Des centaines de Libyens observaient lundi soir un sit-in à Benghazi, dans l'est du pays, pour dénoncer pour la première fois le fonctionnement du Conseil national de transition (CNT), qui a tenté de les rassurer en promettant de faire de cette ville la «capitale économique».

Les manifestants se sont installés sur la place Al-Chajara, dont les accès ont été bloqués par deux tentes, selon un correspondant de l'AFP. Cette place avait vu les premiers rassemblements contre le régime de l'ancien dirigeant Mouammar Kadhafi, le 15 février.

Le «peuple veut une nouvelle révolution», «le peuple veut faire tomber le Conseil de transition», avaient scandé pendant la journée les manifestants, qui ont dit vouloir «corriger la marche de la révolution».

Les protestataires ont réclamé dans un communiqué en 14 points que la liberté d'expression soit garantie, que les responsables de l'ancien régime et les «opportunistes» soient écartés, que les autorités agissent dans la transparence et que les jeunes soient plus impliqués dans la vie politique.

M. Abdeljalil n'a pas tardé à réagir, promettant plus de transparence sur les activités et la composition du Conseil et appelant les Libyens à la patience.

«Le CNT va activer son site internet, donner la liste de ses membres et publier leurs CV et va rendre publiques toutes ses activités», a-t-il déclaré au cours d'une conférence de presse.

«Je veux rassurer les Libyens : avec de la patience, beaucoup de choses vont être réalisées», a-t-il ajouté.

Peu après, des membres du CNT ont relayé ses propos, annonçant que Benghazi aurait à l'avenir un rôle majeur sur le plan économique.

«Benghazi sera la capitale économique de la Libye», a déclaré Abdelrazak al-Aradi, un membre du CNT, ajoutant que des ministères liés à l'activité économique seraient délocalisés dans cette ville, située à 1000 km à l'est de Tripoli.

M. al-Aradi a indiqué à l'AFP que cette décision avait été prise après les protestations contre le CNT qui ont eu lieu lundi, pour «satisfaire» la population de Benghazi qui se sent «marginalisée et oubliée alors qu'elle a joué le plus grand rôle dans la révolution libyenne».

«Benghazi ne veut pas seulement être la capitale économique. Nous voulons la transparence, une représentation des femmes et des jeunes, la décentralisation et (la publication de) la liste complète des membres du CNT», a réagi Bassem Fakhri, un universitaire de la ville.

Le «processus de la révolution est sur la bonne voie», a assuré le CNT dans un communiqué, promettant transparence, décentralisation, réconciliation et accélération de l'intégration des combattants ex-rebelles aux institutions de l'État.

Selon M. Abdeljalil, le gouvernement de transition, formé il y a moins d'un mois, s'est investi dans des dossiers jugés prioritaires, comme la réintégration des combattants (ex-rebelles) dans la société et la sécurité.

«Si ces objectifs sont réalisés dans les 100 prochains jours, ce sera un grand acquis pour les Libyens et le gouvernement», a-t-il estimé.

Soulignant que le travail du gouvernement et du CNT était perturbé dans certaines villes, il a indiqué qu'un budget serait alloué aux Conseils locaux dans plusieurs régions du pays, affectées par un conflit qui a duré sept mois.

Dimanche, l'organisation Human Rights Watch (HRW) avait fait part de sa préoccupation devant le «manque de transparence» des nouvelles autorités, en particulier au sujet des lois adoptées pendant la période de transition, l'attribuant essentiellement à un manque d'organisation.

«Abdeljalil doit apporter des réponses à de nombreuses de questions. Le régime n'a pas changé. Ce sont toujours les mêmes qui oppriment et marginalisent les villes», a dénoncé une avocate de Benghazi, Tahani al-Charif.

Selon Mme Charif, la colère monte depuis que le président du CNT a affirmé que les nouvelles autorités étaient prêtes à pardonner aux forces de Mouammar Kadhafi qui ont combattu les rebelles pendant la guerre.