Les forces du nouveau régime libyen ont progressé samedi dans Syrte au prix de combats féroces et de lourdes pertes,  resserrant inexorablement l'étau autour des derniers partisans du régime déchu.

«Les dernières batailles sont toujours les plus terribles», a estimé le président du Conseil national de transition (CNT, ex-rébellion), Moustapha Abdeljalil, qui a reconnu que les combats à Syrte, à 360 kilomètres à l'est de la capitale libyenne, étaient «féroces».

«Nos combattants, encore aujourd'hui, ont affaire à des tireurs embusqués postés sur des points hauts à Syrte», a-t-il dit lors d'une conférence de presse à Tripoli avec les ministres de la Défense italien et britannique.

C'est à la chute de l'ensemble de la région de Syrte, théâtre de combats violents depuis le 15 septembre, que le CNT compte proclamer la «libération» du pays. Outre Syrte, seul le bastion assiégé de Bani Walid au sud-est de Tripoli résiste encore.

En deux jours, les combats à Syrte ont fait 18 morts et près de 300 blessés dans les rangs des pro-CNT, selon Hassan Umran, médecin dans un hôpital de campagne à 50 km de la ville côtière où les forces du CNT ont lancé une «grosse opération» pour tenter de venir à bout de la résistance de leurs adversaires.

Elles ont progressé dans le centre-ville et autour de plusieurs zones stratégiques où les hommes restés fidèles au leader déchu Mouammar Kadhafi se sont retranchés.

Les pro-CNT sont parvenus à prendre le contrôle d'un important axe routier  reliant le centre-ville au Centre de conférences Ouagadougou et à l'université, plus au sud. Ce Centre, vaste rectangle de béton en forme de blockhaus où se tenaient des sommets africains, et l'université sont des objectifs importants et font l'objet depuis des jours d'âpres combats de rue et à l'arme lourde.

«Nous nous sommes emparés de l'avenue. Nous contrôlons toute la route», a affirmé à un journaliste de l'AFP Naji Mismari, commandant CNT dont les hommes se trouvent désormais à moins d'un 1 km du Centre de conférences.

«Il y a des morts partout dans les maisons, nous avons libéré 17 familles coincées par les combats», a-t-il ajouté.

Plusieurs bâtiments autour du Centre sont également passés sous contrôle des ex-rebelles, a indiqué depuis Misrata le conseil militaire du CNT, parmi lesquels un vaste complexe de 700 logements en construction, d'où opéraient de nombreux tireurs embusqués pour ralentir la progression des anti-Kadhafi.

«Les snipers se trouvent désormais dans des bâtiments en hauteur, plus loin à l'intérieur de la ville», a déclaré un combattant pro-CNT au milieu des villas de luxe dévastées et criblées de balles.

La veille, les forces du CNT ont lancé une vaste offensive coordonnée depuis l'ouest, le sud et l'est, pour acculer les forces pro-Kadhafi vers la mer, avec le soutien aérien de l'OTAN.

Mais à mesure que l'étau se resserre, les tirs fratricides augmentent. À plusieurs reprises vendredi, des combattants ont reçu l'ordre d'arrêter de tirer, car ils touchaient d'autres pro-CNT quelques kilomètres plus loin.

Sur le plan humanitaire, la situation des civils reste critique. Selon la Croix-Rouge internationale, «plusieurs milliers de civils sont toujours bloqués dans Syrte» et seuls quelques médecins sont présents à l'hôpital Ibn Sina, le principal de la ville, pour soigner les blessés.

«En raison des combats, la plupart des patients ont été déplacés vers les couloirs et l'hôpital est plein de civils, dont de nombreuses femmes avec des enfants en bas âge», a déclaré Cordula Wolfisberg, médecin de la Croix-Rouge qui a pu pénétrer dans l'hôpital jeudi.

Plus au sud, à Bani Walid, vaste oasis au relief accidenté à 170 kilomètres au sud-est de Tripoli, les pro-Kadhafi opposaient eux aussi une résistance opiniâtre, que les pro-CNT tentaient à nouveau de contourner en négociant avec les tribus de la ville.

«Nous avons demandé une réunion afin de pouvoir entrer à Bani Walid sans combat, mais s'il n'y a pas d'accord, nous n'aurons d'autre choix que d'attaquer», a déclaré un commandant sur le front. Des milliers d'habitants ont fui Bani Walid depuis plusieurs semaines et l'exode se poursuit.