Le régime du leader libyen Mouammar Kadhafi a commis des crimes contre l'humanité lors de la répression contre le soulèvement populaire de février, a dénoncé la commission d'enquête du Conseil des droits de l'homme de l'ONU dans un rapport publié mercredi.

Dans ce rapport, la commission estime que l'opposition a commis moins de violences, même si «quelques actes» sont considérés comme des «crimes de guerre».

«Sur la base des informations reçues lors de ses visites sur le terrain, notamment à Tripoli et Benghazi, et de plus amples informations de ses enquêtes, la Commission a identifié dans son rapport une série de violations graves du droit international des droits de l'homme», explique-t-elle.

Elle a ainsi «conclu que des crimes contre l'humanité et des crimes de guerre ont été commis par les forces du gouvernement libyen».

«Nous avons suffisamment de preuves pour suggérer que les forces gouvernementales ont eu un recours excessif à la force contre les manifestants, au moins dans les premiers jours des manifestations, ayant entraîné un nombre importants de morts et de blessées», souligne le rapport.

Il indique par ailleurs que les forces gouvernementales «ont détenu arbitrairement un nombre important de personnes dans de nombreuses villes et villages à travers le pays». La commission dénonce en outre des disparitions forcées ainsi que des obstacles à l'accès à des soins médicaux de la part des autorités de Tripoli.

Enfin, les médias ont fait l'objet «d'attaques graves» par les forces du régime, «visant essentiellement à étouffer» leur couverture des évènements.

Concernant la rébellion, la Commission dit avoir a reçu «moins d'informations sur des faits qui pourraient être considérés comme des crimes internationaux par les forces de l'opposition».

Elle a cependant «trouvé quelques actes qui constituent des crimes de guerre». Notamment des cas de «torture ainsi que d'autres formes de traitements inhumains et dégradants». Ces derniers ont été commis par l'opposition ainsi que par Tripoli, selon le rapport.

Se disant préoccupée par ces violations commises par les deux parties dont le conflit a dégénéré «en guerre civile» qui a fait entre «10 000 et 15 000 morts» selon les estimations de Tripoli, de Benghazi et des ONG, la commission recommande au Conseil des droits de l'homme de continuer à suivre de près le dossier.

Cette commission a été créée suite à une décision du Conseil fin février, réclamant une évaluation indépendante des violences commises dans le pays depuis le soulèvement populaire contre le régime de Mouammar Kadhafi.

Pour établir son rapport, elle a effectué une mission de trois semaines qui l'a conduite en Libye, en Égypte et en Tunisie.

Lors de son passage en Libye, elle a pu rencontrer les autorités libyennes mais aussi «le Conseil national de transition (opposition), des représentants de la société civile et des personnes à travers le pays».

Au total, elle s'est entretenue avec «plus de 350 personnes» dont des médecins et patients dans dix hôpitaux. Elle a en outre vu 30 personnes arrêtées à Tripoli et Benghazi ainsi que 148 déplacés et réfugiés en Libye, à des points de transit ou des camps de réfugiés à l'extérieur du pays.

Dans son rapport, elle indique par ailleurs avoir étudié plus de 5000 pages de documents, visionné plus de 580 vidéos et vu plus de 2200 photographies.

Présidée par le juriste égyptien Cherif Bassiouni, la commission doit présenter son rapport le 6 juin aux représentants des 47 Etats membres du Conseil des droits de l'homme réunis pour leur 17ème session à Genève.