Aïcha Kadhafi, fille du dirigeant libyen Mouammar Kadhafi, a porté plainte mardi à Bruxelles et Paris pour «crimes de guerre» et «assassinat» après la mort présumée de quatre membres de sa famille dans un raid de l'OTAN fin avril à Tripoli, ont indiqué ses avocats.

Une première plainte contre l'OTAN pour «crimes de guerre» a été déposée devant le parquet de Bruxelles et le parquet fédéral belge, a déclaré à l'AFP l'un des avocats d'Aïcha Kadhafi, le Français Luc Brossollet.

Une seconde plainte a été déposée au parquet de Paris pour «assassinat», a indiqué un autre avocat de la fille de Mouammar Kadhafi, Me Dominique Atdjian.

Les plaintes, déposées simultanément, concernent le raid effectué par l'Alliance atlantique le 30 avril dernier au cours duquel le plus jeune fils du colonel Kadhafi, Saïf al-Arab, 29 ans, et trois des petits-enfants du dirigeant libyen, Saïf (2 ans), Carthage (2 ans) et Mastoura (4 mois), ainsi que des amis et voisins, auraient été tués, selon Tripoli.

Des doutes ont cependant été émis sur la réalité de ces décès. Le chef du gouvernement italien Silvio Berlusconi a ainsi affirmé qu'il s'agissait de «propagande» de part du régime libyen et que ce fils de Kadhafi n'était pas mort mais qu'il se trouvait dans un autre pays avec les trois petits-enfants.

Selon Aïcha Kadhafi, les décès sont néanmoins avérés. «La décision de l'OTAN de prendre pour cible une habitation civile à Tripoli constitue un crime de guerre», a déclaré Me Brossollet après le dépôt de plainte à Bruxelles.

La résolution 1973 du Conseil de Sécurité de l'ONU autorise l'OTAN à agir militairement pour protéger les populations libyennes, mais «même en cas de guerre, il ne faut pas s'en prendre aux civils», a souligné le troisième avocat d'Aïcha Kadhafi, Jean-Charles Tchikaya.

«Or, en l'espèce, la cible était une construction civile, habitée par des civils (...) et n'était ni un poste de commandement ni de contrôle militaire» du régime libyen, indique le texte de la plainte qu'a pu consulter l'AFP.

«Mme Aïcha Kadhafi, en sa qualité de mère (de Mastoura), de tante (de Saïf et de Carthage) et de soeur (de Saïf al-Arab), a subi un préjudice considérable, incontestablement lié aux faits dénoncés», ajoute le texte.

Techniquement, les plaintes ont été déposées «contre x», mais celle déposée en Belgique vise bien l'OTAN, dont le siège est à Bruxelles, ce qui selon les avocats rend compétentes les juridictions belges.

Selon la loi belge dite de «compétence universelle», les tribunaux du royaume peuvent poursuivre les auteurs présumés de crimes de guerre, de crimes contre l'humanité et de génocide s'il existe un «lien de rattachement» avec la Belgique, ce qui serait le cas puisque les décisions importantes de l'OTAN sont prises à Bruxelles.

Les parquets saisis doivent à présent décider s'il y a suffisamment d'éléments pour entendre des responsables de l'OTAN ou «toute personne qui pourrait être impliquée» dans la chaîne de commandement, ont souligné Me Brossollet et Tchikaya.

Les avocats ont en outre indiqué avoir été mandatés pour «introduire un recours en annulation» devant la Cour de justice européenne à Luxembourg afin de faire casser la décision des ministres de l'UE de geler les avoirs du régime libyen. Ce recours devrait être introduit «jeudi ou vendredi», selon Me Tchikaya.

L'UE a décrété fin février le gel de ces avoirs libyens et l'interdiction de visas à l'encontre du colonel Kadhafi, de son entourage et de sociétés soupçonnées de financer son régime. Elle a étendu mardi le gel des avoirs à six autorités portuaires, dont Tripoli et Brega.