Quatre Américains, dont l'ambassadeur en Libye, ont été tués dans une attaque contre leur consulat à Benghazi, par des hommes armés protestant contre un film jugé insultant pour l'islam, une agression condamnée mercredi par le président Barack Obama.

Selon la chaîne d'information en continue CNN, citant «une source américaine», l'attaque contre le consulat de Benghazi était planifiée, les auteurs ayant utilisé la colère et la protestation soulevées dans le monde arabe par le film anti-islam comme prétexte.

Les autorités libyennes ont présenté leurs excuses aux États-Unis après cette agression survenue mardi soir, jour du 11e anniversaire des attaques du 11-Septembre aux États-Unis commises par le réseau islamiste Al-Qaïda.

Alors que les protestations dans les pays musulmans risquent de faire tache d'huile, les puissants Frères musulmans en Égypte ont appelé à manifester vendredi contre ce film polémique, au lendemain d'une manifestation au Caire devant l'ambassade des États-Unis.

Une manifestation de Coptes est en outre prévue en soirée devant l'ambassade des États-Unis au Caire à l'appel de groupes de cette communauté chrétienne d'Égypte. Selon la presse égyptienne et des prédicateurs radicaux, des Coptes vivant aux États-Unis seraient impliqués dans la réalisation du film.

Ce long métrage, intitulé Innocence of Muslims (L'Innocence des musulmans), également « fortement condamné » par les autorités afghanes, a été réalisé par un Israélo-Américain, Sam Bacile, qui décrit l'islam comme un « cancer ».

Les violences qu'il a entraînées rappellent celles qui avaient eu lieu en 2005 après la diffusion de caricatures du prophète Mahomet par un dessinateur danois, jugées insultantes.

L'attaque de Benghazi (est) est la première de cette envergure contre une ambassade occidentale en Libye depuis la chute du régime de Mouammar Kadhafi en octobre 2011. Elle illustre une fois de plus l'incapacité des autorités à assurer la sécurité dans le pays où les milices armées font la loi.

Mardi soir, des hommes armés ont attaqué avec des roquettes le consulat dans cette deuxième ville de Libye, bastion de la révolution et considérée comme un fief des islamistes radicaux, selon des sources de sécurité.

Des marines déployés



Les États-Unis vont déployer une équipe de Marines spécialisée dans la lutte antiterroriste en Libye.

« Les Marines envoient une équipe "Fast" (Fleet Antiterrorism Security Team, ou Équipe de sécurité de la flotte antiterroriste) en Libye », a déclaré à l'AFP ce responsable sous couvert d'anonymat.

La décision d'envoyer en Libye cette équipe composée d'une cinquantaine de soldats survient après les violences qui ont visé mardi le consulat américain à Benghazi, dans l'est du pays.

Obama condamne une attaque «scandaleuse»

Des témoins ont fait état de l'explosion de bombes artisanales et d'affrontements entre les forces de sécurité et les hommes armés, parmi lesquels se trouvaient des salafistes. Le consulat a été incendié après avoir été pillé et vandalisé, selon eux.

L'ambassadeur Chris Stevens et trois fonctionnaires du consulat ont péri, selon le vice-ministre de l'Intérieur Wanis al-Charef. Le décès de l'ambassadeur serait dû à une suffocation au monoxyde de carbone, a indiqué une source de sécurité.

Surpris par la violence de l'attaque, des membres des services de sécurité libyens chargés de la surveillance du consulat ont quitté les lieux, selon une autre source de sécurité.

Le président Barack Obama a fermement condamné mercredi l'attaque « scandaleuse » qui a coûté la vie en Libye à quatre Américains, dont l'ambassadeur des États-Unis, mais a affirmé qu'elle ne romprait pas les liens de Washington avec Tripoli.

« Les États-Unis condamnent dans les termes les plus forts cette attaque scandaleuse et choquante. Nous oeuvrons à mettre nos diplomates en sécurité avec le gouvernement libyen », a déclaré M. Obama lors d'une intervention solennelle dans la Roseraie de la Maison-Blanche, la secrétaire d'État Hillary Clinton à ses côtés.

« Nous travaillerons avec le gouvernement libyen pour que les tueurs qui ont attaqué nos ressortissants rendent des comptes », a ajouté M. Obama.

Mais il a aussi tenu à distinguer les assaillants et les Libyens, en soulignant que nombre d'entre eux avaient tenté d'aider les Américains pendant l'attaque, et avaient transporté la dépouille de l'ambassadeur à l'hôpital. « L'attaque ne rompra pas les liens entre les États-Unis et la Libye », a-t-il assuré.

Le président a rappelé que depuis leur indépendance, « les États-Unis ont été un pays qui respecte toutes les croyances. Nous rejetons toutes les tentatives de dénigrer la foi religieuse des autres. Mais il n'y a absolument aucune justification pour ce genre de violence insensée. Aucune », a-t-il martelé.

Un attentat commis par un petit groupe, selon Clinton



La secrétaire d'État américaine Hillary Clinton a fermement condamné mercredi comme un « attentat choquant pour toutes les consciences » l'attaque menée mardi contre le consulat américain à Benghazi en Libye dans laquelle quatre Américains, dont l'ambassadeur, ont péri.

La chef de la diplomatie américaine a accusé « un petit groupe sauvage » du meurtre de l'ambassadeur Chris Stevens et également promis lors d'une déclaration solennelle à la presse que les États-Unis préserveraient leur « amitié » envers la Libye.

« C'est un attentat qui devrait choquer les consciences de tous les fidèles partout dans le monde. Nous condamnons dans les termes les plus forts cet acte insensé de violence et transmettons nos prières aux familles, amis et collègues de ceux que nous avons perdus », a déclaré Mme Clinton.

« C'était un attentat perpétré par un petit groupe sauvage, pas par le peuple libyen », a insisté la secrétaire d'État.

M. Obama et Mme Clinton se sont ensuite rendus ensemble au département d'État, à environ un kilomètre de la Maison Blanche au centre de Washington.

Excuses de Tripoli

À Tripoli, le président du Congrès général national (CGN), plus haute autorité politique du pays, Mohamed al-Megaryef, a « présenté (ses) excuses aux États-Unis, au peuple américain et au monde entier pour ce qui s'est passé », tout en pointant du doigt à la fois les partisans du régime déchu de Mouammar Kadhafi et Al-Qaïda.

« Nous nous tenons aux côtés du gouvernement américain face à ces (...) assassins », a-t-il encore dit, qualifiant l'attaque de « lâche ».

L'attaque a été condamnée par le Canada qui s'est dit «profondément navré» par la bouche du ministre des Affaires étrangères John Baird. L'attentat a également été condamné par le Parlement européen et la France qui a demandé à « identifier et traduire en justice » les responsables.

Romney critique l'administration Obama



Le candidat républicain à la présidentielle Mitt Romney a qualifié de « honteuse » mercredi la réaction du gouvernement de Barack Obama aux attaques anti-américaines des islamistes en Égypte et en Libye, accusant le président de sympathies pour les extrémistes musulmans.

« Je suis scandalisé par les attaques contre des missions diplomatiques américaines en Libye et en Égypte et par la mort d'un employé consulaire américain à Benghazi », a déclaré M. Romney dans un communiqué.

« Il est honteux de la part du gouvernement Obama que sa première réponse n'ait pas été de condamner les attaques contre nos délégations mais de sympathiser avec ceux qui les ont orchestrées », a ajouté M. Romney.

L'équipe de campagne de M. Obama a riposté rapidement, son porte-parole Ben LaBolt reprochant à son tour à Mitt Romney de lancer des « attaques politiciennes » le jour d'un pareil drame.

« Nous sommes choqués, au moment où les États-Unis font face à la mort tragique de l'un des membres de notre personnel diplomatique en Libye, que le gouverneur Romney choisisse de lancer une attaque politicienne », a dit le porte-parole.