L'Otan continue à se préparer à intervenir si l'ONU votait une zone d'interdiction aérienne en Libye, mais alors que Mouammar Kadhafi annonce une bataille décisive pour jeudi, cela risque d'être trop peu et trop tard.

«L'alliance veut que ses plans opérationnels soient prêts en fin de semaine ou au début de la semaine prochaine. Elle accélère donc ses préparatifs, mais, attention, aucun feu vert n'a été donné», a déclaré à l'AFP un diplomate allié.

Le temps presse car un projet de résolution prévoyant l'instauration d'une zone d'exclusion aérienne, défendue par la Grande-Bretagne, la France et les pays arabes, devait être soumis jeudi au Conseil de résolution de l'ONU, tandis que les troupes du colonel Kadhafi se rapprochent de Benghazi (est), bastion de l'opposition libyenne.

Les chefs militaires ont soumis mardi et mercredi aux représentants des 28 pays de l'Alliance atlantique les différentes options envisageables pour trois cas de figure: une zone d'interdiction aérienne, un embargo sur les armes et une opération de secours à caractère humanitaire.

Les ambassadeurs «leur ont demandé de poursuivre leur travail de planification après leur avoir donné un cadre politique» sur la base duquel les militaires devaient de nouveau plancher jeudi et vendredi, a précisé le même diplomate.

Les 28 capitales pourraient se retrouver vendredi après-midi et ce week-end pour ré-examiner l'état d'avancement de la planification, et décider d'aller de l'avant, ou pas.

«Rien n'est joué à ce stade», a cependant souligné ce diplomate. Outre le veto possible de la Chine et/ou de la Russie au Conseil de sécurité, il faudrait encore surmonter les divisions au sein même de l'Otan sur ce qu'il convient de faire.

La Turquie a redit la semaine dernière son opposition à une intervention de l'Otan et l'Allemagne reste opposée à toute action militaire occidentale dans le monde arabe.

Surtout, a expliqué à l'AFP un responsable militaire allié, «les États-Unis ne sont pas assez enthousiastes pour faire pencher la balance au sein de l'Otan» et tenter d'amener Berlin et Ankara à s'aligner.

«Les Américains estiment qu'une zone d'exclusion aérienne ne sert à rien, étant donné la supériorité de l'armée de Kadhafi sur les rebelles, et que la seule façon d'être efficace serait d'y aller avec des soldats sur le terrain. Ce qu'ils ne feront pas, car ils sont suffisamment occupés en Irak et en Afghanistan», a-t-il dit.

Ce qu'a confirmé l'ambassadrice américaine à l'ONU, Susan Rice, en estimant mercredi que le Conseil de sécurité devrait envisager des mesures allant au-delà d'une simple zone d'exclusion aérienne.

Quant à la France, favorable elle à une intervention allant jusqu'à des bombardements ciblés contre des objectifs sensibles de l'armée et du gouvernement libyens, «elle ne veut pas que l'Otan soit en première ligne», selon ce responsable militaire.

Paris privilégierait une action militaire avec les Britanniques et des pays arabes.

Les alliés de l'Otan pourraient «demander dès ce week-end aux pays membres de dire quelle pourrait être leurs contributions nationales respectives aux trois types d'opérations planifiées», a indiqué le responsable militaire.

Mais, sachant que si l'ONU donnait son aval à une zone d'interdiction aérienne et si tous les alliés s'y ralliaient, «il faudrait, une fois la décision prise, deux semaines pour que nous soyons opérationnels, les chances que l'Otan ait un rôle sont minimes», a-t-il estimé.

Résultat, dit-il, «les militaires de l'Otan travaillent comme des fous depuis trois semaines pour planifier des opérations et vont continuer de les préparer, et à la fin on risque de ne rien faire et d'avoir travaillé en pure perte».