Les forces du nouveau régime libyen se sont montrées lundi déterminées à prendre rapidement le contrôle de l'ensemble de Syrte, principal bastion des derniers fidèles de Mouammar Kadhafi, au lendemain de la conquête de l'université et du centre Ouagadougou.

«Les révolutionnaires sont à moins d'un kilomètre de la place centrale. Nous contrôlons près de 90% de Syrte. Les combats se déroulent sur une surface de quelques kilomètres carrés seulement», a déclaré Makhlouf el-Ferjani, membre du Conseil militaire de Syrte.

Les pro-CNT du front est progressaient lentement vers l'ouest et le centre-ville, de manière désordonnée, en sécurisant chaque maison, sous le feu des bombardements d'artillerie lourde et de nombreux tireurs embusqués.

Des combattants récupéraient les nombreuses armes abandonnées et regroupaient les femmes, les enfants et les vieillards, souvent choqués et hagards, pour les évacuer vers l'arrière.

Les hommes en âge de combattre faisaient l'objet de fouilles et d'interrogatoires, tout particulièrement ceux à la peau noire. Un journaliste de l'AFP a vu près d'une dizaine de prisonniers et quatre cadavres de combattants pro-Kadhafi.

Signe de la violence des combats, toutes les rues étaient ravagées, jonchées de véhicules calcinés, chaque maison criblée d'impacts de balles ou de bombardements. Et des traces de sang étaient visibles à l'intérieur de tous les bâtiments, souvent transformés en postes de tir.

«Nous sommes déterminés à prendre Syrte aujourd'hui» (lundi), a déclaré à l'AFP un combattant pro-CNT.

Dans le sud-ouest de cette ville symbole située à 360 km à l'est de Tripoli, non loin du centre de conférences Ouagadougou, les forces du CNT bombardaient les positions des pro-Kadhafi avec des chars et des missiles anti-chars, depuis une position surélevée.

Après le bombardement, «nous irons à pied et dans nos camions», a déclaré l'un des combattants, Ibrahim Mletan. «Cela va être très sanglant quand nous allons y aller parce qu'ils ne veulent pas se rendre».

Selon le personnel de l'hôpital de campagne établi pour le front ouest, 13 combattants pro-CNT ont été tués et 90 autres blessés dimanche sur ce front.

Vendredi et samedi, il y avait eu 18 morts et près de 300 blessés sur ce même front. Aucun bilan n'était disponible pour le front est, mais un journaliste de l'AFP a constaté que les pro-CNT y avaient aussi subi des pertes.

Dimanche, les forces du nouveau pouvoir libyen avaient réalisé une percée majeure en s'emparant de l'université et du Centre Ouagadougou, deux places fortes des pro-Kadhafi dans le sud de la ville. Dans la même zone, ils ont aussi pris le contrôle de l'hôpital Ibn Sina, le plus grand de la ville.

L'établissement était toujours sous le feu d'intenses bombardements, mais un convoi de la Croix-Rouge est arrivé lundi pour tenter d'évacuer les 50 à 100 patients encore présents.

«C'est chaotique», a déclaré une porte-parole de l'organisation, Dibeh Fakhr. «Ce n'est plus un hôpital en état de fonctionner. Il faut évacuer ces patients parce que les salles ont toutes été touchées. Il y avait trois médecins ici la semaine dernière, mais hier il n'y en avait plus qu'un».

Les patients doivent être transportés par la route vers l'est, parce qu'à l'ouest, l'hôpital de campagne établi à une cinquantaine de kilomètres de Syrte est déjà débordé par l'afflux de combattants blessés, et que celui de Misrata affiche également complet, a-t-elle expliqué.

Dans l'oasis de Bani Walid, autre bastion de pro-Kadhafi à 170 kilomètres au sud-est de Tripoli assiégé depuis plus d'un mois, 17 combattants du CNT ont été tués et 50 blessés dans des combats dimanche, a déclaré Salem Gheith, chef de la chambre des opérations du CNT à Tripoli.

«Nos forces se sont retirées tard dimanche soir de l'aéroport (qu'elles avaient pris quelques heures plus tôt) et de positions avancées conquises dans la ville», a-t-il ajouté, assurant qu'il s'agissait d'un «repli tactique» et que des renforts étaient arrivés pour permettre une reprise de l'offensive.

Dans la capitale, 200 à 300 hommes lourdement armés et bien organisés ont attaqué une mosquée dans la nuit de dimanche à lundi et profané les tombes de deux imams, selon des témoins.

Selon un enseignant de l'école coranique qui jouxte la mosquée, «ils portaient tous la barbe et étaient vêtus de treillis militaires. C'était certainement des islamistes extrémistes qui veulent créer des troubles» afin de s'emparer du pouvoir.