU (Unsmil) a annoncé lundi le «retrait temporaire de son personnel de Libye pour des raisons de sécurité».

«Après les combats de dimanche et en raison de la fermeture de l'aéroport international de Tripoli, la mission a conclu qu'il ne serait pas possible de continuer son travail (...) tout en assurant en même temps la sécurité de son personnel ainsi que leur liberté de mouvement», a expliqué l'Unsmil dans un communiqué.

L'aéroport de Tripoli a été fermé dimanche pour trois jours en raison d'affrontements violents déclenchés par une attaque contre l'aéroport de milices islamistes cherchant à en chasser les brigades d'ex-rebelles qui le contrôlent depuis 2011.

Lundi soir, l'aéroport a été de nouveau la cible de «dizaines de roquettes», a déclaré à l'AFP un responsable de la sécurité de l'aéroport, Al-Jilani al-Dahech, qui a fait état d'un mort et six blessés parmi ses hommes.

La tour de contrôle a été touchée par une roquette, ainsi qu'un avion de la compagnie libyenne privée al-Buraq Airlines, a-t-on ajouté de même source.

Une dizaine d'avions des compagnies publiques libyennes Afriqiyah Airways et Libyan Airlines avaient été déjà endommagés par les combats de la veille, selon M. al-Dahech.

Lundi en début d'après-midi, un photographe de l'AFP a pu constater des impacts de balles sur plusieurs avions sur le tarmac. Des voitures calcinées étaient aussi visibles dans le stationnement où des roquettes ont atterri la veille.

L'attaque de l'aéroport avait été repoussée dimanche par les ex-rebelles anti-islamistes de Zenten, une ville au sud-ouest de Tripoli.

Ces violences interviennent dans le cadre d'une lutte d'influence entre islamistes et libéraux, en particulier après les législatives du 25 juin, dont les résultats définitifs devraient être annoncés dans une semaine et qui devraient être en faveur du courant libéral, selon des observateurs.

Les affrontements de dimanche, parmi les plus violents dans la capitale depuis la chute du régime Kadhafi, ont fait au moins six morts et 25 blessés.

Appels au dialogue

Ces violences inquiètent la communauté internationale qui craint un conflit plus généralisé.

La France a dit lundi redouter «une extension du conflit» et a appelé «toutes les parties au calme et au dialogue».

«Nous sommes gravement préoccupés par les récents affrontements violents à Tripoli», a indiqué de son côté un porte-parole de la chef de la diplomatie européenne Catherine Ashton, exhortant à «un dialogue constructif».

Les États voisins de la Libye, réunis en Tunisie, ont appelé lundi à un dialogue national et annoncé la mise en place de commissions sécuritaire et politique pour tenter d'aider le pays à sortir de l'anarchie.

Après celui de Tripoli, l'aéroport international de Misrata (200 km à l'est de Tripoli) a été contraint lui aussi de suspendre les vols pour des raisons, selon une source aéroportuaire.

«La Libye se trouve quasiment isolée du monde», a-t-elle ajouté, affirmant que la fermeture de l'aéroport de Tripoli pourrait être prolongée.

Il n'y a désormais plus que deux aéroports en service. Ceux des villes d'Al-Baida et Tobrouk, dans l'est de la Libye.

Combats à Bengahzi

Mais les étrangers ne sont pas autorisés à prendre l'avion pour l'est du pays, une mesure gouvernementale imposée après le lancement le 16 mai de l'offensive du général dissident Khalifa Haftar qui dit combattre les «groupes terroristes» dans l'est du pays, a précisé la source aéroportuaire.

Depuis le début de cette offensive, des affrontements quasi-quotidiens opposent les forces du général Haftar aux groupes islamistes armés, en particulier à Benghazi où l'aéroport est fermé depuis la mi-mai.

Lundi, dans cette ville, de violents combats ont opposé cette fois les forces de sécurité à des groupes islamistes pour le contrôle de l'hôpital al-Jala, tenu depuis plusieurs semaines par des islamistes radicaux, selon des témoins. Une source hospitalière a fait état de trois morts et 30 blessés.

Le gouvernement envisage de faire appel à des forces internationales

Le gouvernement libyen a annoncé dans la nuit de lundi à mardi qu'il examinait la possibilité de faire appel à des forces internationales pour rétablir la sécurité, en particulier dans la capitale.

«Le gouvernement examine la possibilité de faire appel à des forces internationales sur le terrain pour rétablir la sécurité et aider le gouvernement à imposer son autorité», a déclaré le porte-parole du gouvernement, Ahmed Lamine, dans un communiqué.

Selon le communiqué, ces forces auraient aussi pour mission de «protéger les civils et les richesses de l'État et (de) prévenir l'anarchie et l'instabilité, et (de) donner l'occasion à l'État de construire ses institutions, en particulier l'armée et la police».

Le gouvernement a ordonné «l'arrêt immédiat» des hostilités et le départ des deux camps rivaux de la capitale.

Il a annoncé par ailleurs la formation d'une commission chargée de trouver un compromis entre les deux camps en vue de mettre fin aux hostilités.